Print this page

Les ressources humaines militaires : enjeu clé pour l’avenir

Par Laetitia Saint-Paul, Députée de Maine-et-Loire, ancien officier de l’armée de terre

La compréhension par nos concitoyens des notions de « citoyenneté » et de « nation » doit faire l’objet d’un questionnement. Ce point et celui de la place du militaire dans la nation sont naturellement liés à la résilience de notre société mais aussi à notre capacité à maintenir le modèle des ressources humaines militaires dans la durée.

Mon collègue député Loïc Kervran a tout récemment été corapporteur de la mission d’information intitulée « Recrutement et fidélisation : gagner la bataille des ressources humaines du ministère des Armées » et je souscris à ses conclusions.

Dans un contexte géopolitique complexe, il est essentiel de disposer d’un personnel militaire qualifié, stable et engagé. Or ce modèle est à même d’être fragilisé par les départs et notamment les désertions.

Le rapport parlementaire mentionné identifie plusieurs causes de départs : parmi elles, citons la mobilité géographique qui peut être perçue comme un véritable fardeau par certaines personnes, notamment lorsqu’il s’agit de jeunes familles. Les réalités sociétales nécessitent une attention particulière pour gérer au mieux les carrières de chacun. En outre, l’amélioration du soutien au « Plan familles » et l’augmentation du nombre de logements pour célibataires géographiques font aussi partie des pistes à suivre dans l’évolution du modèle RH des Armées, tout comme la promotion de l’accès à la propriété et l’aide à la rénovation des logements de « repli familial », ceci afin de garantir au mieux la stabilité d’un cadre de vie. Par ailleurs, la préservation de la singularité du statut militaire et la prise en compte des spécificités liées aux contraintes de mission sont à même de concourir au renforcement de la fidélisation des militaires.

Aspect important s’il en est : la féminisation des Armées, dont on peut constater qu’elle n’est pas pleinement réussie à ce jour alors que les besoins relatifs à la Défense nationale imposent de s’adresser à 100 % d’une classe d’âge. Les formules telles que « il n’y a pas de femmes dans l’armée, il n’y a que des soldats » n’ont pas aidé ! Des freins persistent, en matière d’accès aux postes de commandement stratégique tout particulièrement. Un point d’attention primordial est à porter sur le renforcement de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS), des violences qui contribuent aux départs de l’Institution. En 2024, le « MeToo des Armées » a libéré la paroles de victimes : il convient d’appliquer une tolérance zéro envers les agresseurs en appliquant des sanctions fermes et proportionnées aux préjudices. Un développement de la prévention dès la formation militaire est préconisé, de même que le renforcement de la cellule Thémis qui devrait être externalisée pour une efficacité optimale.

Si l’on se projette vers l’avenir, l’anticipation des besoins dans les recrutements est indispensable. Dans cette optique, attirer des profils rares et experts, notamment en termes de connaissances des domaines numériques/technologiques, permettra de répondre aux exigences croissantes des Armées, tout comme le développement de parcours professionnels dynamiques et à la gestion fine des compétences. De plus, la généralisation des bourses de recrutement serait susceptible d’attirer des talents issus de l’ensemble de la société.

Pour prolonger la réflexion, notons qu’il est intéressant de se référer à la thèse de Nicolas Barthe relative à la GenZ au sein de l’Armée de Terre.

Les aspects de recrutement et fidélisation du personnel militaire déclinés ici le sont dans une réflexion d’adaptation du modèle RH des Armées aux défis contemporains, en garantissant un environnement propice au bien-être des militaires et donc à leur maintien au sein de l’Institution. La modernisation de ce modèle, plus flexible et humain, est essentielle : la reconnaissance du fort engagement des militaires et la mise en place de mesures adaptées venant concrétiser à la fois cette reconnaissance et une solide cohésion faciliteront leur implication à long terme et seront à même de garantir un avenir solide pour les forces armées. 

108 K2_VIEWS