Print this page

Du gaz pour cet hiver ?

Pour pallier à la fin des importations gazières de Russie, l’Europe, la France, veillent au stockage de gaz pour passer l’hiver le plus sereinement possible. Des hausses de prix ne sont pas à exclure.

L’été est loin d’être fini et pourtant il faut déjà prévoir l’hiver qui s’annonce pour éviter une pénurie de gaz. « Ma responsabilité est de tout faire pour anticiper tous les scénarios possibles, y compris celui d’un hiver extrêmement long et froid, d’un défaut d’approvisionnement ou d’une panne sur une infrastructure » a indiqué au cours de l’été Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique. L’objectif clairement affiché est donc bien d’avoir des stocks suffisants pour affronter les premiers froids. Et si les indicateurs chiffrés fournis par Gas Infrastructure Europe (GIE) semblent plutôt rassurants, il ne faut pas encore crier victoire et se croire à l’abri d’une possible pénurie. Pour la France, mi-août, le taux de remplissage s’établissait à 82,87 %, ce qui est légèrement au-dessus du « solde intermédiaire » de 81 % espéré pour le 1er septembre mais qui reste toutefois inférieur au taux de remplissage de 86 % l’an dernier à la même époque (75 % en 2021). « L’objectif est d’atteindre les 100 % d’ici le 1er novembre. Ce remplissage, combiné aux nouvelles habitudes de sobriété des Français grâce à qui nous avons réduit notre consommation de gaz de 14 % en un an, et aux prévisions de performance de notre parc nucléaire, nous permet d’entamer l’hiver dans les meilleures conditions possibles » précise avec confiance la ministre.

Reste que cet optimisme peut être vite remis en cause par une forte demande qui viendrait bousculer cet équilibre de façade. Si l’an dernier, nous avons pu bénéficier d’un hiver plutôt clément, qu’en sera-t-il cette année ? Plus que jamais, l’Etat appelle les entreprises et les particuliers à ne pas relâcher leurs efforts en faveur d’une plus grande sobriété (N’oubliez pas : le chauffage dans votre logement ne doit pas être à plus de 19°C !). Au-delà des stocks, les experts rappellent que cela ne représente que 45 % de la consommation hivernale de molécules, le solde étant issu des approvisionnements extérieurs qui peuvent être soumis à de nombreux aléas comme la météo, on l’a déjà dit mais aussi une baisse de la production, l’arrêt d’exploitation d’un champ gazier, des grèves dans un port, une raffinerie, des problèmes liés au transport… La prolongation de la guerre en Ukraine et la baisse des importations russes venant tristement compléter ce tableau. A noter encore que la Chine qui connait aujourd’hui un certain ralentissement économique apparaît comme moins consommatrice de gaz mais quid de demain si la Chine relançait sa consommation et entrait à nouveau en concurrence avec le Vieux continent pour l’achat de gaz ?

Les importations de gaz russe ayant fortement baissé – la part de gaz russe dans les importations de l’UE est passée de 45 % en 2022 à 10,8 % en 2023 –, l’Europe qui consommait 400 milliards de mètres cubes de gaz russe a dû se tourner vers d’autres sources d’approvisionnement. Les gazoducs entre la Russie et l’Europe étant fermés, l’Europe s’est tournée vers plus de gaz naturel liquéfié (GNL) essentiellement importé via des méthaniers - on parle de 150 à 160 méthaniers qui accostent chaque mois sur les côte européennes contre une quarantaine avant l’agression russe. Du GNL importé essentiellement depuis le Qatar, les États-Unis, l’Égypte et l’Afrique de l’Ouest. Face à cette forte hausse du GNL, l’Europe a également dû rapidement s’équiper de terminaux flottants pour palier à la saturation des plateformes terrestres. Fin août, début septembre, la France devait disposer de son propre FSRU (Floating Storage Regasification Unit) au Havre. C’est TotalEnergies qui a remporté l’appel d’offres avec un navire chargé de regazéifier le GNL avant de l’injecter dans le réseau. Il a fallu pour cela à l’entreprise déployer 3,5 km de tuyaux pour relier le bateau en mer au quai puis au réseau. « Le FSRU aura une capacité de 4,5 milliards de mètres cubes par an, soit l’équivalent d’environ 10 % de la consommation française de gaz en 2022. Il s’agit d’une capacité technique maximale mais son utilisation dépendra de la demande effective » a indiqué un porte-parole de TotalEnergies avant de préciser à nos confrères du Figaro que « le FSRU est un outil temporaire dont le fonctionnement est prévu pendant cinq ans. Cette durée a été fixée par la loi ».

Quant au prix du gaz, il ne faut pas s’attendre à des miracles.

L’été dernier, les cours du gaz s’étaient envolés pour atteindre les 300 euros du mégawattheure (MWh) pour redescendre aujourd’hui à 38,80 euros, bien loin des tarifs des années 2010 avec des cours du gaz qui se situaient entre 3 et 12 euros. Pour le consommateur final, cette oscillation se retrouve bien évidemment sur sa facture et encore plus depuis que le gouvernement a mis fin au bouclier tarifaire et aux tarifs réglementés de gaz (TRVG) le 30 juin dernier. Désormais, les fournisseurs de gaz sont libres de fixer leurs tarifs même si la commission de régulation de l’énergie (CRE) publie mensuellement et à titre indicatif un prix repère de vente de gaz naturel pour les consommateurs. A chacun désormais de faire son choix. 

338 K2_VIEWS