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Alerte climatique sur les ports

Un groupe de chercheurs a mis en avant les risques élevés du changement climatique pour les ports, infrastructures essentielles au développement économique de tout pays.

Dans une note de recherche publiée en janvier dernier, l’agence de notation Moody’s mettait déjà en garde contre les risques à long terme liés au réchauffement climatique en général et à la montée des eaux en particulier et plus particulièrement pour plusieurs pays vulnérables comme l’Égypte, le Vietnam, le Suriname, les Bahamas, les Philippines ou les Maldives, sans pour autant épargner des pays plus développés. Cette alerte se base sur plusieurs études tendant à démontrer qu’avec le réchauffement climatique le niveau de la mer montera « de 1 à 3 mètres d’ici 2100 ». « Pour certains pays, le niveau de la mer atteindra temporairement des niveaux plus élevés, à cause des tempêtes et des inondations » ajoutait même l’étude de Moody’s. Et l’agence d’enfoncer le clou : « Les répercussions économiques et sociales de la perte de revenus, des dommages aux biens, des décès, des problèmes de santé et des migrations forcées causés par la montée du niveau de la mer sont immédiates ».

Plus récemment, une enquête menée par un groupe d’experts de l’Institut d’Hydraulique environnementale de l’Université de Cantabrie (Espagne) et du Centre national pour la recherche atmosphérique des États-Unis s’est plus particulièrement penchés sur les effets d’un réchauffement climatique sur les ports et leurs infrastructures et plus précisément les 2013 ports côtiers les plus importants du monde. Leurs conclusions, publiées dans la revue Nature Climate Change, signalent 289 ports – soit plus de 14 % - comme étant susceptibles d’être confrontés à un risque « extrême » ou « très élevé » d’ici la fin du siècle en cas de non-respect de l’Accord de Paris et de la hausse des émissions de gaz à effet de serre. Ces experts estiment encore que 402 autres ports (20 %) seront également menacés (risque élevé) si rien n’est fait pour passer en dessous du seuil d’alerte de +2° de la température terrestre par rapport au niveau préindustriel. Selon les experts, les ports exposés à un « risque extrêmement élevé pour 2100 » sont ceux situés sur les îles du Pacifique, dans les Caraïbes et dans l’Océan Indien, en Indonésie, à Madagascar, aux Palaos et au Vanuatu. Les infrastructures portuaires à « risque très élevé » se situent plutôt sur la côte africaine de la Méditerranée et de la Péninsule arabique.

Actuellement, ce sont 44 ports sur les 2013 recensés qui sont confrontés à un risque très élevé. Si l’Accord de Paris n’est donc pas respecté et si les ports ne font rien pour s’adapter (hypothèse de travail des chercheurs), le nombre de ports qui seront, à l’horizon 2100 confrontés à un risque très élevé sera alors multiplié par 6,5 pour atteindre 289 ports.

Pour arriver à ce constat et au classement par risque des ports, le groupe d’experts met en avant plusieurs éléments climatiques pouvant avoir une incidence sur les infrastructures portuaires. Il cible notamment le passage des vagues au-dessus des ouvrages de protection, des digues, l’inondation des quais et des zones de stockage avec la hausse du niveau de la mer, les vents forts gênant l’approche et l’accostage des navires, le chargement et le déchargement de la cargaison, la visibilité réduite en raison de fortes précipitations, une chaleur élevée interdisant au personnel de travailler... Des phénomènes climatiques extrêmes qui vont se multiplier à l’avenir.

« Le changement climatique peut compromettre les activités portuaires et ainsi entraîner une augmentation du chômage technique et des pertes économiques » concluent les experts. En appui de leur démonstration, les experts citent l’exemple de l’ouragan Katrina qui en 2005 a provoqué plus de 850 millions de dollars de dégâts aux Etats-Unis rappelant que le port de Gulport est resté fermé 30 jours et celui de la Nouvelle-Orléans 12 jours. 

Mené en partenariat entre l’Europe (UE, Esa, Cnes, Eumstat) et les Etats-Unis (Noaa, Nasa), Sentinel 6 est un projet de deux satellites, 6A et 6B, dont la mission principale est la surveillance des océans. Sentinel 6A a été construit par Airbus Defence and Space (maître d’œuvre) et Thales Alenia Space (fournisseur de l’instrument principal). Le lancement sur Falcon 9 a été financé par la Nasa. L’Europe et les Etats-Unis ont chacun mis sur la table 400 millions d’euros pour les deux satellites.
Pendant 7 ans, en survolant 95 % des océans libres de glace, le satellite va en mesurer la hauteur, avec une précision de quelques centimètres et même de quelques dixièmes de millimètres après analyse sur dix jours des données par les océanographes. « Les données de Sentinel 6 seront les plus précises jamais obtenues ; elles seront utilisées afin de mieux comprendre un indicateur clé du changement climatique, la montée du niveau de la mer à l’échelle mondiale. Ces données seront également utilisées pour les prévisions météorologiques, qu’il s’agisse d’améliorer la précision des prévisions saisonnières ou de prédire la trajectoire des ouragans ou des cyclones » précise Alain Ratier, directeur général d’Eumetsat. Sentinel 6B sera lancé en 2025 pour assurer la prolongation de la mission au-delà de 2030.
Depuis le début du XXème siècle, avec le réchauffement climatique (fonte des glaces) le niveau des océans a augmenté d’une vingtaine de centimètres. D’ici à 2050, si rien n’est fait, les prévisionnistes parlent de vingt à trente centimètres de plus, voire un mètre d’ici la fin du siècle pour les plus pessimistes. Aussi, clairement, pour l’océanographe, Craig Donlon, « les données des satellites doivent pouvoir être utilisées par les décideurs politiques, nationaux ou locaux, afin de se protéger contre la hausse du niveau des océans. De grandes villes comme New York, Amsterdam, Londres ou Tokyo sont concernées mais aussi des Etats insulaires comme les Maldives où des communautés entières doivent être déplacées ».

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