La sénatrice explique le dépôt de sa proposition de loi par les « dérives » que connaît la profession de généalogiste dont elle a eu connaissance à travers plusieurs témoignages et auditions et qui porteraient préjudice aux héritiers.
Si la très grande majorité des successions se passent en ligne directe, c’est-à-dire entre parents et enfants ainsi qu’entre ascendants et descendants, une minorité peut se faire en ligne indirecte, ou entre personnes non directement apparentées (oncle, neveu, cousins, amis…). Il peut toutefois arriver que des successions soient sans héritier identifié (famille éloignée, inconnue ou n’ayant pas marqué d’intérêt pour l’héritage), elles sont dites en déshérence ou vacantes.
En matière de succession, le notaire intervient dans la très grande majorité des cas qui peut, en l’absence d’héritier apparent et à l’issue d’investigations infructueuses solliciter les services d’un cabinet de généalogie spécialisé en matière successorale « afin de procéder aux recherches nécessaires permettant de trouver un ou plusieurs héritiers » décrit l’exposé des motifs. « Cette demande répond à la nécessité pour un notaire de rechercher les ayants droit d’une personne décédée afin de leur faire connaître l’existence de droits successoraux en leur faveur » précise la sénatrice. Après enquête, le généalogiste propose aux héritiers retrouvés de signer un contrat de révélation qui fixe les conditions de sa rémunération qui est « très généralement un pourcentage de l’actif net de la succession » qui peut varier entre 35 et 48 % selon le degré de parenté, sans compter les frais de dossier (entre 95 et 240 euros). Comme le rappelle Isabelle Florennes, « ces émoluments peuvent faire l’objet de négociations », or ajoute-t-elle « cet élément est rarement porté à la connaissance des héritiers ». Par ailleurs, pointe encore la sénatrice, au moment de la signature du contrat de révélation, « le particulier présumé héritier va signer sans connaître ni l’identité du défunt, ni le degré de parenté avec ce dernier, ni le montant de la succession et encore moins la part de la succession pouvant lui revenir ». La sénatrice s’interroge aussi sur le mandat que peut signer l’héritier « et qui s’apparente à une procuration générale » avec le généalogiste pour qu’il le représente auprès du notaire lors du recouvrement des fonds de la succession. Charge ensuite au généalogiste de reverser les fonds à l’héritier après prélèvement de ses honoraires. Ce qui n’est pas sans poser question dans des situations où le cabinet de généalogie n’avait pas de compte bancaire distinct entre son propre compte et celui des héritiers. « En cas de faillite, cette confusion ne permet pas de verser les fonds dus aux ayants droit retrouvés » explique l’élu du Sénat.
Le texte de la sénatrice entend remettre un peu d’ordre dans la profession et ses relations avec les héritiers présumés. Elle recommande d’une part la fixation des critères de rémunération de la personne à qui a été confié un mandat de recherche des ayants droit mais aussi la fixation d’un barème par décret tant pour les révélations que pour les vérifications. Cet encadrement des rémunérations varierait en fonction « du degré de parenté avec le défunt » mais aussi selon « le montant de l’actif net successoral ».
Le texte souhaite obliger les généalogistes à révéler rapidement aux héritiers possibles, la nature de l’héritage avant la signature d’un contrat. « Sans leur proposer de contrat, la personne mandatée révèle aux successibles, dès qu’ils sont retrouvés, l’ensemble des droits et actifs auxquels ils peuvent prétendre » stipule l’article de la proposition de loi.
La sénatrice entend rendre aux notaires leur mission première de gestion des fonds d’une succession. « Comme lors d’une vente d’un bien immobilier, il serait cohérent que les notaires versent directement aux ayants droit leur part et aux généalogistes, leurs honoraires » explique-t-elle encore.
Face à ces modifications des règles du jeu, les généalogistes de France sont vent debout et réfutent l’ensemble des critiques. Ils rappellent qu’un certain nombre de garanties ont été mises en place par la profession à travers une convention signée fin 2024 avec le Conseil Supérieur du Notariat (CSN). La sénatrice espère que son texte, soutenu par la Chancellerie, pourra être débattu d’ici la fin de l’année. En 2012 déjà, un texte visant à réformer le métier de généalogiste avait été déposé par Jean-Christophe Lagarde, alors député. Il n’avait jamais été discuté. ■