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Festivals, concerts et JO 2024 : la fête est finie ?

Avec les Jeux Olympiques de 2024, les forces de l’ordre vont être fortement mobilisées. Aussi pour éviter tout problème, le ministre de l’Intérieur entend faire annuler ou reporter les grands événement sportifs et culturels pendant la compétition.

Au détour d’une longue tirade sur la situation sécuritaire des jeux olympiques, les propos du ministre de l’Intérieur au Sénat le 25 octobre dernier envisageant « l’annulation ou le report de tous les grands événements sportifs ou culturels mobilisant de nombreuses forces de police et de gendarmerie » pendant cette période des Olympiades résonnent encore aux oreilles des professionnels du monde de la culture et aux élus de villes concernées. Un report ou une annulation qui tombent comme un couperet pour de très nombreux événements déjà bien essorés par la période de pandémie que la France a traversé. Selon le « principe » édicté par le ministre Gérald Darmanin exit donc le Tour de France, les Eurockéennes, le Festival d’Avignon, les Vieilles charrues, Solidays, les concerts de stars françaises et internationales sur de grandes scènes… Et même si le ministre avait pris soin de préciser qu’on « ne va pas annuler tous les événements », le doute et l’inquiétude persistent. « Un travail est en cours pour recenser les difficultés qui se posent, en raison de l’ampleur des moyens nécessaires pour les JO et les jeux para-Olympiques » a immédiatement cherché à temporiser le ministère de la culture face à la polémique qui gonflait. « Un concertation avec les acteurs aura lieu pour voir comment concilier les besoins des jeux avec ces événements estivaux qui font partie de l’ADN culturel de la France. Ils sont très attendus par les publics et moteur de l’économie locale » a encore ajouté Rima Abdul-Malak, la ministre de la culture.

Le 20 octobre dernier déjà, la préfecture de police de Paris avertissait les organisateurs d’événements parisiens « qu’en 2024, à l’approche des JO, pendant ceux-ci et à l’automne » « de lourdes contraintes vont peser sur le préfecture de police » moyennant quoi « nous n’accorderons, sauf exception liée aux JO, aucune autorisation de manifestation, ni d’occupation de voie publique, ni ne mettrons par là même en place de service d’ordre. Les policiers et gendarmes habituellement à vos côtés seront exclusivement dédiés à la sécurisation des Jeux » écrivait le préfet de police Laurent Nunez aux producteurs de festivals et concerts juste avant de les remercier de leur « compréhension ». Une docilité qui ne semble pas de mise. « Après les attentats de 2015, nous avons subi les grèves, les gilets jaunes, la pandémie, la crise d l’après-covid avec un embouteillage de concerts en 2022 et 2023. Et nous sommes censés accepter une nouvelle vague d’interdiction de spectacles en 2024 pendant les quatre mois où nous réalisons 50 % de notre chiffre d’affaires » s’énerve dans Le Figaro Olivier Darbois, organisateur des concerts de Juliette Armanet et de Radio Head.

Pour autant, si dans la Capitale, le manque d’anticipation et de plan B sont flagrants aux yeux des organisateurs qui fustigent notamment l’inertie de la maire de Paris, l’inquiétude est grande aussi en Province : Près de 22 villes vont en effet accueillir des épreuves olympiques et verront forcément les autres événements touchés. Pour beaucoup de festivals, les invitations d’artistes de renom pour 2024 sont déjà lancées. Que va-t-il alors se passer en cas d’annulation s’interrogent les organisateurs inquiets qui n’hésitent pas à rappeler le coût et surtout l’apport économique d’un spectacle localement. « Les Eurockéennes ce sont plus de 130 000 festivaliers et 13 millions d’euros de retombées économiques pour notre territoire » souligne justement Cédric Perrin, le sénateur du Territoire de Belfort et vice-président des Eurockéennes.

Ce sénateur LR n’a pas hésité à dénoncer aussi « la radicalité » des déclarations du ministre de l’Intérieur « qui nous oblige en définitive à faire le choix entre nos fêtes ! ». « Une fois de plus, la culture paye, dans tous les sens du terme, pour des questions de sécurité. Sauf qu’en l’espèce, ce n’est pas pour la sienne. Le plus choquant réside surtout dans la méthode : on annonce des annulations sans même prendre la peine de consulter les acteurs concernés. Cette hyper-centralisation et cette verticalité sont source de tensions et de fractures au sein de la population » a déploré Cédric Perrin, regrettant que le temps d’échange récemment organisé par la ministre de la Culture n’ait apporté aucune réponse, ni solution aux représentants des festivals qui restent suspendus aux retours des études « au cas par cas » des préfets. A ce jour, aucune liste de festivals annulés, reportés ou maintenus n’est connue. 

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