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Les Autorités administratives indépendantes, objets d'une future loi ?

Une initiative législative sénatoriale traduit les recommandations de la Commission d'enquête relative aux Autorités administratives indépendantes.

Dans son rapport paru en octobre dernier, la Commission d'enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l'organisation, de l'activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes avait constaté « l'existence, dans tous les domaines, d'une quarantaine d'autorités administratives indépendantes – d'importance inégale –, faisant peser un risque d'éclatement de l'action de l'État et d'illisibilité des institutions ». La Commission d'enquête avait également appelé à un meilleur contrôle parlementaire de l'action de ces autorités « pour éviter un transfert de responsabilité sans contrôle démocratique ». Sur la base de ces travaux, Marie-Hélène Des Esgaulx, présidente de la Commission d'enquête, Jean-Léonce Dupont, vice-président et Jacques Mézard, rapporteur ont déposé le 7 décembre dernier une proposition de loi et une proposition de loi organique qui reprennent les onze recommandations formulées par la commission d'enquête. « Ces deux textes ont vocation à fixer le statut général des autorités administratives indépendantes (AAI) et des autorités publiques indépendantes (API). La compétence exclusive du législateur serait affirmée : la création d'une AAI ou d'une API, la fixation de sa composition et de ses attributions ainsi que de ses principes d'organisation et de fonctionnement relèveraient uniquement de la loi » expliquent-ils. Le but est avant tout de rationaliser le paysage de ces autorités. La qualité d'AAI ou d'API ne serait maintenue que pour une vingtaine d'entre elles, les autres relevant de l'administration traditionnelle. « Cette sélection constitue une première étape, avant d'envisager, au terme d'une seconde réflexion, des fusions, dont certaines sont déjà évoquées dans le débat public » ajoute le rapporteur. Il s'agit ensuite d'harmoniser les règles communes qui leur sont applicables. Se concentrant sur leur organisation et leur fonctionnement, ces textes ne modifient pas les règles relatives aux compétences ou aux pouvoirs de ces autorités. D'une part, les membres disposeraient d'un statut contribuant à asseoir leur indépendance fonctionnelle. Les membres exerceraient ainsi un mandat d'une durée de six ans, « en principe non révocable mais non renouvelable ».

Un contrôle parlementaire renforcé

Pour assurer la continuité, les membres seraient remplacés au gré de renouvellements partiels et échelonnés dans le temps. « Un membre ne pourrait exercer concomitamment qu'un seul mandat au sein d'une AAI ou API, à l'exclusion de toutes autres fonctions, même administratives, au sein d'une de ces autorités » apprend-t-on à la lecture de l'exposé des motifs. Les membres d'une AAI et d'une API seraient soumis à un devoir de réserve, à des incompatibilités professionnelles (notamment avec des fonctions juridictionnelles). Les présidents devraient également se consacrer à temps plein à leur mission. Il y aurait aussi une consultation par les pairs des déclarations d'intérêts.

Les textes prévoient encore des règles de déport et d'abstention en cas de conflit d'intérêts, un contrôle par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique des reconversions professionnelles à l'issue du mandat. Dans le prolongement, chaque collège fixerait les règles déontologiques qui s'imposent aux agents, collaborateurs ou experts auxquels il est recouru. D'autre part, la loi fixerait les principes d'organisation et de fonctionnement des AAI et des API, les autres règles étant renvoyées au règlement intérieur de ces autorités, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État. « Seraient ainsi consacrées au niveau de la loi les garanties d'indépendance de ces autorités, notamment l'autonomie budgétaire et la liberté de recrutement » se félicitent les auteurs des textes. Enfin, les modalités du contrôle parlementaire des AAI et des API seraient précisées et complétées pour rendre effectifs les mécanismes de ce contrôle démocratique. Un rapport annuel d'activité serait déposé, chaque année, avant le 1er juin, par chaque AAI ou API dans la perspective de l'organisation d'un débat en séance publique à l'Assemblée nationale ou au Sénat sur l'activité et la gestion de l'une ou plusieurs d'entre elles. Cet exercice n'exclurait pas le contrôle des commissions parlementaires, consacré notamment à travers l'audition régulière de ces AAI et API. De même, la nomination de chaque président d'AAI ou API serait soumise au Parlement à travers l'audition et le vote préalables des commissions permanentes compétentes. L'information financière des assemblées serait également renforcée avec un document budgétaire annuel (un « jaune ») consolidant et analysant les données financières de ces autorités, aujourd'hui dispersées ou lacunaires. Ces textes devraient être inscrits à l'ordre du jour du Sénat début 2016. 

 

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