Tout va très bien madame la marquise. Depuis des années, les études se suivent et se ressemblent montrant que les jeunes Français ont du mal à lire, écrire et compter. Pendant ce temps, les ministres de l’Education nationale se succèdent sans que les résultats ne s’améliorent vraiment. L’étude orchestrée par la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp)*, l’agence des statistiques du ministère de l’Education auprès de 750 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans, de nationalité française ayant participé à la Journée défense et citoyenneté (JDC) en 2022 en est une nouvelle preuve. Selon les résultats du test, 11,2 % d’entre eux sont « en difficulté de lecture ». Et 4,9 % de ces jeunes peuvent être considérés en situation d’illettrisme. « Ceux qui rencontrent les difficultés les plus sévères se caractérisent par un déficit important de vocabulaire » précise la Depp, avec des difficultés en compréhension de l’écrit (traitements complexes).

La note montre encore que 10 % de jeunes « aux acquis limités » « parviennent à compenser leurs difficultés pour accéder à un certain niveau de compréhension ». Pour ces profils, la lecture reste « une activité laborieuse, mais qu’ils savent mettre en œuvre pour en tirer profit ». On peut imaginer que ces lecteurs défaillants, pour rendre la tâche plus facile, emploient une stratégie de compensation qui consiste à faire des hypothèses sur le produit de leur lecture. « Pour cela, il leur est indispensable d’avoir un lexique suffisant pour réduire les probabilités d’échec et faire de cette stratégie une façon de lire fructueuse. L’automatisation des processus cognitifs impliqués dans l’identification de mots ne permet pas toujours de garantir l’efficacité de traitement d’écrits complexes » écrivent les auteurs de la note.

Cependant, si l’on veut voir le verre à moitié plein, on peut se réjouir de voir que 78,9 % des jeunes testés sont des « lecteurs efficaces ».

Les jeunes en difficulté de lecture sont de moins en moins nombreux à mesure que le niveau d’étude s’élève : de 48,7 % chez ceux qui n’ont pas dépassé le collège (mais qui ne représentent que 2,3 % des jeunes participants) à 4,5 % chez ceux qui déclarent suivre ou avoir suivi au moins des études générales ou technologiques au lycée apprend-t-on encore à la lecture de l’étude. Le pourcentage de jeunes en difficulté est différent selon le sexe : 12,9 % des garçons contre 9,1 % des filles. Les garçons témoignent plus souvent d’un déficit des mécanismes de base de traitement du langage écrit détaille la Depp. Ils réussissent moins bien les épreuves de compréhension (traitements complexes) et d’automaticité. En revanche, leur score moyen en vocabulaire est comparable à celui des filles.

Géographiquement, ce sont, en France métropolitaine, dans les départements du nord de la France ou entourant l’Île-de-France que l’on trouve le plus de jeunes touchés par les difficultés en lecture. La part des jeunes en difficulté de lecture s’élève ainsi à 15,7 % dans l’Aisne, 13,2 % dans la Somme et 12,8 % dans l’Aube. Elle atteint aussi 14,5 % dans la Nièvre et 14,4 % dans l’Yonne. En Île-de-France, la part des jeunes en difficulté varie de 6 % à Paris à 15,5 % en Seine-Saint-Denis. Les pourcentages sont encore plus élevés en Outre-mer. 30,4 % pour la Guadeloupe, 28,9 % pour la Martinique, 26,4 % pour La Réunion, 51,8 % en Guyane et 55,7 % à Mayotte. ■

*Fernandez A., Giraudeau-Barthet H., 2023, « Journée défense et citoyenneté 2022 : plus d’un jeune Français sur dix en difficulté de lecture », Note d’Information, n° 23.22, DEPP.

En 2022, 11,2 % des jeunes participants à la Journée défense et citoyenneté rencontrent des difficultés dans le domaine de la lecture. 4,9 % d’entre eux sont en situation d’illettrisme.