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Les atteintes à la probité à la loupe

Pour la première fois, le service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) publie conjointement avec l’Agence française anticorruption (AFA), une étude portant sur les atteintes à la probité*

Selon l’enquête Cadre de vie et sécurité (CVS), 354 000 personnes (soit 0,7 % des personnes âgées de 14 ans ou plus) déclarent avoir été confrontées à une situation de corruption dans le milieu professionnel ou personnel en 2020. Mais c’est essentiellement dans le milieu professionnel que le risque de corruption est le plus élevé. Ce sont ainsi 316 000 personnes qui ont été confrontées à la corruption dans le cadre professionnel, « principalement à travers la proposition d’un pot de vin ou d’un cadeau ». Pour 43 % des cas de corruption dans le milieu professionnel, l’objectif était d’obtenir un service (une place en crèche par exemple). « Dans 39 % des cas, l’auteur de la corruption est un particulier » ajoute le SSMSI. « Les rétributions proposées sont majoritairement sous forme d’argent ». « Pourtant, poursuit le service du Ministère de l’Intérieur, dans les procédures clôturées en 2020, un peu moins de 1200 personnes physiques victimes d’infractions d’atteinte à la probité ont été enregistrées par la police et la gendarmerie et 800 en 2021 ». « Entre 2016 et 2021, elles ont augmenté de 28 %, soit en moyenne de 5 % par an » précise la note du SSMSI. Ces atteintes regroupent les infractions de corruption (29 %), de trafic d’influence, de prise illégale d’intérêts (18 %), de détournement de fonds publics (24 %), de favoritisme et de concussion. La hausse des atteintes à la probité est notamment liée à celles des infractions de corruption (+46 % sur la période), qui représentent près d’un tiers des atteintes à la probité. Dans 68 % des cas, il s’agit de corruption publique. La corruption active (17 %) est un peu plus souvent constatée que la corruption passive (12 %). D’autres infractions sont souvent commises concomitamment à une infraction liée à des atteintes à la probité : la moitié de ces infractions connexes relève de la fraude ou de la tromperie. La corruption est beaucoup plus présente dans le secteur public que dans le secteur privé. « Elle représente un peu plus des deux-tiers des infractions de corruption. En utilisant uniquement le libellé des natures d’infractions enregistrées par les forces de sécurité, près de 57 % des infractions de prise illégale d’intérêts enregistrées ont été commises par des élus » souligne la note. Les infractions de recel se concentrent principalement sur des infractions de détournement de fonds publics (34 %), de favoritisme (29 %) et de prise illégale d’intérêts (24 %).

Ces atteintes sont concentrées dans les agglomérations de tailles moyennes mais leur répartition géographique est différenciée selon les territoires. La Corse et les départements ultramarins sont en moyenne plus particulièrement concernés par les atteintes à la probité rapportées à la population que le reste de la France. Les collectivités d’Outre-mer sont principalement concernées par les détournements de fonds publics. La Corse du Sud et la Haute Corse comptabilisent plus de 6 infractions en moyenne par an pour 100 000 habitants entre 2016 et 2021. Les 5 départements et régions d’Outre-Mer comptabilisent pour leur part entre 2,1 et 4 infractions en moyenne pour 100 000 habitants. Quant à Paris, on y dénombre 2 infractions en moyenne pour 100 000 habitants.

Les mis en cause sont avant tout des personnes physiques alors que la moitié des victimes sont des personnes morales. Les hommes sont prédominants, aussi bien parmi les victimes que parmi les mis en cause. Les mis en cause pour des infractions d’atteinte à la probité sont en moyenne plus âgés que l’ensemble des mis en cause, toutes infractions confondues. Ils ont majoritairement entre 45 et 54 ans et 95 % d’entre eux sont de nationalité française.

Cette publication du SSMSI et de l’AFA s’inscrit dans les objectifs du plan national pluriannuel de lutte contre la corruption, (PNPLC) 2020 à 2022 (Axe 1 : « Mieux connaître et détecter la corruption en optimisant l’exploitation des données »). Ce plan prévoit notamment de « renforcer la collecte et l’ouverture des données relatives aux phénomènes de corruption et de enforcer l’exploitation de ces données en mettant à profit le data mining (exploration des données) »


*Les atteintes à la probités enregistrées par la police et la gendarmerie depuis 2016 - Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) - Interstats Analyse n°50, paru le 27 octobre 2022

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