Print this page

Le retour de la réserve parlementaire ?

Plus de 300 parlementaires se sont prononcés en faveur du retour de la réserve parlementaire, supprimée en 2017 par la majorité présidentielle. Le Sénat a adopté mi-décembre, la proposition de loi du sénateur centriste Hervé Maurey, visant à rétablir cette enveloppe budgétaire.

Fin octobre, 300 parlementaires de tous horizons politiques ont adressé un courrier à Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale, et à Gérard Larcher, le président du Sénat réclamant le retour de la réserve parlementaire, mesure supprimée en 2017 par la majorité présidentielle qui répondait alors à une promesse de campagne du candidat Macron. « Les parlementaires sont des décideurs nationaux de proximité, ils ont une connaissance fine des besoins de leurs territoires. Nous voulons rétablir ce financement de proximité tout en corrigeant les défauts de l’ancienne version : le manque de transparence qui a nourri un soupçon de clientélisme » expliquaient-ils notamment dans cette lettre ouverte. Dans les deux chambres ont alors été déposées des propositions de loi allant de ce sens comme celle du sénateur Hervé Maurey (UC, Eure) qui a d’ailleurs été votée par le Sénat mi-décembre par 226 voix contre 42.

Pour Hervé Maurey, la suppression de la réserve parlementaire « a été particulièrement préjudiciable aux communes et aux associations ». « On a beaucoup fantasmé sur cette réserve parlementaire et elle fut supprimée sur la base de ces fantasmes. Or, elle a un intérêt réel, celui d’apporter un complément utile, surtout vers des petits projets non-éligibles aux subventions en raison de leurs montants trop bas » justifie-t-il. D’autant plus que, contrairement à ce qui avait été annoncé par le gouvernement aucune compensation n’est venue remplacer cette dotation.

Les parlementaires favorables au retour de la réserve parlementaire restent bien conscients des critiques de clientélisme qui ont pu être faites. Pour ne plus prêter le flanc et répondre aux possibles dérives, ils proposent justement un certain nombre de garde-fous. D’abord envisagé pour les seules communes de moins de 3500 habitants, il a finalement été décidé de l’élargir à l’ensemble du bloc communal. Le texte limite également le montant de la subvention qui ne pourra pas non plus dépasser la moitié du coût du projet, ni la somme de 20 000 euros. Avec ces mesures ce sera « beaucoup plus encadré et codifié » se félicite le rapporteur du texte le sénateur Vincent Capo-Canellas (UC, Seine-Saint-Denis)

La réserve parlementaire, cette enveloppe budgétaire laissée à la discrétion du parlementaire permettait de financer des projets locaux et associations de la circonscription. Très largement décriée pour son aspect clientéliste et son opacité, elle avait été supprimée en 2017 par la majorité présidentielle qui entendait alors mettre fin aux pratiques de « l’ancien monde ». Avant sa disparition, la réserva parlementaire coûtait aux finances publiques près de 80 millions d’euros pour l’Assemblée nationale et près de 50 millions d’euros pour le Sénat. Le montant moyen par parlementaire s’élevait à 130 000 euros. La répartition entre chaque groupe politique était faite par les commissions des finances de chacune des deux assemblées. Chacun des groupes redistribuait ensuite à ses membres de façon discrétionnaire. Tout le monde n’avait pas le droit à la même somme. Certains pouvaient ne rien toucher. A l’Assemblée, un président de commission pouvait percevoir jusqu’à 260 000 euros et le président de l’Assemblée jusqu’à 520 000 euros. En 2013, sur 348 sénateurs, une soixantaine seulement s’était vue répartir près de la moitié de la réserve parlementaire de la Chambre haute. « Fut une époque où il fallait aller baiser la babouche du président de la commission des finances pour obtenir quelque chose, mais la répartition était devenue plus égalitaire les dernières années » raconte un élu à nos confrères de Public Sénat.

Si le texte a été largement adopté au Sénat, à l’Assemblée, il sera plus difficile d’en débattre sans doute. Sa présidente Yaël Braun-Pivet a toujours dit qu’elle y était hostile, comme une grande partie du camp présidentiel. « Je pense que c’est très sain de ne pas permettre aux parlementaires de donner des subventions de façon totalement discrétionnaire sur un territoire quel qu’il soit. Ne regardons pas sans cesse dans le rétroviseur en se disant c’était mieux avant » avait-elle alors déclaré à l’Association des journalistes parlementaires à l’automne dernier. 


Frais de mandat, une hausse en réponse à l’inflation
Après le vote à l’unanimité des groupes présents, à l’exception de La France insoumise qui s’est abstenue, le Bureau de l’Assemblée nationale a décidé d’augmenter les frais de mandat des députés d’un peu plus de 300 euros par mois, la portant à 5 950 euros. Interrogée sur le sujet, la présidente de l’Assemblée nationale a très rapidement voulu éteindre une polémique inutile selon elle. « Il ne s’agit pas d’une hausse de la rémunération des parlementaires mais d’une hausse du plafond de nos frais qui nous permet d’exercer notre mandat pleinement et de répondre aux attentes de nos concitoyens » a ainsi martelé Yaël Braun-Pivet précisant que « l’argent provient évidemment de nos réserves, nous ne le finançons pas par une augmentation de la dotation ». Pour autant la polémique a eu du mal à s’éteindre dans un contexte difficile pour beaucoup de nos compatriotes qui ont du mal à comprendre.
Une polémique qui n’a pas empêché, les sénateurs de s’octroyer à leur tour une hausse de leurs frais de mandat de 700 euros par mois. L’enveloppe destinée aux frais de mandat passe de 5 900 euros à 6 600 euros mensuels. Mais ce n’est pas tout, la chambre haute du Parlement a également acté une hausse de 300 euros pour l’hébergement parisien des sénateurs, soit 1500 euros par mois.
Pour le Bureau du sénat, cette hausse est là « pour tenir compte des conséquences du contexte inflationniste ».
Ces frais sont destinés à payer les locaux des permanences parlementaires mais aussi les frais de déplacements, de représentation… Ils sont scrupuleusement surveillés par le déontologue à l’assemblée et le comité de déontologie au sénat et doivent faire l’objet de justificatifs.

461 K2_VIEWS