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“Les véhicules électriques sont chers et ils polluent : en finir avec les infox”

Par Agnès Pannier-Runacher, Ministre de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche

La suppression des ZFE révèle un phénomène inquiétant : la montée d’une désinformation climatique alimentant un discours politique toxique, mêlant cynisme électoral, déni du réel et lâcheté politique. Ce fléau cible désormais les véhicules électriques, en propageant raccourcis, approximations et mensonges.

Oui, la révolution électrique impose une réorganisation industrielle sans précédent. Mais rappelons-le : le moteur électrique est aujourd’hui le plus efficace, tant sur le plan de la santé publique que du climat et de la compétitivité. Les grandes puissances — à commencer par la Chine — l’ont d’ailleurs bien compris. Soit la France et l’Europe se positionnent comme leader, soit elles capitulent et se condamnent a déclassement.

Rendement énergétique : la supériorité mécanique de l’électrique

Le rendement des moteurs électriques atteint 80 à 95 %, contre seulement 20 à 45 % pour les moteurs thermiques. Un véhicule thermique ne convertit que 12 à 30 % de l’énergie contenue dans l’essence en mouvement, tandis qu’un véhicule électrique transforme plus de 77 % de l’énergie électrique en traction.

Cette supériorité mécanique se traduit par une réduction massive des coûts d’usage, une indépendance énergétique accrue, et une compétitivité structurelle de nos industries.

Stop aux idées reçues

Non, un véhicule électrique n’est pas plus émetteur qu’un véhicule thermique. Sur l’ensemble de son cycle de vie, il émet deux à six fois moins de CO2 qu’un modèle thermique. En France, ce ratio est particulièrement favorable puisque notre mix électrique est décarboné à plus de 95 %. Par ailleurs, l’électrique n’émet aucun polluant atmosphérique à l’échappement : il participe donc de l’amélioration de la qualité de l’air.

Non, les véhicules électriques ne sont pas cantonnés aux courts trajets. On observe deux évolutions majeures ces dernières années. Leur autonomie augmente, avec des modèles qui offrent de 400 à 600 km d’autonomie. En outre, la France est désormais l’un des pays les mieux maillés d’Europe en points de recharge. Elle en compte désormais près de 2,5 millions, dont près de 170 000 sur l’espace public. Ainsi, non seulement les trajets du quotidien, inférieurs à 50 km, peuvent être faits en voiture électrique, mais c’est aussi le cas des longs trajets. Le paiement s’est progressivement simplifié et les temps de recharge ont diminué. Sur l’autoroute, recharger sa batterie jusqu’à 80 % en moins de 30 minutes, c’est désormais possible.

Non, les véhicules électriques ne sont pas réservés aux Français les plus riches. L’industrie est en train de progressivement baisser ses coûts et de développer des modèles plus économes. Pour sa part, l’Etat se mobilise pour offrir des soutiens importants, notamment pour les ménages modestes. Le bonus écologique a ainsi permis à plus de 900 000 ménages de changer de voiture depuis 2018. L’année dernière, le leasing social a permis à 50 000 ménages modestes d’accéder à un véhicule électrique à des coûts avoisinant 100 euros par mois voire moins. Un nouvel appel à candidats est prévu pour septembre 2025, pour 50 000 véhicules. Par ailleurs, au quotidien, la recharge électrique au tarif réglementé s’avère bien moins chère que le passage à la pompe. De même, les coûts d’entretien sont moindres et la fiscalité plus avantageuse. En tenant compte des aides, l’usage d’une voiture électrique est donc devenu plus économique que pour une voiture thermique.

Oui, le secteur automobile est chamboulé mais ne pas se positionner sur les véhicules qui vont prendre l’essentiel des parts de marché demain c’est à coup sûr tuer notre industrie. L’électrique est une révolution majeure que nous ne pouvons pas laisser passer. C’est pour cela que la France soutient plusieurs giga-factories de batteries, qui permettront de produire 100 à 120 GWh de cellules à horizon 2030. De quoi équiper deux millions de véhicules par an. La part de l’électrique dans les ventes de véhicules est passée de 1,2 % en 2017 à 17,1 % en 2024. Et à la faveur de l’éco-score, cette progression a bénéficié aux voitures produites en France et en Europe. Sait-on que 17 % des véhicules électriques vendus en France en 2024 était Made in France contre 9 % pour les thermiques ?

Non, les voitures thermiques ne seront pas interdites en 2035. 2035 n’est pas la fin de toutes les voitures thermiques qui circuleront en Europe, comme cela a pu être présenté par certains partis politiques. Ce sera l’arrêt de la mise sur le marché de nouveaux modèles thermiques ; la nuance est de taille. Moins de 15 % des voitures thermiques immatriculées l’année dernière étaient neuves. Les plus de 85 % restants correspondent au marché de l’occasion. Il est probable que des véhicules thermiques continuent à circuler en 2050 et après. Ils seront simplement bien moins nombreux dans notre parc.

Oui, la voiture électrique est un enjeu de souveraineté pour notre pays. Un moyen de sortir de notre dépendance aux énergies fossiles. En passant de carburants fossiles à l’électricité, on substitue une énergie importée et carbonée dont le prix n’est pas maîtrisable, à une énergie 100 % produite en France et bas-carbone.

Vous l’avez compris, nous ne devons pas faiblir. A fortiori dans un contexte géopolitique profondément instable et incertains. La Chine l’a bien compris, qui se positionne en leader de la transition énergétique. Sans trembler, sans hésiter, sans douter, elle est devenue le premier exportateur automobile mondial, avec 1,2 millions de véhicules électriques vendus à l’étranger en 2023.

La transition ne se décrète pas. Elle se construit sur des travaux de recherche, des preuves, des choix rationnels. Agiter les peurs ne sert personne. Nous devons faire confiance à la science, à nos ingénieurs, aux territoires et aux industriels pour réussir cette bascule. Sans dogmatisme, mais avec détermination.

A tous les élus, les parlementaires qui doutent : ce sont ces faits et ces chiffres qui intéressent vos électeurs et qui intéressent les Français. Pas les à-peu-près. Pas la régression. Pas la dépendance à des sources d’énergie qui nous condamnent collectivement. Ni à des importations sur lesquelles nous n’avons pas la main.

Si les infox sur la voiture électrique sont tenaces, je le suis davantage. Parce que je crois au progrès. Un progrès que nous avons choisi avec responsabilité. Qui se fonde sur la science. Que nos entreprises françaises et européennes incarnent pour nous porter vers une mobilité durable et écologique.

Nous avons l’occasion, dans la course contre la montre dans laquelle nous sommes engagés contre le dérèglement climatique, de faire nation, de front, ensemble. Et avec courage. Je ne cesserai jamais d’aller chercher cette énergie collective en rétablissant la vérité. C’est elle qui sera le vrai moteur de notre réussite. 

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