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GPA à l’étranger, la décision (contestée) de la Cour de cassation

La Cour de cassation a validé l’inscription à l’état civil français de deux enfants nés de la GPA en Russie. Une décision qui sème le trouble à droite comme à gauche.

 

Un an après la condamnation de la France par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) qui tout en reconnaissait à la France le droit d’interdire sur son territoire le recours à la GPA, expliquait qu’au nom de l’intérêt supérieur de l’enfant nés de mères porteuses à l’étranger, elle ne pouvait porter atteinte à leur « identité » en refusant de les reconnaître, la plus haute juridiction française a rendu sa décision concernant des enfants issus de la GPA.

Pour la Cour, alors que les actes de naissances dont la transcription est demandée, mentionnent comme père celui qui a effectué une reconnaissance de paternité et comme mère, la femme qui a accouché, « les règles de transcription sur les actes de l’état civil […] doivent s’appliquer ». « La théorie de la fraude ne peut faire échec à la transcription de l’acte de naissance » jugent les magistrats. En conséquence de quoi, l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes du 15 avril 2014 qui refusait l’inscription sur le registre français est cassé. Dans sa décision, la Cour n’a par ailleurs pas retenu la demande du procureur général d’inscrire ces enfants à l’état civil sous réserve qu’un test génétique établisse la filiation avec les pères. Une décision qui s’apparente à un véritable revirement de jurisprudence. En 2013, la Cour de Cassation avait estimé que, la GPA étant interdite en France, tous les actes en découlant devaient être considérés comme nuls. Mais c’était avant la l’injonction de la CEDH.

Une décision qui a évidemment fait polémique. A droite et à gauche mais surtout à droite. Alain Juppé a dénoncé une « légalisation de fait de la GPA en France au mépris de la volonté du législateur qui a posé son interdiction en principe d’ordre public ». « Il n’appartient pas au juge qui devrait être le gardien du droit et de la dignité humaine d’aller à l’encontre de la volonté du législateur » a écrit sur son blog le maire de Bordeaux. Pour Nicolas Dupont-Aignan, cette décision « dessine une étape supplémentaire dans la légalisation implicite de cette pratique contraire à la dignité de la personne ». « Par la volonté de juges qui semblent vouloir se substituer aux représentants du peuple souverain, la France abandonne progressivement la position forte et courageuse qui fut la sienne pendant des années : celle du refus absolu de toute marchandisation de l’humain » poursuit le député (NI) et président de Debout la France. « La Cour de Cassation ne peut orchestrer elle-même le contournement de la loi » s’emporte à son tour Yannick Moreau, député Les Républicains de la Vendée littorale et membre de l’entente parlementaire pour la Famille pour qui « cette décision s’apparente à un coup d’état des juges qui prennent la place du législateur ».

De son côté Manuel Valls dit avoir « pris acte » de la décision tout en réaffirmant que « la GPA demeure un interdit absolu en France ». « Il nous reste maintenant à analyser la décision de la Cour de cassation pour en déterminer très précisément les effets » a ajouté le Premier ministre qui sur la question a plusieurs fois changé d’avis. En octobre 2014, le même Manuel Valls avait contesté la décision de la CEDH. Dans un entretien au journal La Croix, il expliquait que « le Gouvernement exclu[ait] totalement d’autoriser la transcription automatique des actes étrangers, car cela équivaudrait à accepter et à normaliser la GPA ». Il ajoutait « qu’il [serait] incohérent de désigner comme parents des personnes ayant eu recours à une technique clairement prohibée ». C’est encore le même qui en 2011, pendant la campagne présidentielle reconnaissait dans les colonnes du magazine Têtu que la GPA était « une évolution incontournable » à condition « qu’elle soit encadrée ».

Selon un sondage Opinion Way paru le 2 juillet, pour 65% des Français, une retranscription à l’état civil des naissances à l’étranger par GPA ouvrirait la voie à une légalisation.

 

 

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