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Le chemin de croix de la loi Travail

Le projet de loi Travail porté par Myriam El Khomri a connu de multiples rebondissements. Le dernier en date : « la mise en garde » de Pierre Gattaz au Gouvernement.

Après avoir connu plusieurs versions et modifications en fonction des pressions exercées sur le Gouvernement par les syndicats, les organisations de jeunesse et les organisations patronales, le texte arrive enfin devant les députés ce 3 mai. En dépit d’une présentation enthousiaste du projet de loi par le Premier ministre qui parle d’« un texte équilibré, dynamique et en faveur des entreprises, en faveur des entrepreneurs comme en faveur des salariés puisqu’il leur apporte de nouveaux droits et de nouvelles protections », le projet a suscité de vives réactions. Et ce dès la présentation de l’avant-projet en février dernier. Face à la colère qui montait, Manuel Valls choisissait alors de repousser la présentation en Conseil des ministres du 9 au 24 mars pour laisser le temps aux discussions. Sans vraiment convaincre d’ailleurs. Une nouvelle version du texte « retravaillée » était ensuite présentée le 14 mars dernier. Sur la plupart des points jugés litigieux par les syndicats, les organisations de jeunesse et par les frondeurs au sein même de la majorité, le Gouvernement reculait. Pour autant, l’opposition au texte n’était pas totalement éteinte. FO, la CGT, FSU et une poignée de lycéens et étudiants exigeant encore le retrait pur et simple du texte. Courant avril, le texte est arrivé en commission. Le député socialiste de Saône-et-Loire, Christophe Sirugue en est le rapporteur. Après les dernières modifications, le texte ne devrait plus être réellement menacé à l’Assemblée. Mais c’était sans compter la sortie tonitruante de Pierre Gattaz, le « patron des patrons » qui furieux des reculades du Gouvernement sur un texte qu’il jugeait au départ plus favorable aux entreprises a lancé le 18 avril un ultimatum au Gouvernement. Pierre Gattaz a donné « trois semaines » au Gouvernement pour revenir au texte d’origine, sous peine de voir le Medef quitter la table des négociations sur la nouvelle convention de l’Assurance chômage. Pour le « patron des patrons », ce délai devrait permettre au Gouvernement de préparer une série d’amendements sur les sujets qui fâchent comme le mandatement pour les entreprises qui souhaitent négocier des accords mais n’ont pas de délégués syndicaux, le compte personnel d’activité « dévoyé » selon Pierre Gattaz et la surtaxation des CDD annoncée par Manuel Valls mais pas inscrite dans le texte. « Il n’est plus question aujourd’hui de continuer à faire semblant, à négocier dans une logique absurde de donnant-donnant, qui n’amené depuis 30 ans qu’à plus de complexité, de rigidité et de coût pour les entreprises, et plus de chômage durablement élevé pour les concitoyens » a expliqué Pierre Gattaz qui préfère parler de « mise en garde » plutôt que d’ultimatum. Reste qu’au sein même du Medef, tous ne sont pas sur la même longueur d’onde. L’UIMM tient à garder les acquis de ce texte âprement négocié qui sert ses intérêts. Y renoncer brutalement serait pour cette puissante fédération fort dommageable alors qu’elle tient à certains point sud projet de loi comme la clarification des critères de licenciement économique, l’assouplissement du temps de travail ou encore les accords dits « offensifs » pour développer l’emploi. « Quand on discute, quand on négocie, on ne pose pas des ultimatums » a répondu vertement Manuel Valls à Pierre Gattaz, l’appelant à « respecter le Parlement qui s’est saisi de cette loi, l’enrichit, l’amende, est à l’écoute par ailleurs des partenaires sociaux ». Le projet de loi Travail est sans aucun doute l’une des dernières réformes du quinquennat. La procédure d’urgence a été engagée sur ce texte, (une seule lecture par Chambre), avec l’objectif de le faire adopter d’ici la fin de la session parlementaire, en juillet. 

 

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