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Le plastique premier polluant des océans

Le rapport de Ramlati Ali (LREM, Mayotte) et de Nicolas Dupont-Aignan (NI, Essonne) de la Commission des Affaires étrangères dresse un bilan sans appel de la pollution des mers. Au-delà des pollutions connues comme le plastique ou les résidus chimiques s’ajoutent d’autres plus « récentes et moins visibles » qui représentent toutes, écrivent-ils, de « grosses menaces pour la biodiversité de nos océans ». Pour tenter de circonscrire le risque et de répondre à l’urgence sanitaire et environnementale, les rapporteurs font 43 propositions.

“Le diagnostic est plus qu’alarmant ; bien plus que nous ne l’imaginions avant de rendre notre rapport” énoncent les co-rapporteurs. « Sur le plastique, la situation est même apocalyptique » ajoute Nicolas Dupont-Aignan. Des propos que l’on pourrait croire un tantinet exagérés mais qui ne le sont pas lorsque l’on sait qu’on évalue à 9,5 millions de tonnes la quantité de déchets plastiques déversés dans les océans chaque année. Les océans en contiendraient actuellement au moins 150 millions de tonnes. « Si rien n’est fait, on estime qu’il y aura plus de plastiques que de poissons dans les océans en 2050 » soupire Ramlati Ali.

Mais le plastique n’est pas la seule pollution qui menace les océans prennent soin d’ajouter les deux élus. Selon eux, des pollutions « plus récentes et non moins dangereuses – bruits sous-marins, émissions de gaz à effet de serre, impacts des activités minières, pétrolières et gazières fragilisent encore davantage le milieu marin ».

Aussi face à ce sombre constat et aux défis colossaux à relever - « Sur la pollution maritime, on a plus de 20 ans de retard » tacle Nicolas Dupont-Aignan -, les co-rapporteurs font dans leur rapport qu’ils décrivent comme « pragmatique » 43 propositions qui s’articulent autour de quatre axes principaux.

Inscrire le ministère de la mer dans la durée

Le premier vise à faire de la France, grande nation maritime présente sur presque tous les océans, une nation exemplaire en la matière. Pour cela, ils souhaitent notamment inscrire le ministère de la mer « dans la durée ». Aujourd’hui « embryonnaire » - il a été créé en juillet 2020 -, ce ministère dirigé par « une ministre de grande qualité (Annick Girardin) mais démunie » nécessite « plus de moyens ». Ce ministère doit être repensé et « doit coiffer tous les sujets liés à la mer ». Or, commente Nicolas Dupont-Aignan, Annick Girardin n’a même pas autorité sur le Secrétariat général à la mer qui est placé sous l’autorité du Premier ministre et n’a aujourd’hui d’autorité que sur une seule direction (la Direction des affaires maritimes) et une autorité conjointe avec le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation sur la direction des pêches maritimes et de l’aquaculture. « Il y a là un vrai problème organisationnel » s’agace le député de l’Essonne. Aussi, pour ne pas faire du ministère de la mer, une énième structure et pour qu’il ne soit pas « qu’un feu de paille et qu’il perdure après les élections », les co-rapporteurs souhaitent lui donner « les moyens d’exercer ses missions en repensant et en construisant une véritable administration de la mer ». Et pour réussir à mettre en œuvre une politique de la mer globale et cohérente, les élus veulent donner à l’Etat les moyens d’exercer ses missions de contrôle et d’intervention (moyens navals, de surveillance et d’intervention dans les eaux sous juridiction française).

Agir en France, en Europe et dans le monde

Le deuxième axe concerne l’Europe. Aux yeux des deux élus, il faut sans attendre, placer l’océan au cœur du Pacte vert (European Green Deal). « Trois types d’initiatives doivent être particulièrement soutenues par la France, soulignent-ils, celle tendant à restreindre les microplastiques, celle visant à décarboner le transport maritime et celle ayant pour objet le renforcement des sanctions applicables aux navires responsables de pollutions ».

Les rapporteurs font une série de propositions visant à compléter, à l’international, les instruments juridiques et à les faire appliquer (troisième axe). Ainsi et en dépit des progrès réalisés, les risques environnementaux liés au transport maritime n’ont pas disparu. Parmi les propositions, l’une d’entre elles invite notamment à un renforcement de la réglementation de l’OMI tendant à lutter contre la perte des conteneurs en mer. Une autre propose de finaliser la réglementation de l’OMI visant à lutter contre la pollution sonore en milieu marin. Enfin, pour les co-rapporteurs, il importe de finaliser le traité sur la haute mer aujourd’hui en discussion à New-York dans le cadre de l’ONU.

La mer la plus polluée au monde

Le rapport fait enfin un focus détaillé de la situation de « la mer la plus polluée au monde », la Méditerranée (quatrième axe) qui « connaît beaucoup de plans de sauvetage, sans qu’on ait pour autant de vrais bilans ». Or, ici aussi, les chiffres sont accablants. D’après un rapport de l’UICN du 27 octobre 2020, environ 229 000 tonnes de déchets plastiques sont déversées chaque année en Méditerranée, principalement à cause d’une mauvaise gestion des déchets. En 2018, un rapport WWF sur la pollution plastique en Méditerranée montrait que les 200 millions de touristes accueillis chaque année entraînaient une augmentation du niveau de pollution marin de 40 % chaque été. La méditerranée est par ailleurs le débouché de grands fleuves passant par des centres urbains (Nil, Rhône, Tibre, Ebre, etc.) et une zone de trafic maritime intense (20 % du trafic mondial). « L’accumulation de ces facteurs de risques fait de la Méditerranée une région particulièrement exposée aux ravages de la pollution marine » expliquent les députés qui recommandent notamment « la mise en œuvre d’un vaste « plan Marshall » de construction de stations d’épuration sur le pourtour méditerranéen ».

« Il appartient à la France, pays maritime, de donner l’exemple et de se tenir en première ligne dans la lutte contre les pollutions marines » concluent les rapporteurs qui estiment cependant que pour résoudre les grands défis liés à cette pollution marine, cela ne peut se faire qu’à l’échelle internationale « et la France doit justement être le moteur de cette coopération »

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