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Prévoir l’avenir énergétique de la France : une impérieuse nécessité

Par Antoine Armand, Député de Haute-Savoie, Rapporteur de la commission d’enquête souveraineté et indépendance énergétique

Antoine Armand, député Renaissance de Haute-Savoie, rapporteur de la Commission d’enquête sur les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France, revient sur l’objet et les premiers travaux de la Commission qui devrait rendre ses conclusions en avril 2023.

Chacun le constate : la crise énergétique nationale, européenne et mondiale que nous traversons est exceptionnelle ; elle semble, à vrai dire, inédite dans notre histoire contemporaine.

Elle résulte au premier chef d’une conjonction de facteurs inédits. Les suites de la pandémie de Covid-19 ont déstabilisé les chaînes de production, entraîné des retards dans la maintenance – on pense évidemment à la filière nucléaire – et dans l’investissement public et privé au sein du secteur énergétique ; la crise sanitaire mondiale a eu aussi un impact durable sur la production de pétrole. L’invasion de l’Ukraine par la Russie et ses conséquences ont conduit à une raréfaction considérable de notre approvisionnement en gaz russe – une source d’énergie majeure en France, malgré la baisse régulière de celle-ci, et encore plus en Europe.

Cette crise, pourtant, semble bien avoir des racines plus profondes. Les choix énergétiques, qui renvoient à des choix industriels, économiques et sociaux, s’inscrivent dans un temps bien plus long, avec une bien plus grande inertie que de nombreuses politiques publiques. Ils supposent de penser l’approvisionnement en combustibles, ressources, minerais ; ils supposent de posséder sur le territoire national ou sur le continent des compétences, des savoir-faire, du soutien des acteurs territoriaux publics et privés.

Voilà tout l’objet de cette commission d’enquête et de mon devoir de rapporteur : examiner avec lucidité, sans complaisance ni anachronisme, les choix énergétiques de ces dernières décennies et leur impact sur notre indépendance et notre souveraineté, sur la compétitivité de nos entreprises comme sur notre capacité à réussir l’indispensable décarbonation.

Pour cette raison, j’ai souhaité organiser les auditions en différents cycles qui se succéderont jusqu’à la fin de la période des auditions de notre Commission.

Il m’est apparu indispensable de commencer par dessiner les contours de cette « souveraineté » ou « indépendance » énergétique, des termes qui ont été largement discutés, nuancés, contextualisés par les premiers experts que nous avons entendus, de l’historien Jacques Percebois à Jean-Marc Jancovici, des énergéticiens que nous avons commencé à recevoir aux statisticiens français et européens, des directeurs des services des ministères de l’Environnement, de l’Energie et de l’Economie aux experts de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), et de Nicolas de Maistre, Directeur au Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale à Patrick Pouyanné, Président-directeur général de TotalEnergies.

Ainsi, en trois semaines, nous avons déjà pu, au cours de onze réunions de la Commission, auditionner près d’une trentaine de spécialistes du sujet, historiens, économistes, services statistiques. Avec l’audition dans les prochaines semaines des énergéticiens, des principaux responsables d’Electricité de France et du Commissariat Général à l’Energie Atomique, nous entrons dans le vif du sujet : celui de notre capacité de production et de notre sécurité d’approvisionnement, ainsi que les décisions publiques et privées qui les ont fait évoluer.

Ce sera, évidemment, l’occasion d’aborder les choix de développement de l’énergie nucléaire et ses enjeux, comme notre vitesse d’investissement et de développement des énergies renouvelables.

Il s’agira également, et c’est probablement notre mission la plus substantielle à la veille de l’examen de la loi de programmation énergétique, de tirer les leçons de nos choix politiques, industriels, entrepreneuriaux, pour contribuer à la proposition d’un avenir énergétique à la hauteur de notre siècle, en mesure de conjuguer la sobriété et la décarbonation avec la défense de notre souveraineté. 

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