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“Des images glaçantes, terrifiantes”

Le 14 novembre au soir, un peu moins d’une centaine de députés, membres du groupe d’amitié France-Israël a assisté à l’Assemblée nationale à la projection du film sur les attaques du 7 octobre perpétrées par le Hamas. Témoignages.

A la sortie de la projection initiée par le président du groupe d’amitié France-Israël, le député Mathieu Lefèvre (RE, Val-de-Marne), les visages sont fermés, blêmes, les yeux rouges et humides. Un lourd silence règne. Juste avant l’agitation provoquée par la marée de micros et de caméras qui assaillent les élus. « Qu’avez-vous ressenti ? » lancent sans attendre les journalistes pressés d’alimenter en petites phrases les chaines d’info en continu. Sans surprise, les quelques députés présents se plient à l’exercice. Mais pouvait-il en être autrement ?

En dépit des hésitations, ils étaient plus de 80 réunis dans la salle de projection de l’Assemblée nationale dans « une ambiance glaciale » à avoir voulu voir l’horreur. Très vite, nous raconte-t-on, les images défilent, sans montage, juste 43 minutes d’images brutes prises par les terroristes avec des GoPro ou des téléphones portables. Les seuls sons que l’on entend témoignent avec émotion les élus, ce sont ceux des tirs et des cris. Très vite, une élue quitte la salle en larmes. « Les images sont insoutenables ». Elle sera suivie au fil de la projection par d’autres députés. « Objectivement, les images sont insoutenables. On peut s’en faire une idée avant, mais tant qu’on n’a pas vu ça… On a le cœur lourd. C’est une atteinte à l’Humanité toute entière » commente aux Quatre colonnes Mathieu Lefèvre qui confesse avoir été obligé à plusieurs reprises de « détourner le regard ». « C’était un moment très difficile mais nécessaire face à tous les relativismes et face à tous les risques d’oublis » ajoute l’élu Renaissance. Ici et là, les députés, ceux qui ne sont pas directement rentrés chez eux, font part de leur « effroi » aux journalistes. « Ce sont des images glaçantes, terrifiantes. On ne peut même pas concevoir qu’une telle barbarie soit possible. C’est un crime contre l’Humanité » juge le député LR des Alpes-Maritimes Eric Ciotti qui avait souhaité assister à la projection même s’il ne faisait pas partie du groupe d’amitié. Plus loin, Emilie Bonnivard (LR, Savoie), émue, reconnaît que si elle s’attendait à « l’horreur », le plus dur peut être a été pour elle de voir « la joie des terroristes » détruisant l’autre sans défense. Une « joie » et une « indifférence » des terroristes choquantes pour tous les parlementaires comme le souligne à son tour Michel Herbillon (LR, Val-de-Marne) ou le député RN, Julien Odoul : « Ce qui est le plus révoltant c’est de voir qu’ils sont dans la jouissance du massacre ». Submergée par l’émotion, Emmanuelle Ménard fond en larmes en évoquant « un spectacle innommable ». Très affecté, Meyer Habib (app. LR, Français établis hors de France) a du mal à se contenir : « ce sont des barbares, des sauvages qui ont fait ça » s’emporte-t-il en pointant du doigt « ceux qui dans cet hémicycle osent remettre en cause ce qui s’est passé ».

Justement, dans la salle étaient également présents les députés LFI Aymeric Caron et David Guiraud. L’un et l’autre ont brièvement fait face aux journalistes. « Je ne sais pas si c’était nécessaire de voir ça, ni si nous avons appris quelque chose. Ce qu’on a vu pendant 45 minutes, c’est l’horreur mais on le savait déjà » a sobrement reconnu le député LFI de Paris qui s’était dit peu avant « bouleversé, écœuré, dégoûté ». Ce qui ne l’empêchera pas le lendemain sur LCP de lancer une nouvelle polémique en déclarant qu’il fallait « quand même aussi avoir conscience que c’est un film qui est réalisé par l’armée israélienne, qui est monté par l’armée israélienne. Et que donc bien évidemment il y a un but derrière la projection de ces images ». Il ajoutait : « Il faudrait que nous puissions voir également maintenant un film qui nous montre ce qui se passe à Gaza en ce moment ». Passons. Plus éprouvé semble-t-il, David Guiraud…

Fallait-il ou non projeter ces images ? « Rien ne serait pire que l’oubli » souligne avec insistance Mathieu Lefèvre à qui la question a été posée. « Nous parlementaires avons ce rôle d’être des témoins de l’Histoire, de pouvoir dire cette vérité » précise le député. Pour autant, il se dit opposé à une plus large diffusion, à la différence d’Olivier Falorni (Démocrate, Charente-Maritime) par exemple qui évoque « un document historique ». « Je ne crois pas utile que le grand public ou même un public restreint puisse avoir accès à ces images » pour des questions de récupération et de risques de répétition insiste Mathieu Lefèvre. « La presse et les parlementaires me paraissent être un public suffisant ».

Après avoir difficilement témoigné, les députés se sont éparpillés, les uns partant en séance, les autres chez eux - « La soirée va être compliquée » reconnaît Olivier Falorni avant de nous quitter. Dehors la nuit est tombée. Il pleut. 

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