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L’Assemblée à l’heure du bilan

2023 a été pour l’Assemblée et le Sénat une année chargée faite de débats animés et de coups politiques. Retour sur une année compliquée.

Le projet de loi immigration devait être le grand moment du gouvernement et de la majorité (relative) présidentielle mais il en a été tout autre avec une motion de rejet adoptée par les députés empêchant toute discussion en séance publique. Le texte a ensuite dû passer en CMP laissant la haute main aux Républicains pour réécrire le texte à leur sauce. Texte qui a été finalement adopté grâce aux voix des Républicains et du Rassemblement national. Le débat suscité par ce projet de loi jugé une fois trop à gauche, une autre fois trop à droite a laissé des traces au sein l’hémicycle et chez les élus macronistes qui se sont parfois durement écharpés sur la question migratoire. Pour le gouvernement et la majorité présidentielle, le camouflet infligé par les oppositions a du mal à passer tout en portant un coup énorme au moral des troupes. La saisine du conseil constitutionnel pour faire annuler des mesures adoptées apparaît aussi comme le signe d’un mépris du gouvernement pour les parlementaires. « Le Conseil constitutionnel n’est pas la lessiveuse des consciences » expliquait à l’Association des Journalistes parlementaires, Olivier Faure. « Le Conseil constitutionnel n’est pas une 3ème chambre. Le Conseil constitutionnel fait du droit » s’agaçait-il. Mais avec cette motion de rejet, qualifiée de « coup politique » des oppositions par le ministre de l’intérieur n’est qu’un des nombreux soubresauts qui ont émaillé la session parlementaire.

S’il y a eu absence de débat avec le projet de loi immigration, ce n’est pas le seul texte à avoir été adopté sans discussion créant un malaise chez les parlementaires, et pas seulement d’opposition (PLF, PLFSS). L’utilisation systématique et répétitive du 49-3 (23 en moins de deux ans) puis des dépôts de motions de censure ont été mal perçus pour une grande majorité des parlementaires qui ont estimé que l’on bafouait les droits du Parlement. « Il y a un gros spleen, et un décrochage puissant de la majorité. Le moral est bas, il y a de l’incertitude sur les futures réformes, et l’agacement commence à monter sur l’absence de récit » reconnaît un député Renaissance interrogé par nos confrères du Figaro.

La division s’est également faite sentir avec les événements internationaux qui ont eu des répercussions jusqu’au Parlement révélant des oppositions exacerbées entre parlementaires. Le massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre dernier a ainsi fait exploser la Nupes « façon puzzle » entre des Insoumis refusant de qualifier le Hamas de mouvement terroriste et ses alliés scandalisés.

A contrario, le Sénat a de quoi se réjouir. Il est apparu comme la chambre du Parlement ayant su débattre avec un esprit constructif et consensuel. « Plus que jamais, cela a été l’année du Sénat. Parce que nous avons à la Chambre haute des élus ayant une vraie culture politique, sachant travailler collectivement dans le calme et la tempérance » explique avec la fierté du devoir accompli le patron des sénateurs centristes, Hervé Marseille très actif au Palais du Luxembourg cette année.

L’année 2024 sera-t-elle celle de la reconstruction ? Au Parlement, chaque groupe va devoir trouver ou retrouver sa place avec des débats annoncés comme importants (AME, projet de loi fin de vie, constitutionnalisation de l’IVG). Sans compter les élections européennes qui pourraient venir aussi rebattre une nouvelle fois les cartes et fragiliser un équilibre déjà précaire. 


Depuis le début de l’actuelle législature, 98 sanctions ont été prononcées, dont 77 lors du seul débat sur la réforme des retraites. Les sanctions peuvent aller du simple rappel à l’ordre aux « censures avec exclusions ». Les députés Insoumis ont été les plus sanctionnés depuis juin 2022 (76), suivis par les néputés Ecologistes (6) et par ceux du Rassemblement national (6).

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