Partant du constat qu’une partie de la population française renonçait à certains actes médicaux, ce dispositif s’articule autour de trois catégories de soins : l’audition, l’optique et les soins dentaires. L’objectif étant de proposer des paniers de soins pris en charge à 100 % par la Sécurité sociale et par les assurances complémentaires santé. Mise en place à partir de 2019, cette réforme a été progressivement complétée en 2020 et 2021 et est maintenant pleinement déployée.
Plutôt favorable à ce dispositif, la Commission des affaires sociales avait toutefois alerté sur la nécessité de réaliser une évaluation solide durant les premières années de sa mise en œuvre. Dans cette optique, la Cour des Comptes a été missionnée afin de procéder à une première évaluation de cette réforme. Le 27 juillet dernier, j’ai présenté un rapport, au nom de la commission des affaires sociales, suite à l’audition de la Cour des Comptes.
Le premier constat fait état d’une méconnaissance de ce dispositif chez nos compatriotes. Cette tendance est amplifiée chez les populations les plus fragiles alors même que ce dispositif leur est adressé en priorité. La récente pandémie et les confinements successifs ont probablement été des freins à la diffusion de cette avancée auprès du grand public. Il conviendra donc de faire un point d’étape à la suite du retour à la normale de la situation sanitaire.
En matière de méthodologie, l’évaluation de la réforme reste largement perfectible. Si le suivi des secteurs optique et auditif est chapoté par le Ministère des Solidarités et de la Santé, le suivi du secteur dentaire relève, quant à lui, de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et des Syndicats de chirurgiens-dentistes. Les méthodes utilisées ne sont pas les mêmes et constituent une première limite à une évaluation objective du dispositif.
Une réforme de santé efficiente est une réforme appliquée par les professionnels santé. Or, on constate, en particulier dans les domaines de l’optique et de l’audioprothèse, que les offres 100 % santé sont parfois insuffisamment présentées. Il faudra à l’avenir davantage de pédagogie afin de mieux faire connaître le dispositif et, si nécessaire, davantage de sanctions pour les professionnels ne respectant pas leurs obligations.
Lors du PLFSS 2021, il a été instauré un tiers-payant par les complémentaires santé pour les biens des paniers 100 % santé. Force est de constater que le tiers payant est peu utilisé dans ces cas de figures en raison d’un certain nombre d’obstacles qu’il faudra lever à l’avenir.
Dans certains cas, le panier 100 % Santé ne permet pas de couvrir l’intégralité des coûts. C’est notamment le cas pour certaines audioprothèses ou pour des corrections de verres importantes. Ces exceptions contredisent la volonté initiale de la réforme et nécessitent une évolution de leur prise en charge.
Au-delà de la communication, nous constatons également que cette réforme n’est réellement efficiente que pour les assurés couverts par une complémentaire solidaire. En outre, il apparaît que le coût engendré pour les organismes complémentaires s’avère plus élevé qu’initialement prévu. À terme, cela pourrait amener à une augmentation des primes ou une révision à la baisse de la prise en charge. Ces conséquences hypothétiques impacteraient profondément les populations fragiles qui ne bénéficient pas de la complémentaire santé solidaire et compromettraient grandement la pérennité de la réforme 100 % Santé.
Alors même que des pistes de réflexion sont à l’étude afin d’étendre la réforme du 100 % Santé à de nouveaux secteurs (prothèses capillaires, semelles orthopédiques et orthodontie), il apparaît fondamental de corriger dès à présent les limites constatées, près de trois ans après la réforme 100 % Santé. Le Sénat, fidèle à sa tradition et à son histoire, saura être force de propositions et continuer à suivre les promesses faites à travers le 100 % Santé. ■