“Dans l’hypothèse où nous n’y arriverions pas, pour des raisons tant calendaires que politiques (...) il faudra évidemment que le gouvernement présente au Parlement un projet de loi spéciale” a déclaré le ministre des Relations avec le Parlement, Laurent Panifous lors d’une réunion au Sénat alors que l’adoption du budget semble patiner. Le projet de loi spéciale interviendrait si les parlementaires n’arrivaient pas « achever la conduite du processus budgétaire avant le 31 décembre » a-t-il encore indiqué. Le ministre a toutefois réaffirmé que l’objectif du gouvernement était bien d’arriver à un vote de ce budget. Il s’agissait au moment où nous écrivons ces lignes que d’une hypothèse. « Nous n’en sommes pas là, les discussions budgétaires sont encore longues » a précisé à nos confrères du Monde, Laurent Panifous.
Mais il pourrait s’agir très vite de bien plus que d’une hypothèse. Rappelons que sans budget, l’Etat ne peut plus percevoir l’impôt ni engager de dépenses. Donc, le budget largement remanié et probablement rejeté largement par les députés le 23 novembre partira au Sénat dans la foulée. Le Palais du Luxembourg fera ensuite son travail législatif en revenant sur tout ce qui a été discuté à l’Assemblée. Une commission mixte paritaire composée de 7 députés et 7 sénateurs tentera après de trouver un compromis. Si le consensus l’emporte, Assemblée nationale et Sénat devront voter le texte. En cas d’échec, hypothèse plus que probable, l’Assemblée nationale aura le dernier mot. Mais le calendrier sera probablement trop court pour arriver à un vote avant la fin décembre comme le veut la Constitution. Pour rappel, le délai court depuis le dépôt du projet de loi de finances sur le bureau de l’Assemblée le 14 octobre dernier. L’Assemblée avait ensuite 40 jours pour une première lecture. Le Sénat a pour sa part droit à 20 jours. Il y a ensuite 10 jours pour les dernières discussions et échanges entre les deux chambres. Enfin, le Conseil constitutionnel à 8 jours pour se prononcer.
Quelles solutions alors pour avoir un budget avant la fin de l’année ? Un vote du budget ? Peu probable. Une adoption par 49.3 ? Sébastien Lecornu ne peut pas revenir sur sa promesse. « Renoncer à l’article 49.3 ne doit pas nous faire renoncer à ce que la France ait un budget au 31 décembre » a rappelé Sébastien Lecornu le 3 octobre dernier. L’utilisation par voie d’ordonnances ? Trop risqué pour le gouvernement qui pourrait être censuré. « Si j’ai fait le choix de rendre le pouvoir à chaque parlementaire, en renonçant au 49.3, ce n’est pas pour nier encore plus leur responsabilité ! » a tenté de rassurer le Premier ministre. « L’ordonnance, c’est la négation du Parlement, voilà pourquoi le Parlement doit être raisonnable » a pour sa part indiqué à titre préventif sans doute le président du Sénat, Gérard Larcher. Reste la loi spéciale. « On y va tout droit puisque personne ne semble désireux d’aller vers les ordonnances car cela n’a jamais été fait et on ne sait pas bien comment ça marche » a admis le rapporteur général du budget Philippe Juvin (LR). La loi spéciale « existe pour ne pas que l’on se retrouve dans une situation de « shutdown » à l’américaine » a expliqué Marc Fesneau aux membres de l’Association des Journalistes parlementaires (AJP). « Il faut arrêter de fantasmer sur le « shutdown ». Nous devons juste trouver les meilleures voies constitutionnelles pour y arriver » lui a répondu Philippe Juvin dans Le Figaro.
Reste que cette loi spéciale ne fera pas tout. Elle n’est d’abord que temporaire. « Cela nous obligerait à faire une loi rectificative en début d’année prochaine, comme cela a été fait avec François Bayrou début 2025 » a souligné le patron des députés MoDem.
Mais pour la loi spéciale comme pour le budget, le temps est compté. Elle devra être présentée d’ici le 23 décembre pour un vote entre le 27 et 28 décembre, en pleine trêve des confiseurs. Qui sera là ? C’est bien la question. Joyeux Noël ! ■
