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Remettre à niveau nos stocks de munitions

Dans le rapport de leur mission flash, Vincent Bru (Dem, Pyrénées-Atlantiques) et Julien Rancoule (RN, Aude) jugent nos stocks de munitions « préoccupants ». Ils font plusieurs propositions pour remettre à niveau ces stocks et permettre à nos armées de répondre à un conflit de haute intensité.

Un constat. En Ukraine, la guerre « consomme une énorme quantité de munitions et épuise les stock alliés » rappelait début février le secrétaire général de l’OTAN, Jen Stoltenberg qui ajoutait que ce niveau de dépense en munitions était « bien supérieur à notre capacité de production ». Cette question des stocks de munitions et de production a donc naturellement fait l’objet de discussions entre les ministres de la défense occidentaux réunis à Bruxelles au même moment.

Mais ce constat est aussi vrai pour nos armées dont le stock de munitions a de quoi susciter quelques inquiétudes. « La réduction drastique du format des armées et l’adoption d’un modèle d’excellence échantillonnaire ont fait des munitions une variable d’ajustement budgétaire. Ce changement de paradigme a davantage favorisé le flux que le stock » a d’abord expliqué Vincent Bru (Dem, Pyrénées-Atlantiques) avant de reconnaître qu’il y a depuis peu « une prise de conscience de refaire les stocks » notamment avec la LPM 2019-2025. Pour autant, cela suffit-il au regard de ce qui se passe à l’est de l’Europe et des menaces qui peuvent peser sur d’autres théâtres d’opérations extérieures ? Sans doute pas. « La France doit entrer dans une réflexion plus fine sur l’économie de guerre en général comme l’a dit le Chef de l’Etat en juin dernier, mais aussi sur l’industrie française de production de munitions et la politique que veut la France en matière de stock de munitions ».

Au nombre des propositions et suggestions du rapport, en matière de stock de munitions, il importe de trouver « un équilibre, un panachage entre un stock de masse et la technologie » défend le rapporteur Bru. Face à un risque de conflit de haute intensité, « nous avons besoin de munitions extrêmement performantes technologiquement mais nous avons aussi besoin de munitions dans un spectre moins haut ». Pour autant, « cela ne sert à rien de faire des stocks immenses. Il faut des stocks de manière panachée pour répondre aux enjeux et aux menaces. Il faut des stocks pour prévoir les flux » insiste-t-il.

La proposition de réserve opérationnelle

L’économie de guerre c’est aussi trouver du personnel pour répondre à la demande de production (produire plus vite et en plus grande quantité). On peut augmenter le travail des salariés des entreprises de défense ; pour les entreprises duales, il y a la possibilité d’affecter du personnel civil à des opérations militaires ; il y a également la réserve industrielle qui peut être envisagée avec le rappel de salariés à la retraite, « et puis il y a une réserve opérationnelle » suggère Vincent Bru « qui ne doit pas uniquement servir à être déployée sur les théâtres d’opérations extérieures ». Comme le chef de l’Etat l’a déclaré lors de ses vœux aux armées, « il faut élargir le champ de compétences de la réserve militaire ». « On en parle dans le cyber. On pourrait alors très bien imaginer qu’une réserve militaire soit affectée au secteur industriel en cas de conflit pour augmenter la production munitionnaire dont nous aurions besoin » propose Vincent Bru.

Le petit calibre

Si sur l’ensemble du rapport, les deux rapporteurs parlent d’une même voix, un petit point de désaccord s’est toutefois fait jour sur le petit calibre. Julien Rancoule (RN, Aude) s’est dit favorable au projet du ministère de l’Intérieur de créer sur le territoire national une filière pour le 9 mm en réhabilitant d’anciennes usines. « La France est aujourd’hui le seul membre permanent du Conseil de sécurité à ne pas avoir sa propre filière nationale » a-t-il opportunément rappelé. Sauf que pour l’instant, ce projet « n’est qu’un projet » a répondu Vincent Bru et qu’il ne concerne que le 9 mm, un calibre qui ne sert qu’au ministère de l’intérieur et aux forces voisines (Justice, Bercy). « Si le projet existe, ira-t-on jusqu’à des munitions qui intéressent l’armée ? Il n’y a sur cette question aucune garantie » pointe-t-il dubitatif et penchant plutôt pour une collaboration avec la Belgique qui a fait des offres de partenariat sur le 5.56. Un bémol qui n’inquiète pas outre-mesure le député RN qui estime qu’il faut avancer par petits pas : « Relancer une production de 9 mm pourrait permettre de produire ensuite en interne d’autres calibres comme le 5.56 ou le 12.7. On a tout intérêt à retrouver ces compétences en France ». « Privilégions le marché franco-français. Il y va de notre souveraineté nationale » a conclu Julien Rancoule sans vraiment convaincre son collègue. 

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