Print this page

“Qatargate” : un début de réponse au Parlement européen

Roberta Metsola, la présidente du Parlement européen a fait plusieurs propositions dans la lutte contre le lobbying et pour une plus grande transparence.

Mieux lutter contre les conflits d’intérêts et l’ingérence de pays étrangers. La présidente du Parlement européen a voulu frapper vite et fort quelques semaines seulement après les révélations autour du scandale de corruption du Qatargate dans lequel plusieurs eurodéputés et membres des institutions européennes ont été mis en cause et pour certains comme l’ex-vice-présidente Eva Kaili incarcérée. Le 14 janvier dernier, Roberta Metsola a présenté aux présidents des groupes politiques du Parlement européen un plan en quatorze points censé venir compléter le code de conduite déjà existant mais pas vraiment contractuel et pas forcément appliqué. Ces mesures doivent permettre de « rétablir la confiance avec les citoyens européens que nous représentons » et qui, « à juste titre, exigent responsabilité et intégrité ».

Parmi les quatorze propositions, la fin des groupes d’amitié entre eurodéputés et pays étrangers qui permettent souvent à ces pays de faire de l’entrisme au sein des institutions européennes en finançant ces groupes et parfois même les eurodéputés. Ces groupes d’amitié ne font l’objet d’aucun contrôle et fonctionnent en dehors de tout cadre. Dans son document, Roberta Metsola propose également une formation obligatoire aux règles financières et au code de conduite à destination des eurodéputés et de leurs assistants.

Une mesure vise encore à contraindre les parlementaires européens à déclarer leur rendez-vous à partir du moment où ils portent sur un texte législatif. Une mesure qui existe déjà mais qui ne concerne aujourd’hui que les présidents de commissions et les rapporteurs et seulement s’il s’agit d’une rencontre avec un représentant d’un pays étranger. Un assistant parlementaire serait chargé du contrôle de ces règles et pourrait le cas échéant jouer le rôle de « lanceur d’alerte ». Les eurodéputés devront à en croire la note de la président du PE déclarer aussi leurs voyages à l’étranger et dire par qui ils sont financés, mesure qui existe déjà mais qui est peu respectée (L’eurodéputé belge Marc Tarabella a reconnu par la voix de son avocat avoir effectué un voyage au Qatar en 2020 non déclaré aux autorités compétentes. Même aveu et « oubli » de l’eurodéputée belge Marie Arena).

Il serait également demandé aux eurodéputés de déclarer de manière systématique les fonctions qu’ils exercent hors de leur mandat parlementaire et susceptibles de créer des conflits d’intérêts comme le fait de participer à des conseils d’administration de grandes entreprises ou le fait d’être avocat d’affaires... Pour les eurodéputés nommés rapporteur ou rapporteur fictif sur un dossier, ils auront obligation de déclarer tout conflit d’intérêts.

Une fois leur mandat achevé, la présidente du Parlement souhaite qu’il leur soit interdit d’exercer de mission de lobbying pendant une durée « de transition » qui reste encore sujet à discussion, on parle de douze mois. Se pose en parallèle la question du badge d’accès permanent dont jouissent les anciens députés européens et avec lequel ils peuvent faire accréditer dix personnes sans aucun contrôle. Roberta Metsola voudrait un badge renouvelable quotidiennement.

Si les mesures plutôt floues semblent faire consensus, certains groupes politiques exigent d’aller plus loin et vont faire leurs propres propositions. Le groupe Renew veut la création d’une haute autorité européenne pour la transparence qui pourrait ressembler à la HATVP française. Cette nouvelle entité aurait pour mission de contrôler les parlementaires mais également les hauts fonctionnaires de la Commission et du Conseil. « On ne peut pas se contenter de contrôler les parlementaires par des gens payés par le Parlement. Il faut un organisme spécialisé, indépendant » explique-t-on du côté de Renew. Mais sur ce point, le Parlement ne peut pas faire seul, la Commission européenne devra se saisir également du sujet pour présenter un texte. Ce qui ne pourrait se faire avant deux ans. En résumé, il ne se passera rien avant les européennes de mai 2024. 

300 K2_VIEWS