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Guerre en Ukraine et conséquences énergétiques

Dans son dernier rapport annuel, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) évoque les conséquences énergétiques de la guerre en Ukraine. Le climat devrait en sortir gagnant.

Paradoxalement et sans pour autant s’en réjouir, l’enlisement de la guerre en Ukraine pourrait avoir des répercussions bénéfiques sur le développement des énergies renouvelables et sur les marchés de l’énergie. Ainsi, le conflit russo-ukrainien et la crise énergétique qui va avec ont « le potentiel d’accélérer la transition vers un système énergétique plus durable et plus sûr » juge l’Agence internationale de l’énergie dans son rapport annuel 2022. Les marchés de l’énergie et les politiques énergétiques vont être bouleversés « pour les décennies à venir » a notamment souligné Fatih Birtol, le président de l’AIE en présentant peu de jours avant la Conférence mondiale sur le climat COP27 son rapport.

Immanquablement, la guerre va faire baisser la demande en énergies fossiles tandis que les politiques en faveur des énergies renouvelables vont s’accélérer. Des « changements structurels » vont intervenir dans les années à venir. Plusieurs pays ont déjà pris le virage du changement comme les Etats-Unis avec la loi sur la réduction de l’inflation ou l’Union européenne avec Fit for 55 et REPowerEU. La Chine, l’Inde, le Japon (« Transformation verte »), la Corée du Sud ne sont pas en reste. D’ici 2030, les investissements mondiaux dans les énergies propres devraient connaître une hausse de plus de 2000 milliards de dollars par an a calculé l’AIE dans l’un de ses scénarios. Cela représente une hausse de plus de 50 % en huit ans. Mais il faudrait monter à 4 000 milliards de dollars pour remplir les conditions du scénario prévoyant zéro émission nette en 2050.

Toutefois et même si le développement des énergies renouvelable associées au nucléaire va être exponentiel, le pic des émissions mondiales de CO2 sera atteint en 2025 estime l’AIE, avec un plafond à 37 milliards de tonnes avant de redescendre à 32 milliards de tonnes en 2030.

Dans ce scénario médian de l’Agence, l’usage du charbon reparti à la hausse du fait d’une forte demande en énergie, ne serait que « temporaire » et diminuerait même au cours des prochaines années. A noter encore que le développement des ventes de voitures électriques provoquerait de facto une stabilisation de la demande de pétrole dans le milieu des années 2030 pour ensuite continuer à baisser. Pour l’AIE, il ne fait donc aucun doute, du moins dans ce scénario, que la demande d’énergies fossiles est vouée à diminuer entre 2030 et 2050. La part de combustibles fossiles dans le bouquet énergétique mondial devrait passer de 80 % aujourd’hui à 60 % en 2050 écrit l’Agence internationale de l’énergie.

Pour autant, l’avenir n’est pas tout rose. Si les émissions de CO2 diminueront lentement après un pic qui devrait être atteint en 2025, les températures ne cesseront pas pour autant d’augmenter avec une hausse annoncée d’environ 2,5° d’ici 2100. On est loin des 1,5°C C ou 2°C édictés dans les Accords de Paris. Une inquiétude sur « des conséquences climatiques sévères » partagée par l’ONU Climat, l’agence onusienne chargée du climat, qui explique que si l’on voulait répondre à l’objectif d’une hausse limitée à 1,5°C, les émissions mondiales de CO2 devraient baisser de 45 % d’ici 2030 par rapport à 2010. Or, aujourd’hui on parle plutôt d’une augmentation de 10,6 % des émissions de CO2.

Pour l’AIE, il importe donc de poursuivre et même d’intensifier les investissements mondiaux dans les énergies renouvelables. « Des efforts internationaux majeurs sont demandés pour combler le fossé inquiétant qui se creuse entre les économies avancées et celles des pays émergents ou en développement » insiste l’Agence.

Avec la guerre en Ukraine et la flambée des prix de l’énergie, ce sont aussi 175 millions de personnes qui pourraient tomber dans la précarité énergétique indique le rapport de l’AIE. « Le nombre de personnes sans électricité devrait augmenter en 2022 pour la première fois depuis des décennies » s’alarme l’Agence internationale de l’énergie qui rappelle que la demande mondiale d’électricité va augmenter de 25 à 30 % d’ici 2030. Et si « dans les économies émergentes et en développement, les ménages les plus pauvres consomment neuf fois moins d’énergie que les plus pauvres, ils consacrent une part bien plus importante de leurs revenus à l’énergie » ajoute-t-elle avec inquiétude appelant les gouvernants à « réajuster leur stratégie en matière de transition énergétique dans les années à venir »

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