Actuellement, l’article 44 de la loi EGALIM est inopérant. Bien qu’il interdise la vente de produits agricoles ou alimentaires non autorisés en France, il se limite à la vente et ne s’applique pas aux importations. Par ailleurs, le texte ne prévoit pas de sanctions pour les contrevenants. Cette situation fait donc reposer la responsabilité sanitaire du produit sur le commerçant du coin de la rue. Comment peut-il réellement contrôler les résidus de pesticides présents dans les fruits qu’il reçoit et s’apprête à vendre ?
Les conséquences de cette négligence sont tristement visibles au quotidien. De nombreux produits importés, comme la viande nourrie avec des farines animales ou les tomates traitées au dichloropropène interdit en Europe, continuent d’affluer sur notre marché. Il appartient à ces pays de choisir s’ils interdisent ou non certains produits phytosanitaires toxiques. Toutefois, il n’est pas acceptable que ces produits soient imposés sur nos étals par des importateurs étrangers, surtout s’ils sont proposés à des prix inférieurs à ceux de nos produits français de qualités. Cette concurrence déloyale est intolérable. En ce sens, un rapport du Sénat a révélé que 10 à 25 % de ces produits importés ne respectent pas nos normes sociales et environnementales, engendrant une perte considérable de plus de dix milliards d’euros par an pour l’agriculture française. Cette concurrence affecte non seulement les finances de nos agriculteurs, mais constitue également un risque majeur pour la santé de tous les consommateurs. Le libre-échange ne doit pas se faire au détriment du bien-être de nos concitoyens ; il ne doit pas être synonyme de risques sanitaires.
Pour remédier à cette situation déplorable, certains de nos voisins européens, comme la Pologne et la Roumanie, ont d’ores et déjà pris des mesures en interdisant les importations de produits contenant des substances proscrites dans l’Union européenne. Il est temps que la France emboîte le pas. Assurer que seuls des produits conformes à nos exigences pénètrent notre territoire est essentiel. Les règles commerciales actuelles ne protègent ni nos producteurs français, ni nos consommateurs, ni nos écosystèmes. L’absence de réciprocité et de régulation stricte expose notre marché à des pratiques de dumping malsaines, rappelant les erreurs commises dans les années 1980 avec l’industrie textile. La France ne doit plus être naïve, ni soumise. Depuis trop longtemps, nous exigeons l’excellence à nos agriculteurs, alors que nous restons permissifs avec ce que nous importons. Notre administration exerce un contrôle omnipotent envers nos agriculteurs tout en fermant les yeux sur ce qui arrive à nos frontières. Le moment est venu de changer cette dynamique, de verrouiller ces failles qui nous menacent tous. En sommes-nous capables ? La réponse est sans équivoque : oui, mais à condition d’agir avec fermeté.
Avec Julien Dive, nous proposons donc de changer de braquet et de cibler les importateurs. Ce sont eux qui disposent de toutes les informations sur les produits qu’ils mettent sur le marché. C’est donc à eux d’en assurer leur qualité sanitaire, sous peine de sanctions exemplaires similaires à celles auxquelles un agriculteur français est exposé. L’objectif de cette proposition de loi n’est donc rien moins que de restaurer la réciprocité dans nos échanges commerciaux en interdisant explicitement l’importation de ces produits et denrées ainsi que de sanctionner sévèrement ces marchands de poison.
Enfin, protéger notre agriculture ne se limite pas à un enjeu économique, mais revêt également une importance environnementale. En favorisant une production locale, nous pouvons considérablement réduire nos émissions de gaz à effet de serre générées par le transport de ces produits importés néfastes. Un chiffre doit nous interpeller en conclusion : 44 % de notre empreinte carbone est issue de nos importations. Si nous voulons décarboner notre économie, nous devons relocaliser et protéger nos entreprises. ■
*Proposition de loi n°659 visant à interdire l’importation de produits agricoles non autorisés en France.