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“La philosophie principale de cette loi consiste à donner du pouvoir à tous les acteurs de l’entreprise et à encourager les comportements vertueux”

Loi PACTE : Entretien avec Roland Lescure, Député (LREM, Français d’Amérique du nord), Président de la Commission des Affaires économiques

Les travaux de la commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi ont commencé début juillet et le débat parlementaire s’ouvre. Que retenez-vous des auditions menées par la commission et quel est l’état d’esprit de la majorité ?

Je suis fier de faire partie de cette équipe de rapporteurs sous la présidence d’Olivia Grégoire. Chacun a mené un travail impressionnant dans un délai limité. Les auditions ont été conduites avec exigence pour compléter le travail initié par le Gouvernement depuis l’automne 2017. L’objectif de cette loi selon moi c’est de redéfinir les missions et le rôle de chaque acteur qui participe à l’entreprise moderne dont les principaux sont les entrepreneurs et les salariés mais aussi les actionnaires ; le rôle de l’État et de tous les acteurs qui interagissent quotidiennement avec les entreprises ainsi que, plus largement, celui de tous les consommateurs. Les auditions ont permis de recueillir de façon exhaustive l’avis de tous les acteurs concernés : syndicats, représentants d’intérêts, associations… certaines auditions ont confirmé les arbitrages pris par le gouvernement, d’autres ont au contraire permis d’affiner les positions. Aussi, certains sujets nouveaux ont pu être abordés et seront ajoutés au projet de loi.

Si les observateurs s’accordent à dire que la loi PACTE va dans le bon sens avec un allègement des contraintes pesant sur les entreprises, beaucoup soulignent néanmoins que l’ambition et les mesures concrètes restent trop timides. Pensez-vous que les députés demanderont à aller plus loin ?

En tant que rapporteur général du PJL PACTE, je suis particulièrement attaché à l’équilibre général du texte : lorsque j’entends que certains députés d’opposition nous accusent de ne pas aller assez loin sur la simplification des seuils et que certains députés d’autres bancs nous reprochent de saccager les réglementations accumulées depuis des dizaines d’années, je me dis que nous avons au contraire trouvé le bon équilibre et que ce texte sauvegarde l’intérêt de tous les acteurs qui font l’entreprise.

Au final, PACTE simplifie largement les démarches des entrepreneurs et leur fait faire des économies, PACTE donne plus de pouvoirs aux salariés dans la gouvernance de l’entreprise, PACTE facilite concrètement un meilleur partage de la valeur dans l’entreprise, PACTE redéfinit le rôle de l’Etat dans l’économie et son rapport à l’entreprise, PACTE donne les moyens concrets de mieux financer les entreprises avec du capital de long terme…

Les députés de la majorité ont bien entendu l’intention de jouer pleinement leur rôle et de pousser le texte encore plus loin. D’abord, en approfondissant certaines dispositions dans le projet de loi sur les seuils, le rebond ou la transmission, l’épargne retraite ou la présence des administrateurs-salariés dans les conseils d’administration. Mais nous allons aussi ajouter de nouvelles mesures qui complèteront parfaitement le texte existant. Je pense à l’entreprise à mission ou encore aux fondations actionnaires.

Les mesures de la loi concernant l’objet social des Entreprises n’apparaissent-elles pas comme des concessions accordées à « l’aile gauche de la majorité », sans véritable impacte sur la croissance ?

La philosophie principale de cette loi consiste à donner du pouvoir à tous les acteurs de l’entreprise et d’encourager les comportements vertueux. Pas de contraindre davantage.

Nous faisons le pari de la confiance plutôt que de l’autorité. C’est ainsi que l’on responsabilisera les entreprises de façon à ce qu’elles progressent sur le plan social et environnemental. L’objet social, la raison d’être, l’entreprise à mission, toutes les propositions émanant notamment du rapport de Jean Dominique Sénard et Nicole Notat ne sont pas des gadgets sans portée normative ; on touche même au graal du code civil ! Elles donnent de nouveaux outils pour encourager la pérennité et le développement des entreprises, dans l’intérêt de tous.

La clef de la croissance dans notre économie n’est-elle pas dans la baisse significative des dépenses publiques qui seule autorise une baisse des impôts qui pèsent sur les entreprises ?

Nous avons déjà significativement baissé les impôts sur les entreprises l’année dernière. Nous poursuivons aussi la politique de baisse des charges sociales pour que les entreprises retrouvent davantage de marges de manœuvre.

Mais la politique fiscale ne peut pas être le seul levier pour faire croître et développer les entreprises. PACTE ouvre de nouveaux fronts en améliorant la vie de l’entreprise, la vie dans l’entreprise et l’entreprise dans la vie. 

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