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“La France est clairement le pays le plus menacé”

Auditionné une nouvelle fois par la Commission de la Défense de l’Assemblée nationale, le patron de la DGSI, Patrick Calvar est connu « pour son franc-parler et son réalisme ». Un ton direct qui lui permet d’asséner quelques mises en garde.

“La question relative à la menace terroriste n’est pas de savoir « si » mais « quand » et « où » lance sans prendre de gants Patrick Calvar. « Le patron de la DGSI n’est pas là pour dire que ça va mieux ». Il est là pour dire la vérité. Une vérité crue, dérangeante et inquiétante. « La France est aujourd’hui, clairement, le pays le plus menacé » énonce-t-il froidement, « la menace est très forte » en France mais également hors de nos frontières. Notre pays est d’abord menacé par Daech qui « planifie de nouvelles attaques ». Alors que l’organisation terroriste subit des revers sur le terrain militaire en Syrie et en Irak, elle a besoin de frapper vite et fort ; Daech veut « faire diversion et se venger des frappes de la coalition ». Précis, Patrick Calvar prévient que « nous risquons d’être confrontés à une nouvelle forme d’attaque » : une campagne terroriste caractérisée par le dépôt d’engins explosifs « dans des lieux où est rassemblée une foule importante, ce type d’action étant multiplié pour créer un climat de panique ». Sans les citer nommément, on ne peut évidemment pas s’empêcher de penser aux Fan zones de l’Euro 2016. Sur Daech encore, le patron du renseignement intérieur livre quelques chiffres, les siens, « qui ne reflètent pas forcément la réalité, parce qu’il y a toujours un chiffre noir que nous ne connaissons pas ». Pas moins de 645 ressortissants français ou résidents en France sont présents dans la zone syro-irakienne. Parmi eux 245 femmes qui ne participent pas aux combats et 20 mineurs qui, , au contraire s’y livrent. « Ils sont donc moins de 400 à participer à des opérations militaires ». Par ailleurs, 200 individus sont en transit, soit à destination de la Syrie, soit de retour de Syrie vers la France. Et 171 Français, probablement plus, sont présumés morts. Enfin, ajoute-t-il « 848 personnes manifestent l’intention de se rendre sur place » même s’il constate « une stagnation des départs » en raison des difficultés pour se rendre dans la zone.

La deuxième organisation qui nous menace est Al-Qaïda, présente au Sahel et en Afrique et qui « n’exclut pas d’exporter la violence ». Parce qu’elle a pratiquement disparu de la scène islamiste, Al-Qaïda a besoin de « redorer son blason » et de tenter « à un moment ou à un autre une action d’envergure » pour recruter à nouveau. « Certains groupes au sein d’Al-Qaïda sont préparés pour des actions extérieures planifiées à long terme » affirme le DGSI.

Patrick Calvar met aussi en garde contre « les appels lancés depuis la Syrie par des gens à certains de leurs amis qui se trouvent sur un autre territoire afin qu’ils y commentent des actions ». « Nous sommes également confrontés, ajoute le DGSI, à la présence d’islamistes sur notre territoire et qui ne sont liés à aucune organisation » et « aux velléitaires, à savoir ceux qui auraient bien aimé partir pour la Syrie et qui, pour diverses raisons n’ont pu le faire ». Aucune des menaces n’étant évidemment à sous-estimer.

Plus curieusement, le patron de la DGSI a tenu à évoquer un autre « grand danger » qui menace l’Europe : « les extrémismes » [comprendre de droite, Ndlr) qui « montent partout ». Une situation qui contraint les services intérieurs « à déplacer des ressources pour s’intéresser à l’ultra-droite qui n’attend que la confrontation ». Confrontation qui, selon le policier « va avoir lieu ». « Encore un ou deux attentats et elle adviendra. Il nous convient donc d’anticiper et de bloquer tous ces groupes qui voudraient à un moment ou à un autre, déclencher des affrontements intracommunautaires » insiste un Patrick Calvar, plus politique.

Derniers chiffres livrés par le patron du renseignement intérieur, ceux concernant le bilan de la DGSI sur l’aspect judiciaire. La DGSI, indique-t-il traite 261 dossiers concernant plus de 1000 individus et a pratiqué plus de 250 interpellations. Et d’ajouter que « chaque semaine, nous interpellons des pesonnes ». « Plus de 250 sont mises en examen, plus de 170 ont été écrouées et plus de 50 placées sous contrôle judiciaire ». Enfin, « depuis août 2013, mon service a bloqué 15 projets terroristes en France » conclut Patrick Calvar. 

 

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