Print this page

De la recherche fondamentale à la thérapie cellulaire chez l’homme - Le Centre européen d’études du Diabète

Par le Professeur Michel Pinget, président-fondateur du Centre européen d’étude du Diabète (CeeD)

La prévalence du diabète explose dans le monde entier. Il est devenu une des nouvelles pandémies de maladies chroniques qui se substituent aux maladies infectieuses, et deviennent la 1ère cause de mortalité. Le professeur Michel Pinget, président-fondateur du Centre européen d’étude du Diabète (CeeD) nous présente cet écosystème original de recherche fondamentale et appliquée qui agit aussi en faveur de la prévention, du dépistage et de la sensibilisation.

Créé en 1991, sous forme d’une structure privée associative, le CeeD s’est donné comme objectif de développer tous les moyens à sa disposition pour faire face à la problématique du diabète, en décortiquant les mécanismes d’un diabète et de proposer des méthodes nouvelles de traitement et de prévention. Il s’appuie sur un laboratoire de recherche universitaire, 2 structures dédiées, l’une à la formation, l’autre aux opérations de sensibilisation individuelle et collective, enfin des start-up.

Le diabète revisité en 2023

Rappelons que le diabète se définit simplement par une augmentation durable du taux de sucre dans le sang (hyperglycémie chronique) qui risque de détériorer le fonctionnement de nombreux organes. L’objectif à ce jour est de réduire, autant que faire se peut, cette hyperglycémie, à l’aide de médicaments, dont l’insuline administrable uniquement par injections sous-cutanées.

Cette maladie est devenue aujourd’hui une des nouvelles pandémies de maladies chroniques qui se substituent aux maladies infectieuses d’antan, et deviennent la 1ère cause de mortalité. La prévalence du diabète explose dans le monde entier (surtout celle du diabète de type 2) passant de 100 millions de sujets en 2000 (moins de 1 million en France) à plus de 450 aujourd’hui (5 en France) et des prévisions de 800 en 2040 (8 en France).

Le primum movens du développement d’un diabète est la dysfonction des cellules qui fabriquent l’insuline, les cellules bêta. Celles-ci sont logées dans le pancréas, au sein d’unités pluricellulaires, les îlots pancréatiques ou de Langerhans. Le fonctionnement de ces îlots est très finement régulé pour maintenir la glycémie toujours normale.

Cette altération des îlots est la conséquence de l’exposition du sujet à des facteurs multiples (les exposomes), de nature génétique (génomique et épigénomique) et environnementale, dont les principaux sont le vieillissement, l’inactivité physique et la malbouffe, mais aussi d’autres éléments liés au mode de vie (cf encadré 2).

De la maladie d’organe à la maladie de l’organisme

Comment les îlots pancréatiques peuvent-ils être affectés par des facteurs dont ils ne sont pas la cible directe, que ce soit l’alimentation qui cible le tube digestif, l’inactivité impactant le système musculaire ou le stress dont la victime est le cerveau ? En fait tous nos organes communiquent ensemble et surtout ont des fonctions beaucoup plus larges que celles que nous imaginions au siècle dernier.

Tous ont en effet des capacités de sécrétion d’hormones et de transfert de matériel génétique les uns vers les autres. Par exemple, la déstructuration de l’alimentation, en modifiant la composition du microbiote intestinal, va impacter la fonction de cellules endocriniennes présentes dans sa paroi et donc diminuer la production d’hormones susceptibles de protéger les îlots pancréatiques. Il en va de même pour le cerveau, le tissu adipeux, le foie, mais surtout le muscle.

Le muscle, régulateur des équilibres métaboliques

Notre laboratoire porte aujourd’hui tous ses efforts sur la connaissance des produits issus du muscle et leur impact sur la fonction du pancréas.

Pour cela il nous a fallu acquérir toute la maîtrise sur :

• Le fonctionnement des îlots, tout d’abord en les isolant à partir de pancréas de rongeurs, de porc et surtout humains, puis en constituant une biobanque

• Le fonctionnement des fibres musculaires humaines en développant un modèle d’exploration et en réalisant également une biobanque

Nous avons isolé plusieurs protéines issues des muscles (myokines) responsables des activités de résistance (et non d’endurance) et avons apporté la preuve, in vivo, mais aussi in vivo sur l’animal entier, que ces myokines constituaient un fantastique espoir, transposable pour la prévention du diabète et sa prise en charge chez l’homme. Un grand pas également vers l’optimisation de l’activité physique comme traitement des diabètes avérés.

C’est aujourd’hui une nouvelle start-up, ILONOV qui a la mission d’amener une première myokine au stade de médicament naturel, de biothérapie. 5 millions d’euros sont aujourd’hui nécessaires pour cette phase pré-clinique. 

https://www.ceed-diabete.org/

Les différents types de diabète
Il existe trois types de diabète : ils affectent de façon différente l’insuline, une hormone vitale, indispensable à la construction des cellules et à leur fonctionnement.
Le diabète de type 1 se caractérise par une destruction auto-immune de plus de 90 % des cellules bêta, productrices de l’insuline, provoquant une carence insulinique totale ou partielle, à l’origine de symptômes cliniques (soif intense, amaigrissement, fatigue et augmentation du volume urinaire). Le diabète de type 1 touche plus 10 % de la population diabétique et principalement une population relativement jeune.
Le diabète de type 2 est la conséquence d’une perte de fonctionnalité des îlots pancréatiques chez des sujets dont l’organisme est peu à peu devenu résistant à l’insuline.
Contrairement au diabète de type 1, le diabète de type 2 est le plus souvent asymptomatique. De ce fait, la maladie peut être diagnostiquée plusieurs années après son apparition, une fois les complications déjà présentes. Le diabète de type 2 touche environ 90 % de la population diabétique totale. Il apparaît à un âge plus avancé, même s’il progresse aujourd’hui vers une population de plus en plus jeune, en raison notamment d’un mauvais équilibre alimentaire et du manque d’activité physique dès l’enfance, favorisant l’expression des gènes du diabète.
Le diabète gestationnel est un diabète qui survient chez une femme prédisposée, du fait des modifications métaboliques provoquées par la grossesse.

Les principaux facteurs d’exposition conduisant au diabète (exposomes)
• Mode de vie
• Réduction de l’activité physique et sédentarité
• Malbouffe
• Sommeil déstructuré
• Consommation de tabac et d’opïoides
• Relations sociales (familiales, de travail …..) de mauvaise qualité
• Environnement, lié notamment à l’urbanisation
• Pollution chimique et atmosphérique
• Gestion du stress
• Précarité

Le Laboratoire de Thérapie Cellulaire du Diabète (LTCD)
Depuis 2020, la transplantation d’îlots pancréatiques est prise en charge par l’Assurance Maladie. Il s’agit de traiter les sujets porteurs d’un diabète type 1 en remplaçant les cellules pancréatiques détruites par des cellules nouvelles, actuellement celles provenant de sujets décédés.
Depuis 2022, fort de son expérience sur l’isolement des îlots en recherche, le CeeD met en place un des 4 LTCD français pour permettre la production de tels îlots et pour les rendre aptes à l’implantation chez un sujet atteint de DT1. Ce traitement, développé de manière expérimentale depuis 2000, supprime toutes les contraintes liées à la présence d’un DT1, et réduit la lourde charge mentale pour les sujets atteints, en général jeunes et leur entourage.
Le LTCD se compose d’une salle blanche, à 3 niveaux d’atmosphère contrôlée, encadrée par une zone technique et un accueil, mais aussi une centrale de production d’air et un groupe électrogène, le tout pour un coût de 2,5 M e, à la charge du CeeD.

147 K2_VIEWS