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“La guerre, c’est pas du cinéma”

On connaît Jean Gabin, l’acteur mais on en sait moins sur Jean Moncorgé, le soldat de la Seconde Guerre Mondiale. Une exposition permet de découvrir cette facette de l’acteur.

Lorsque la guerre éclate, Jean Gabin est une star connue et reconnue notamment grâce à son rôle dans « Le Quai des Brumes » de Marcel Carné. La France battue, pour ne pas être contraint de jouer dans des films placés sous le contrôle des Allemands – « les nazis ont fait des ponts d’or à Gabin » racontait Simone Signoret - Jean Gabin choisit de rejoindre les Etats-Unis en février 1941. De l’autre côté de l’Atlantique, l’oisiveté n’est pas faite pour lui. Il ne veut pas être un « planqué ». Après avoir tourné quelques films à Hollywood, et alors qu’il partage la vie de Marlène Dietrich, Jean Gabin prend, en 1943, la décision de s’engager dans la Marine nationale. « Des gars se faisaient tuer pour nos pommes, et on était plutôt peinards. Je ne supportais pas ça » ronchonnait alors l’acteur. A Londres, le cabinet du général De Gaulle lui enjoint de tourner avant de partir un film de propagande, « l’imposteur » de Julien Duvivier. Une fois sa mission accomplie, Jean Gabin cède la place au fusilier-marin Jean Moncorgé qui prend la mer en 1944, direction Alger ; et subit son baptême du feu devant les côtes africaines. Il est ensuite promu instructeur des fusiliers-marins. Placé sous ses ordres, l’acteur Roland Lesaffre dira de lui : « quel chic bonhomme ! ».

En avril 44, un régiment blindé de fusiliers-marins est créé au sein de la 2ème DB du général Leclerc. Le voilà maintenant chef de char. A bord de son « Souffleur II », celui qui avait dit avant de partir en Amérique à qui voulait l’entendre : « je reviendrai, parce que moi, la France, je ne peux pas m’en passer » combat à Royan pour réduire une poche de résistance allemande mais aussi en Moselle. Il ira même jusqu’à Berchtesgaden, le nid d’aigle d’Hitler. « Il était comme nous, avec la peur et la claustrophobie » témoigne un de ses camarades de régiment.

La guerre finie, le second-maître Moncorgé est décoré de la médaille militaire et de la croix de guerre. Pour le défilé de la victoire, il refusera de descendre les Champs-Elysées à bord de son char. Il ne voulait pas que les Français applaudissent Jean Gabin. Seul comptait alors le soldat Jean Moncorgé qui regardera cela discrètement d’un balcon. De ces années, il n’en parlera que peu – « Moi, j’ai su tout cela après, raconte son fils. A la maison, on ne parlait pas de ça ». Il refusera aussi de porter l’uniforme pour un film : « La guerre ce n’est pas du cinéma ». C’est justement le titre de l’intéressante exposition qui se tient jusqu’au 5 novembre, dans la Manche, à Carentan, au Normandy Victory Museum en association avec le musée Jean Gabin de Mériel et le musée des Blindés de Saumur. L’exposition présente sur plus de 200 m2, des dizaines d’objets personnels datant de cette époque mais aussi quelques pièces issues de film évoquant la période (notamment la veste portée pendant la « Traversée de Paris »), des photos, des archives inédites, des ressources audiovisuelles… ainsi qu’un char Tank Destroyer M10 identique au « Souffleur II » dirigé par le second maître Moncorgé à la fin de la guerre. 


L’exposition est visible au Normandy Victory Museum, Parc d’activités La Fourchette, Catz, 50500 Carentan-les-Marais - https://normandy-victory-museum.fr/expo-jean-gabin

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