Oui, la France peut être fière de son espérance de vie – 83 ans, au-dessus de la moyenne européenne – et d’un reste à charge parmi les plus faibles du monde. Mais derrière ces chiffres flatteurs, la réalité est brutale : notre système se dégrade sous nos yeux, et va « droit dans le mur ».
Les faits sont implacables
En 2024, le déficit de l’Assurance maladie a explosé à 13,8 milliards d’euros. Du jamais vu hors période de crise. Les hôpitaux, eux, affichent 3,5 milliards de déficit. En 2025, on attend déjà 16 milliards, et près de 20 milliards en 2029. Pendant ce temps, le vieillissement de la population et les affections de longue durée pèsent de plus en plus lourd : d’ici 2030, 16 millions d’assurés seront concernés, pour un surcoût de plusieurs milliards par an.
Si rien ne change, l’effondrement du système est garanti
Pour la Sécurité sociale, étranglée par ses déficits. Pour les Français, qui voient leur accès aux soins se réduire. Pour les entreprises, qui financent massivement le système mais subissent ses blocages et ses abus, notamment par exemple pour les questions des arrêts de travail.
Nous n’avons plus le choix : il faut agir maintenant !
Le MEDEF en sa qualité de première organisation patronale de France, représentant 240 000 entreprises directement contributrices du financement de la protection sociale, a toute légitimité pour porter ce combat. Les entreprises de France contribuent à hauteur de 110 milliards d’euros par an dans au financement de la santé. Elles sont également au cœur de l’innovation médicale, de la prévention et de l’offre de soins. Et surtout, elles en subissent chaque jour les dysfonctionnements.
Alors, arrêtons l’hypocrisie : répéter que « la santé n’a pas de prix » est une formule commode, mais fausse et même dangereuse car déresponsabilisante ! Car si la santé n’a pas de prix, elle a bel et bien un coût. Et laisser filer les déficits, c’est condamner notre modèle. D’autres pays comme l’Allemagne ou la Belgique dépensent moins que nous, et obtiennent de meilleurs résultats. La preuve est là.
C’est pourquoi j’avais mandaté un groupe de travail piloté par Yves Laqueille, vice-président de la Cnam (Caisse nationale d’assurance maladie). Sans tabou, avec des experts comme Frédéric Van Roekeghem et l’appui de nos fédérations, nous avons bâti un véritable pacte intergénérationnel pour redonner de l’air à la Sécurité sociale, restaurer l’efficacité du modèle français et surtout, le pérenniser !
Six priorités claires :
• Faire du numérique et de l’innovation les moteurs de la transformation ;
• Imposer une culture de la performance avec de vrais indicateurs de qualité ;
• Responsabiliser les acteurs pour maîtriser les soins ;
• Décloisonner le système, enfin, et faire coopérer les acteurs ;
• Faire de la prévention une arme massive ;
• Clarifier une gouvernance aujourd’hui illisible.
Le virage du numérique est non négociable
C’est lui qui permettra la transparence, l’évaluation, la lutte contre la fraude, et un suivi plus intelligent et efficient des patients. L’Espace numérique de santé doit devenir le guichet unique des assurés et des soignants.
Autre front : les arrêts de travail
Leur explosion perturbe profondément l’organisation des entreprises et obère leur compétitivité tout en pesant lourdement sur l’Assurance maladie. Nous demandons un délai de carence d’ordre public et un meilleur encadrement des prescriptions.
De même, peu plus d’un an après la nouvelle loi sur l’acquisition de congés payés pendant un arrêt maladie en date du 22 avril 2024, la Cour de cassation a rendu deux nouveaux arrêts en date du 10 septembre 2025 sur les congés payés. Le premier arrêt permet au salarié qui tombe malade au cours de ses congés payés de pouvoir bénéficier d’un report de ses congés. Le second arrêt impose à l’employeur la prise en compte des congés posés dans le calcul du seuil de déclenchement des heures supplémentaires pour les salariés soumis à un décompte hebdomadaire de leur durée de travail.
Ces deux décisions envoient un signal très négatif à l’heure où notre pays confronté à la concurrence d’un monde ouvert a besoin de travailler plus, et où l’on cherche à lutter contre les arrêts de travail abusifs. Le MEDEF déplore ainsi deux décisions qui vont à l’encontre de ces objectifs.
Soyons clairs : il ne s’agit pas de couper à la hache, mais de faire la chasse au gaspillage et de dépenser mieux. L’urgence de la situation de nos comptes publics l’impose. Pas un euro de plus dans le tonneau percé. La hausse des recettes n’est pas la solution à l’heure où nos entreprises sont d’ores et déjà les plus taxées de l’OCDE… C’est de la rigueur, de l’efficience et de la responsabilisation en matière des dépenses de santé que dépend l’avenir de notre système de santé.
Nos travaux prouvent qu’il est possible d’agir sans sacrifier la qualité des soins. À court terme, nous pouvons économiser jusqu’à 6,5 milliards d’euros – dont certaines mesures dès le PLFSS 2026. À moyen terme, nous pouvons ramener l’Assurance maladie à l’équilibre.
Nous n’avons plus le luxe de différer. Repousser les décisions, c’est mettre en danger les générations futures. Sauver notre système de santé n’est pas une option.
Transformer notre système, ce n’est pas seulement possible : c’est vital, et c’est maintenant ! ■