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Chez les pharmaciens : Aller de l'avant est le maître-mot

Par Isabelle Adenot, Président du Conseil national de l’ordre des pharmaciens

Depuis la nuit des temps et dans un cadre de pensée thérapeutique, la Pharmacie reposait, sur une activité précise : fabriquer les remèdes. Aujourd’hui, il faut ouvrir le compas et déplacer l’angle de vue.

Le cadre de réflexion est supranational ; Le nombre de patients atteints de pathologies chroniques dépasse celui de ceux atteints de pathologies aigues ; Chacun recherche toujours plus d’autonomie ; Les technologies numériques génèrent des données et permettent l’analyse de paramètres qui influenceront tant les politiques de santé que les parcours de soins et les pratiques professionnelles ; L’OMS parle de « bien être » dans sa définition de la santé…..

La Pharmacie a toujours su évoluer et s’adapter. Sa transformation silencieuse nous fait parfois oublier les changements conséquents effectués, un peu comme lorsqu’on regarde une photo, sa photo, d’il y a quelques années.

Les pharmaciens d’officine, tous largement informatisés, « dispensent » en consultant le Dossier Pharmaceutique, substituent les princeps, réalisent des entretiens pharmaceutiques, proposent des tests rapides d’orientation diagnostique, vivent d’un nouveau modèle économique émergent….A côté de ces exemples de changements, des constantes demeurent : les officinaux sont toujours proches et appréciés de la population qui leur fait confiance. Et leurs valeurs déontologiques, intemporelles, sont une force indéniable dans un monde qui change très vite.

Aujourd’hui, en accord avec les autres professionnels de santé, les pharmaciens d’officine français se doivent d’entériner la mutation pharmaceutique qui couve dans le monde entier : s’éloigner du seul produit en se rapprochant toujours plus du patient. Pour arriver en gare « à l’heure », le temps n’est donc plus à la réflexion mais à l’action. En effet, les patients attendent sur le quai, demandeurs et prêts à embarquer dans le train d’une nouvelle ère pharmaceutique.

Mais si ces concepts de « basculer du produit au patient », « guérir mais aussi prévenir » sont partagés par tous les pharmaciens, ils n’en impliquent pas moins de métamorphoser les actuels paradigmes de pensée. Et naturellement, une telle révolution culturelle engendre des défis très nombreux et loin d’être anodins !

Quelques exemples : le modèle économique, essentiellement centré sur le produit doit migrer vers une reconnaissance des services. Ce déploiement de services impose dans le même temps le développement de la traçabilité des actions alors que l’exercice officinal a une culture essentiellement orale. Les locaux des officines doivent se transformer, les comptoirs debout devant laisser une place à des espaces de confidentialité et des espaces prévention. La formation initiale et continue, au côté de son programme scientifique, doit plus rapidement intégrer les sciences humaines.

En sus, les retards de publication de certains textes réglementaires freinent les initiatives qui rendraient pourtant des services incontestables à la population française. Et ces retards favorisent également l’abandon de la filière officine par les étudiants en pharmacie. Quelles bonnes pratiques ? Quelles nouvelles prestations ? Quelles modalités d’association ? Quelles règles d’implantation territoriale ? La publication des textes répondant à ces questions est indispensable pour que les officinaux puissent se projeter dans l’avenir.

Sans pleurer sur un passé révolu, les pharmaciens d’officine doivent et devront s’emparer collectivement des possibilités ouvertes pour créer un nouveau dessein enrichi de nouvelles promesses. Mettons des étoiles dans les yeux de nos jeunes…. Autrement dit, comme la profession l’a toujours fait, aller de l’avant est le maître mot. 

 

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