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Enfin le PNR

Après des années de discussions et de tergiversations, le PNR (Pässenger Name Record) a été adopté, non sans mal, par le Parlement européen.

Il aura fallu cinq années de tractations entre partisans et détracteurs pour que le registre européen des passagers aériens (Passenger Name Record) soit enfin adopté. Or, pour Manuel Valls venu spécialement à Strasbourg à l’avant-veille du vote, « on a assez perdu de temps sur cette question » a-t-il largement expliqué. Si « personne ne soutient que l’existence d’un PNR européen aurait permis d’éviter les attentats à Paris et Bruxelles, admet toutefois le chef du Gouvernement français, nous avons besoin de cet outil pour compléter » le renseignement humain, le travail de la police et la surveillance électronique.

Ce vote favorable du Parlement européen, salué par le Ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, comme « une étape indispensable dans le renforcement de la lutte contre le terrorisme en Europe » est le fruit de longues discussions au sein des instances européennes, durant lesquelles la France a tenu avec constance un rôle moteur décisif, aux côtés d’autres pays, permettant in fine de surmonter les freins à cette avancée. Mais pour obtenir un vote positif, il a fallu revoir à la baisse certains points initiaux du PNR pour aboutir à un nouveau texte plus consensuel « donnant toutes garanties de protection des libertés individuelles » note Bernard Cazeneuve. Car, paradoxalement, le Gouvernement français très en pointe sur le sujet a dû faire face, sur cette question, à son propre camp au Parlement européen. En effet, les eurodéputés socialistes et radicaux qui, disent-ils ont toujours été « favorables à un PNR européen » n’en voulaient pourtant qu’à « deux strictes conditions » : qu’il soit voté en parallèle d’un ensemble de textes favorables à la protection des données et qu’il soit équilibré entre lutte contre le terrorisme et protection de la vie privée. « C’est aujourd’hui chose faite, et nous nous en félicitons » écrit dans un communiqué paru dans la foulée du vote, la délégation socialiste française au Parlement européen.

Faciliter le partage des informations entre services de police et de renseignements européens

« Le PNR sera un outil précieux pour renforcer la sécurité des citoyens européens en facilitant en amont le repérage des mouvements des terroristes djihadistes qui empruntent les transports aériens à la fois à travers l’Europe, mais aussi entre l’Europe et les autres régions du monde, pour les empêcher de passer à l’acte » décrit pourtant Bernard Cazeneuve. Ce PNR européen, inspiré du modèle américain va faciliter le partage des informations entre services de police et de renseignements européens. Les compagnies aériennes vont donc devoir transmettre aux autorités du pays de départ des données personnelles déjà recueillies comme l’identité, le mail, le numéro de passeport, de cartes de crédit, dates et itinéraires du voyage. Mais loin d’être un registre unique, ce PNR européen n’est qu’une passerelle entre PNR nationaux, doublée de restrictions légales. Il n’est pas non plus systématique. Aujourd’hui, plus de la moitié des pays européens est dotée de PNR nationaux, dont la réalité et l’efficacité sont parfois mises en doute. Selon, les informations d’Europe 1, « le PNR français serait loin d’être fonctionnel ». Au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher en janvier 2015, Bernard Cazeneuve avait promis un PNR opérationnel en septembre 2015. Or, toujours selon la radio, « seule une dizaine de compagnies aériennes sur les 200 prévues livrent en temps réel leurs données passagers ».

Les Etats ont deux ans pour le mettre en place

Reste maintenant que ce PNR existe et qu’il va permettre, assure le Ministre de l’Intérieur, « de rehausser notre protection face à une menace terroriste inédite et mouvante ». La France avait toutefois posé deux conditions pour que le PNR européen soit efficace et réellement opérationnel. D’abord une durée de conservation des données suffisante : « c’est chose faite puisqu’elle sera de 5 ans ». Ensuite, l’engagement de tous les Etats membres pour que les vols intraeuropéens et les vols charters soient inclus dans le PNR : « il a été acté en décembre dernier ». « Ces deux conditions étant aujourd’hui remplies et le vote du Parlement européen désormais acquis, le Gouvernement agira avec une détermination totale aux côtés de ses partenaires pour une transposition de la directive en droit interne dans les 28 Etats membres dans les meilleurs délais » poursuit, confiant, Bernard Cazeneuve.

La directive adoptée, les Etats membres ont deux ans pour la mettre en place. Un délai, jugé d’ores-et-déjà trop long par le Commissaire européen Dimitri Avramopoulos, « on ne peut pas attendre deux ans pour le mettre en place, nous n’avons pas de temps à perdre »

 

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