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Le volet santé du CNR : extraits du discours de François Braun, Ministre des Solidarités et de la Santé

Le 3 octobre dernier, François Braun, ministre de la Santé et de la Prévention, a lancé le volet Santé du Conseil national de la refondation. Au cours de ces prochaines semaines et jusqu’à la fin de l’année, des ateliers de travail, comme ceux menés au Mans début octobre, seront reproduits sur tout le territoire, métropole et Outre-mer. Citoyens, professionnels, élus et administration plancheront, ensemble, sur les défis à relever pour améliorer l’accès à la santé des Français. Tous les mois, un comité de suivi se réunira, pour surveiller, au plus près, l’avancée de ces différents chantiers. Et le ministre a d’ores et déjà donné rendez-vous en janvier 2023 à l’ensemble des parties prenantes afin d’établir un bilan des travaux du CNR « Santé », en lien avec le conseil national de la refondation, que le président de la République présidera en décembre.

Extraits du discours de François Braun, Ministre des Solidarités et de la Santé en conclusion de la journée de lancement du Conseil national de la refondation (CNR) en santé - 3 octobre 2022

Il faut le dire clairement : l’accès universel à notre système de santé est fragilisé. Le seul et unique but que je poursuivrai en tant que ministre de la Santé et de la Prévention est de promouvoir l’accès universel à notre système de santé, d’en refonder les bases et d’en assurer la transition vers un système durable que nous laisserons aux générations futures.

Les engagements de nos illustres prédécesseurs, force est de constater aujourd’hui que nous nous en sommes éloignés. Et la situation à laquelle nous faisons face aujourd’hui n’est pas acceptable à bien des égards.

[… ] l’heure est à la recherche de solutions pour refonder notre système de santé.

Trouver des solutions concrètes avec l’ensemble des parties prenantes, en mobilisant toutes nos forces dans tous nos territoires, c’est l’esprit du Conseil national de la refondation que le président de la République a lancé le 8 septembre dernier à Marcoussis.

[… ] Nos besoins, quels sont-ils ? Ce sont les besoins de nos concitoyens, de leurs familles et aidants, je l’ai dit. Ce sont en miroir les besoins de nos professionnels. Si nous ne prenons pas soin simultanément des Français et de ceux qui les soignent, nous passerons à côté de notre ambition.

Je veux que le métier de soignant continue de faire rêver les plus jeunes, qu’il suscite des vocations, qu’il donne envie aux personnels épuisés de revenir à l’hôpital. Je le dis, pour moi, c’est le plus beau métier du monde, celui où la vérité n’est pas travestie, celui où les actes importent autant que les paroles, celui du réel, du concret, de la vie, mais aussi de la mort.

Alors, je veux le dire ici solennellement, passons aux actes et mettons notre énergie pour défendre ces métiers : à ce titre, je serai aussi le ministre de la santé de nos professionnels. Managers, soignants, personnel technique, administratif, agents de la logistique, tous exercent leur métier avec engagement, et méritent reconnaissance et honneur comme nos concitoyens nous l’ont prouvé et les applaudissant tous les soirs. Prenons soin de toutes ces femmes et de tous ces hommes.

[… ] Autre principe que je souhaite déterminant, celui de la responsabilité partagée. Face aux défis que je viens de décrire chacun, citoyen, professionnel, élu, Etat et Assurance maladie, a une partie de la solution. Je pourrais aussi dire, chacun a des droits, chacun a des devoirs. Assumons ce principe, simple mais exigeant, dans l’exercice de nos responsabilités respectives.

C’est aussi la raison pour laquelle j’attache une grande importance à ce que les élus soient associés à la recherche de solutions et à leur mise en oeuvre. L’attractivité de tous nos territoires est notre grande cause commune, mesdames et messieurs les élus. Unissons-nous pour donner envie à nos jeunes professionnels de rejoindre vos territoires. Je suis sûr que nous n’avons pas encore exploré toutes les solutions.

Vous l’avez compris, le CNR c’est une méthode et des principes directeurs. Mais c’est surtout une dynamique pour donner à l’échelon local, comme à l’échelon national, de nouveaux outils pour accélérer, débloquer, innover.

[… ] Je souhaite que dans le cadre du CNR nous repoussions les frontières.

Dans le domaine de l’accès à la santé, je souhaite que nous « percutions la ligne » pour faire les percées que nous attendons depuis trop longtemps. [… ]

D’abord sur les inégalités territoriales ou ce que l’on a désormais coutume d’appeler les déserts médicaux. Je le redis et je l’assume : je ne serai pas le ministre des promesses inconsidérées, car il n’existe pas de solution miracle. Nous devrons attendre encore une dizaine d’années avant que les bénéfices de la fin du numerus clausus, mesure historique prise à l’initiative du président de la République après des années et des années de régulation aveugle de notre démographie médicale, ne nous permettent d’inverser la tendance.

Mais je ne me résigne pas pour autant. Je l’ai dit, je veux que chaque Français d’ici la fin du quinquennat, trouve, s’il le souhaite, un médecin traitant ; en particulier les plus fragiles d’entre eux. [… ]

Nous devons mobiliser tous les leviers existants pour trouver du temps médical et augmenter l’attractivité des territoires. [… ]

Redonner de l’espoir aux Français sur l’accès à la santé, c’est aussi faire jouer la solidarité des autres territoires avec ces déserts. Je l’ai dit, dans ce CNR santé, nous devons rester lucides : nous devrons faire avec les ressources que nous avons. Si chaque médecin donne un peu de temps au service des territoires fragilisés, nous pouvons redonner accès à la santé à nos concitoyens.

Des consultations avancées de spécialistes, de médecins généralistes, remplacés si besoin dans leur territoire d’origine quelques jours par an y compris par un docteur junior, des systèmes de recours par téléconsultations … voici autant de leviers que je souhaite soutenir et inciter. L’Etat ne pourra pas tout, les collectivités territoriales seront un partenaire précieux pour créer un environnement favorable à ces initiatives. [… ]

[… ] Je veux également que nous accélérions et franchissions de nouvelles étapes dans le champ de la prévention. Si nous voulons traiter le scandale des écarts d’espérance de vie, [… ] il nous faut modifier la manière de conduire notre politique de santé.

Avoir le souci permanent de rapprocher nos concitoyens du système de santé notamment ceux qui en sont le plus éloignés.

Avoir l’ambition de faire entrer la santé dans les réflexes quotidiens : la pratique de l’activité physique et sportive ; le bien manger à chaque âge ; le bien dormir ; une santé mentale de bonne qualité et dès le plus jeune âge ; une hygiène buccodentaire exemplaire ; une inclusion sociale forte, élément indispensable au mieux-vivre ensemble, dès l’école, où je souhaite que nous renforcions les compétences psychosociales des plus jeunes de nos concitoyens.

Saisir toutes les occasions d’organiser des temps de prévention à tous les âges et dans tous les lieux de vie : à l’école, donc ; à l’université ; au travail. Si j’en fais une priorité du CNR Santé c’est là encore que je suis convaincu que c’est par une alliance entre l’ensemble des acteurs que nous parviendrons à changer la donne. [… ]

[… ] la prévention est un chantier qui se portera au niveau territorial, car je suis convaincu que c’est le meilleur moyen de trouver des solutions qui entrent dans le quotidien des Français, en particulier avec l’appui des collectivités territoriales. Mais je crois aussi que certaines clés sont au niveau national, et c’est la raison pour laquelle nous accompagnerons ce pacte, afin de nous donner les moyens de ce changement en profondeur. [… ]

Le troisième chantier que je souhaite mener est celui de l’attractivité des métiers. [… ] le premier enjeu que nous rencontrons est celui des ressources humaines. De ces professionnels, si précieux, qui soignent, qui accompagnent, qui organisent, qui font vivre notre système de santé, en passant leur vie à prendre soin des autres. Ces ressources nous manquent, malgré tous les efforts réalisés pour revaloriser les carrières et les rendre attractives, et je sais que c’est la principale source d’inquiétude de beaucoup d’entre vous ici.

À ce sujet, il nous faut continuer de revoir l’ensemble du système, depuis la détection des potentiels, leur accompagnement, en passant par la formation (initiale et continue), la professionnalisation, les carrières, les diversités d’exercice. Notre ambition est de transformer les métiers, et construire de nouveaux cadres d’exercice. Nous devons augmenter rapidement les ressources humaines disponibles en quantité et poursuivre nos avancées pour renforcer leurs compétences. Nous avons déjà de nombreux outils qu’il nous faut collectivement mobiliser sur les territoires.

Avec la Première ministre et mes collègues des autres ministères, nous poursuivrons la rénovation des formations initiales pour attirer des soignants dès la sortie du secondaire : nous nous assurerons que les 13 500 places créées dans les instituts de formation par le précédent Gouvernement se déploient conformément au calendrier convenu, et nous rouvrirons la discussion, en particulier avec les Régions, sur la nouvelle cible qu’il conviendrait d’atteindre pour répondre aux besoins de demain. Il nous faut un véritable choc quantitatif, et une mobilisation nationale.

Le contenu des formations, leur déroulé en donnant toujours plus de place à la simulation en santé, doivent aussi être revus pour mieux répondre aux réalités du terrain, aux exigences de travail pluriprofessionnel et éviter l’arrêt des études (dont je parlais tout à l’heure). C’est aussi un choc, qualitatif, indispensable.

[… ] Enfin, le quatrième chantier que je souhaite porter au niveau national est celui du « mieux vivre à l’hôpital ». Il faut ré-enchanter l’hôpital, c’est certes le lieu de la maladie, mais aussi celui de la guérison. Celui, parfois, de la solitude mais aussi celui du réconfort et de la chaleur humaine. Celui des émotions professionnelles les plus difficiles, mais aussi celui de la solidarité et du travail en équipe. Créons les conditions pour que les soignants actuellement en exercice retrouvent le sens de leur formidable engagement, pour que les jeunes se sentent accueillis, et bien accueillis, dès la première heure de leurs études en santé, dès le premier jour de leurs stages. Qu’ils aient envie de rejoindre les établissements de santé et que les plus expérimentés aient envie d’y rester.

Pour cela, je ne crois pas que la priorité soit à une énième réforme de la gouvernance. Beaucoup de choses ont déjà été engagées avec la mission du Pr Olivier Claris, et nous devons les mettre en oeuvre, partout, dans de bonnes conditions. [… ]

J’ai également conscience que si nous ne préparons pas suffisamment l’avenir, comme cela a été malheureusement le cas pour la démographie médicale ces trente dernières années, nous porterons la responsabilité des futures impasses. C’est pourquoi j’ouvrirai trois chantiers de prospective sur lesquels j’attendrai de premières conclusions mi-2023 :

Le premier concerne la préparation de notre système à la transition écologique : c’est une des priorités que le président de la République et la Première ministre ont données au Gouvernement, c’est aussi et surtout une urgence pour les générations futures. [… ]

Le deuxième défi concerne l’évolution de long terme des métiers de soignant, et la manière dont nous projetons les besoins démographiques pour les 20, 30 prochaines années, y compris en tenant compte des évolutions qui traversent le monde de la santé, comme elles traversent la société dans son ensemble.

Le troisième défi concerne les leviers de la soutenabilité financière de notre système de santé. Il ne nous est pas possible de considérer que l’horizon est sans limite, en termes de financement, et nous savons que le vieillissement de la population constituera un choc pour notre système social dans son entier. Ce serait irresponsable pour les générations futures de ne pas prévoir cela, et mettrait en danger nos capacités de réponse aux besoins de santé de nos concitoyens. Pour réconcilier ces enjeux, nous devons poursuivre notre investissement sur la santé, tout en trouvant la voie d’une performance que je considère moi porteuse de valeur positive, car elle est aussi la voie de la qualité et de la sécurité des soins. Je crois que nous sommes capables d’y parvenir, ensemble !

Sur ces trois chantiers, nous constituerons des « groupes de travail ». Et fidèles à la méthode du CNR Santé, nous mettrons autour de la table des citoyens, des professionnels de santé, des élus et des représentants de l’Etat pour imaginer les meilleures solutions. [… ] 

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