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L’ONU, “le machin” nécessaire !

Par Jacques Myard, Député (LR, Yvelines), Membre de la Commission des Affaires étrangères et de la Commission des Affaires européennes

Il est de bon ton de critiquer l’organisation des Nations unies, en se lamentant sur son inefficacité et son incapacité à résoudre des conflits comme en témoignent, par exemple, le lancinant conflit israélo-palestinien ou celui du Sahara occidental.

Il faut rendre justice au concept d’avant-garde des Nations Unies, nées des décombres de la SDN à la Conférence de San Francisco en avril 1945. La société internationale était alors fort limitée, comptant 72 Etats, et la mondialisation telle que nous la connaissons aujourd’hui était un concept à inventer.

La réalité est que cette organisation universelle, aujourd’hui de 193 Etats, à la Charte très ambitieuse, répond à un besoin, celui de pouvoir se parler, dialoguer, à défaut pour les Etats de s’entendre et de s’allier. Ce besoin demeure plus que jamais, à l’ère de la mondialisation, notre monde étant devenu un « village planétaire ». Pour autant, il est manifeste que les Etats n’ont toujours pas une unité de conceptions, d’intérêts et de valeurs. A ce titre, les Nations unies sont bien le miroir de la fragmentation de ce qu’on appelle, à tort, « la communauté internationale », mot-valise pour parler de ce qui n’existe pas !

On peut critiquer, bien sûr, la gouvernance des Nations unies et notamment son côté fortement inégalitaire qui se traduit par les prérogatives des cinq membres permanents, seuls à disposer du droit de veto au Conseil de sécurité. L’explication est simple : cette inégalité est le reflet de la puissance, même si d’autres Etats aujourd’hui peuvent y prétendre et frappent à la porte en convoitant un siège. Il est une évidence, il y aura toujours des Etats qui seront plus égaux que d’autres - sans parler des actions unilatérales de grandes puissances qui foulent aux pieds les principes qu’ils ont voulu faire adopter par les autres. L’ONU n’a pu empêcher l’hubris des Etats-Unis en 2003…

Les choses étant ce qu’elles sont, on doit se féliciter des missions de sécurisation des Nations unies qui, à travers l’envoi de casques bleus, plus de 120 000 sur la planète, aident à apaiser les tensions, au Liban avec la FINUL, en Centrafrique avec la MINUSCA, au Mali avec la MINUSMA... Le Secrétaire général, un homme seul, a néanmoins un rôle de médiateur efficace, et fait oeuvre utile dans des conflits, il est vrai le plus souvent, de basse intensité. Ainsi l’envoyé de Ban Ki-Moon en Libye, pays en proie à deux gouvernements rivaux, s’efforce-t-il à grand peine d’amener à une solution politique pour éviter qu’il ne sombre plus avant dans un chaos propice à tous les trafics.

Un autre facteur doit être pris en compte avant de dénigrer l’ONU. La société internationale n’est plus régie par les seuls Etats, qui sont affaiblis. Les acteurs transnationaux, avec les multinationales, les ONG, les religions, les organisations du crime, ont parfois largement pris le pas sur les Etats, certains étant même incapables de faire jeu égal avec des sociétés privées multinationales. En conséquence, critiquer l’ONU doit d’abord passer par la critique de l’affaiblissement de l’ordre étatique et l’incapacité du politique à se faire entendre dans l’ordre interne, ce qui aboutit à son incapacité à gérer l’ordre international. Bref, les Nations unies ne peuvent se substituer aux Etats.

Malgré toutes ses imperfections, l’ONU répond cependant à une nécessité, tenter l’impossible dans ce monde brownien qui semble échapper à tout contrôle ! 

 

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