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Syndicat des énergies renouvelables : “Le coût des énergies renouvelables a diminué de manière spectaculaire”

Entretien avec Jean-Louis Bal, Président du Syndicat des énergies renouvelables

Pour la France, quels sont les enjeux en matière d’énergies renouvelables ?

La France s’est fixé l’objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, ce qui implique de décarboner totalement notre production d’énergie.

Les énergies renouvelables constituent le moyen le plus efficace d’atteindre cet objectif. Outre leur rôle essentiel pour y parvenir, elles présentent de multiples atouts : il s’agit d’énergies décentralisées, génératrices de valeur dans tous les territoires, créatrices d’emplois et dont les coûts aujourd’hui les rendent compétitives par rapport aux autres énergies. Enfin, issues de ressources locales, elles permettent, déjà, de réduire la facture énergétique de la France en diminuant ses importations d’énergies fossiles.

Que représentent-elles aujourd’hui dans le mix énergétique ? Et à l’avenir ?

En 2018, la part des énergies renouvelables a représenté près de 17 % de notre consommation finale d’énergie. L’objectif de la Loi de Transition énergétique, adoptée en 2015, est d’atteindre 32 % en 2030. Actuellement, la chaleur renouvelable représente près de 19 % de notre consommation. L’objectif est de la porter à 38 %. L’électricité renouvelable devra quasiment doubler pour représenter 40 % de notre mix électrique. La part du gaz renouvelable, dont le développement a débuté récemment, devra atteindre 10 % de notre consommation de gaz et celle des biocarburants 15 % contre 9 % actuellement.

Le projet de loi énergie et la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) entendent accentuer le développement des énergies renouvelables. Etes-vous satisfaits de ce qui s’annonce ?

Pour ce qui concerne l’électricité, le projet de PPE prend acte de la compétitivité des filières. Il porte des ambitions à la hauteur des enjeux pour l’éolien terrestre et le solaire photovoltaïque - multiplier par 2,5 la puissance du parc éolien et de 5 à 6 celle du parc solaire photovoltaïque – et fixe des objectifs satisfaisants pour l’hydroélectricité, notamment en programmant des appels d’offres pour la petite hydroélectricité. Néanmoins, nous regrettons que la PPE ne fixe pas d’objectifs plus clairs pour favoriser la flexibilité du parc hydraulique. Pour l’éolien en mer, nous jugeons les volumes proposés insuffisants et déplorons l’irrégularité du lancement des appels d’offres et une absence de logique industrielle. Nous l’avons dit et le rappelons : nous souhaitons des volumes plus ambitieux pour l’éolien marin posé et flottant avec un minimum de 1000 MW attribués annuellement. Toujours pour l’électricité, nous demandons des perspectives pour trois filières qui n’en disposent plus dans le projet de PPE : le bois énergie, l’hydrolien et la géothermie profonde.

Dans le domaine de la chaleur, nous nous réjouissons que le projet prenne acte du rôle central de ce secteur, qui représente près de 50 % de notre consommation d’énergie, dans la transition énergétique et de l’introduction d’une trajectoire d’évolution du Fonds chaleur, qui reste cependant conditionnée à l’évolution de la contribution climat-énergie. Nous sommes également satisfaits des objectifs fixés au chauffage au bois domestique et serons attentifs à la réforme annoncée du CITE, un moyen particulièrement efficace pour accompagner la pénétration de la chaleur renouvelable dans les logements des particuliers.

Pour ce qui concerne le gaz renouvelable, nous regrettons la révision à la baisse des objectifs de la loi de transition énergétique et la décision de conditionner le développement de la filière à une baisse des coûts trop brutale. Nous demandons que l’objectif de 10 % en 2030 soit réaffirmé et que les appels d’offres soient limités à certaines catégories de projets.

Les EnR sont parfois pointées du doigt. Les critiques concernent le coût, leur efficacité, la dénaturation des paysages, la question du démantèlement… Entendez-vous les remarques et que répondez-vous ?

Le coût des énergies renouvelables a diminué de manière spectaculaire. Ainsi, en dix ans, le coût du solaire photovoltaïque a été divisé par 10, passant de 600 e à 55 e en moyenne par MWh. Le coût du MWh éolien terrestre s’élève à 65 e dans un contexte de prix du marché de l’électricité à 45 e. Le niveau de soutien public apporté à ces filières est donc en très forte diminution et sera, à court terme, proche de zéro.

Pour ce qui concerne la chaleur collective industrielle et tertiaire, nous pouvons faire le calcul suivant : entre 2009 et 2017, 4813 opérations d’investissement ont été aidées par le Fonds Chaleur pour un montant de 1,99 Mde, ce qui a permis de générer 6,67 Mdse d’investissement. En considérant un prix du baril de pétrole de 50 $, l’économie nationale associée à la réduction des importations d’énergies fossiles correspond à environ 875 millions d’euros par an. Pour une mise initiale de l’État de 1,99 Mde, le retour sur investissement se fait donc en 2,3 ans seulement.

Concernant l’efficacité des énergies renouvelables, elles ont en très grande partie permis de remplacer la fermeture des 13 GW de centrales fioul et charbon amorcée depuis 2012 sans que nous augmentions nos émissions de gaz à effet de serre. Quant aux critiques à propos de la dénaturation des paysages, elles sont portées par une minorité de personnes. La majorité des Français est par exemple favorable au développement de l’éolien et une étude réalisée par BVA, il y a près de deux ans, conclut que les riverains d’un parc y sont également favorables.

Pour ce qui est du démantèlement, les acteurs de la filière photovoltaïque se sont dotés d’une filière de recyclage très efficace, PVCycle, qui recycle l’ensemble des panneaux utilisés en France. Pour l’éolien, le démantèlement des premiers parcs débute seulement ; plus de 97 % de la masse d’une éolienne est aujourd’hui réutilisée et recyclée. Les entreprises spécialisées dans la gestion des déchets et dans le recyclage travaillent à des solutions qui permettront de valoriser l’ensemble des composants d’une éolienne et ainsi de créer de nouvelles opportunités économiques et industrielles. 


En savoir plus : www.enr.fr

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