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Bien comprendre, encourager et mieux encadrer l'essor de la robotique

Par Renaud Champion, Directeur euRobotics, représentant du groupe Syrobo du Symop

La robotique a grandement évolué au cours de ces 25 dernières années, tant du point de vue technologique que du point de vue applicatif. Au cours de la décennie à venir, ce développement va considérablement s’accélérer. La robotique avancée va passer du statut d’innovation technologique de niche, à celui de bien courant et grand public, tant dans les domaines professionnels que personnels. Cet essor va avoir des implications socio-économiques majeures à travers le monde. Il faut donc bien le comprendre, l’encourager et au mieux l’encadrer afin qu’il bénéficie à tous.

Impact économique

De nombreuses estimations circulent aujourd’hui sur ce point. Entre la Commission Européenne qui estime le marché de la robotique à e15,5 milliards et McKinsey qui pense que l’impact économique global de la robotique avancée sera de $4,5 trillions d’ici 2025, les estimations diffèrent grandement. Cependant elles témoignent toutes d’un potentiel d’une magnitude impressionnante. La question qui se pose alors est : comment la France peut-elle en tirer avantage ? Cela dépendra avant tout de nos laboratoires de recherche qui génèrent depuis longtemps des technologies de qualité mais aussi de l’engagement de nos entrepreneurs afin de transférer cette recherche sur le marché. Le cadre législatif a clairement un rôle à jouer en tant qu’accélérateur et facilitateur de ce transfert. Cela peut passer par l’optimisation de mécanismes déjà en place (CIR, JEI, stimulation de la recherche appliquée) ou la création de nouvelles actions (implication accrue des industriels à travers des challenges ou le rachat de start-up). Attention toutefois de ne pas légiférer trop tôt au risque de casser l’innovation.

Impact juridique

Les différents travaux de recherche sur les questions juridiques soulevées par la robotique font référence à 3 enjeux principaux : la responsabilité, la sécurité et les données personnelles. Des cadres juridiques bien définis encadrent déjà ces notions mais une évolution, parfois légère, semble souhaitable. Au sujet de la chaîne de responsabilité, il semble nécessaire d’introduire une notion de proportionnalité entre les différents acteurs que sont l’utilisateur, le vendeur, le concepteur et l’intégrateur. A propos de la sécurité la question se pose dès lors que le robot sort de sa cage pour collaborer avec l’homme. Ici un comité de certification indépendant accordant des autorisations de mise sur le marché est une possibilité à prendre en compte. Concernant les données personnelles, de nombreux travaux ont déjà été entrepris avec la CNIL, mais est-ce suffisant si l’on considère le véhicule autonome qui peut acquérir à la volée des informations sur chaque piéton. Faut-il légiférer en amont sur ce point quitte à favoriser la libre circulation des données acquises et exploitées par les robots dans le cadre d’un grand « Marché unique du numérique » au niveau Européen ?

De manière sous-jacente il est ici question d’Intelligence Artificielle. Pour certains auteurs, les évolutions de l’IA appliquée aux robots, au-delà de leur conférer plus d’autonomie, pourraient aussi amener le juriste à définir un nouveau statut juridique particulier. Il n’est pas forcément question de faire du robot un sujet du droit mais plutôt lui donner un statut intermédiaire sur le modèle du droit des sociétés.

Impact social

La robotique a vocation à créer des produits opérants dans le monde réel afin de résoudre des problèmes concrets en collaboration avec l’homme. En se diffusant utilement dans tous les pans de notre vie, l’impact social de la robotique sera majeur. Le bon accompagnement de l’innovation dans des domaines à fort impact sociétal peut alors non seulement amener de la croissance durable mais aussi positivement redistribuer les cartes du discours social si le changement de paradigme qui en résulte est préparé sereinement et non subi dans la crainte. Au-delà de la possible disparition de certains métiers, c’est la structure même de l’emploi qui doit être repensée. La formation et un cadre éducatif adapté joueront alors un rôle crucial dans cette transition. 

 

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