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L’avenir électrique de la mer du Nord

Un mini sommet a réuni à Ostende (Belgique) 7 pays européens et deux pays tiers pour accélérer le développement des éoliennes en mer du Nord et en faire une vaste centrale « verte ».

“Le potentiel de la mer du Nord en matière d’énergie éolienne en mer est énorme. Il s’agit de la meilleure qualité d’énergie éolienne offshore au monde. Et le potentiel dont nous disposons est suffisant pour multiplier par six la demande actuelle d’électricité en Europe” déclare avec enthousiasme, Fatih Birol, directeur de l’Agence internationale de l’énergie présent à Ostende sur la côte belge. Aujourd’hui la zone produit 30 gigawatts d’électricité et l’objectif est de passer à 120 gigawatts d’ici 2030 et 300 gigawatts d’ici 2050. « La barre [est] placée très haut » a reconnu le Premier ministre belge, Alexander De Croo, puissance invitante de ce mini sommet de la mer du Nord, le 2ème du genre. La première édition n’avait réuni que quatre pays. Avec la guerre en Ukraine, ils sont cette année neuf : sept Etats membres de l’Union européenne (Belgique, France, Allemagne, Pays-Bas, Danemark, Irlande et Luxembourg – « virtuellement côtier ») et deux Etats tiers, le Royaume-Uni et la Norvège. Ensemble, à Ostende, ce club de la mer du Nord a réfléchi au moyen de quadrupler les capacités de l’éolien offshore en Europe.

« Le sujet principal ici n’est pas tant les nouveaux engagements. Il s’agit plutôt de savoir comment passer à l’action. Et cela signifie que nous devons normaliser, mieux travailler ensemble, mieux synchroniser les chaînes d’approvisionnement » a insisté le Premier ministre belge. « L’important, c’est désormais la vitesse d’exécution et le passage de l’innovation à l’action ». L’objectif est bien de simplifier les procédures pour permettre aux industriels en attente d’intervenir. C’est aussi l’ambition du Net Zero Industry Act, un plan d’action mis en place par la commission européenne en mars dernier et qui vise à renforcer l’industrie européenne en facilitant l’obtention des permis et à encourager les recrutements et les formations. Face aux pressions chinoises et américaines, l’objectif est bien celui de la souveraineté énergétique européenne et aussi de sortir de la dépendance des énergies fossiles russes. L’Europe, selon ses projections, ambitionne 42,5 % d’énergie renouvelable à l’horizon 2030. Aussi, pour le président Macron, l’accord signé à Ostende « signifie la capacité à produire tous ensemble de l’énergie décarbonée avec ce grand plan d’éolien offshore que nous annonçons et auquel nous contribuerons tous. Ensuite, il signifie notre volonté aussi de bâtir une filière qui produit justement ces fermes éolienne offshore en Europe ». « Nous voulons une industrie européenne pour produire » éoliennes et infrastructures, « et ne pas répliquer les erreurs que nous avons pu faire » a précisé le président français songeant à la dépendance européenne vis-à-vis des composants et matériaux chinois nécessaires aux photovoltaïques.

A Ostende, cent vingt industriels du secteur étaient présents dont plusieurs entreprises françaises comme Alstom, Eiffage ou Engie. Pour ces sociétés, l’enjeu est de taille. Le développement de l’éolien offshore représenterait 170 000 emplois d’ici à 2030. Et si l’objectif de 2050 est maintenu, on parle d’un investissement de l’ordre de 800 milliards d’euros. Mais c’est bien cet objectif de 2050 qui pose question. Pour l’atteindre, les experts du secteur estiment que les capacités de production devront doubler voire tripler, ce qui au regard de ce qui se fait aujourd’hui n’est pas gagné. Le Royaume-Uni, premier producteur européen produit 16 gigawatts d’éolien en mer, l’Allemagne 8 gigawatts et la France, 0,5 gigawatt. Mais en France, l’exécutif n’a aucun doute sur le fait que l’on atteindra une capacité de production de 40 gigawatts d’éolien offshore d’ici 2050 grâce au développement de la cinquantaine de parcs posés ou flottants annoncés en Méditerranée, dans la Manche, en Atlantique nord et sud. Le premier parc a été inauguré à Saint-Nazaire en 2022 et d’autres sont en construction. D’ici quelques mois, les débats publics seront lancés. Mais déjà des ONG environnementales s’inquiètent des effets sur la biodiversité marine et demandent des études d’impact. Autre sujet qui n’est que très discrètement abordé, celui de la sécurisation des sites face aux attaques terroristes ou d’Etat tiers hostiles. 

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