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De l’AME à l’AMU… à l’AME

Lors du débat sur le projet de loi immigration, le Sénat a voté la suppression de l’aide médicale d’Etat pour la transformer en aide médicale d’urgence. La mesure a été réintroduite en commission des lois de l’Assemblée.

Le 7 novembre, le Sénat votait la suppression de l’aide médicale d’Etat (AME) pour les « sans-papiers » par 200 voix pour et 136 contre. L’AME ainsi revue à la baisse est devenue l’aide médicale d’urgence. Cette AMU ne concernera plus que « la prophylaxie et du traitement des maladies graves et des douleurs aiguës, des soins liés à la grossesse, des vaccinations réglementaires et des examens de médecine préventive ». C’était une mesure que la droite exigeait depuis un certain temps déjà et qu’elle a fini par obtenir. Mais la victoire a été de courte durée. Le gouvernement ne s’est pas opposé à ce vote mais a estimé que la mesure n’avait rien à faire dans le projet de loi immigration laissant la porte ouverte à sa suppression par l’assemblée ou comme le dira plus tard Gérald Darmanin une censure par le Conseil constitutionnel. « Mélanger les débats sur l’AME et le contrôle de l’immigration est un non-sens » estimait la ministre déléguée aux Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo au Sénat avant de poursuivre : « L’AME en tant que telle n’est pas un facteur d’attractivité ni de tourisme médical ». Parce que c’est « un dispositif de santé publique », « le gouvernement est très attaché à l’AME », « c’est une conviction forte » a-t-elle encore déclaré avant de s’en remettre à « la sagesse » des sénateurs. De son côté, le ministre de la santé, Aurélien Rousseau qualifiait le vote du Sénat de « profonde erreur ». C’est « même une faute » jugeait-il.

Au Sénat, les débats ont été houleux entre droite et gauche arcboutées l’une et l’autre sur leurs principes. « Supprimer l’AME, c’est condamner à mort les plus précaires d’entre nous » s’est emportée en séance la socialiste Anne Souyris. « Au nom de votre haine de l’étranger, vous êtes prêts à tout » enchérissait l’écologiste Mélanie Vogel. « La France a 3000 milliards de dette, elle ne peut pas accueillir toute la misère du monde » a pour sa part justifié le sénateur LR, Alain Joyandet. « Il n’y a nul abandon des étrangers en situation irrégulière en France » a ensuite insisté Muriel Jourda, rapporteure LR du projet de loi immigration. « Il y a un lien entre notre capacité à réguler l’immigration et à préserver notre modèle social » a fini par préciser le président du groupe LR, Bruno Retailleau.

A l’Assemblée, les député en commission se sont évertués à détricoter le texte sénatorial. En ligne de mire l’AMU. Le 29 novembre, les députés de la commission des lois ont rejeté, à une très grande majorité l’article introduit par les sénateurs qui transformait l’Aide médicale d’État en Aide médicale d’urgence, dans le projet de loi immigration. Pour Florent Boudié (Renaissance), rapporteur du projet de loi a souligné qu’il s’agissait d’une question relevant de la « santé des individus » mais aussi d’une « question de santé collective ». Sans surprise, le ministre de la santé Aurélien Rousseau a salué un bougé « indispensable ». « C’est une position juste et forte pour un dispositif indispensable, efficace et évalué de santé publique » s’est-il félicité sur les réseaux sociaux.

Reste qu’en commission des lois, le texte sénatorial a entièrement été repris par les députés qui n’ont pas hésité à revenir sur les mesures phares des sénateurs jugées trop à droite. Avant même le retour de l’AME, les députés étaient revenus sur le principe d’une fixation par le Parlement de ces quotas d’« étrangers admis à s’installer durablement en France », hors droit d’asile. Après le passage en commission et l’adoption d’un amendement le gouvernement n’aura plus que l’obligation de présenter chaque année au Parlement, « pour les trois années à venir », des « objectifs chiffrés ». Il lui faudra aussi expliquer les éventuels écarts avec les résultats enregistrés. Les députés sont également revenus sur les mersures de durcissement des critères du regroupement familial. Un amendement du rapporteur Boudié a notamment supprimé le renforcement des conditions de séjour pour pouvoir en bénéficier. Il a en revanche maintenu la nécessité pour le demandeur de disposer d’une assurance maladie et de bénéficier de ressources régulières. 


Le coût de l’AME est estimé à 1,14 Mde dans la loi de finance initiale pour 2023, soit une hausse de 12,5 % par rapport à l’année précédente. On dénombre près de 400 000 bénéficiaires de l’AME.

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