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Une France plus attractive, une industrie de santé plus forte, telles sont les clés de la résilience française

Par Thierry Hulot, Président du LEEM

L’activité industrielle pharmaceutique constitue une véritable richesse pour l’économie nationale et régionale : 150 métiers, exercés par plus de 100 000 collaborateurs directs, répartis dans plusieurs centaines d’établissements sur tout le territoire. Mais les efforts d’attractivité réalisés ces dernières années sont aujourd’hui sérieusement compromis par le retour d’une régulation à marche forcée du secteur.

La crise sanitaire que nous traversons a révélé les forces de l’écosystème de santé, notamment au travers de collaborations inédites et d’une mobilisation exceptionnelle des entreprises du médicament, qui sont parvenues en moins d’un an à découvrir les premiers vaccins et à les rendre disponibles dans le monde entier.

Cette crise a également éclairé avec acuité un certain nombre de fragilités et de risques sur lesquelles les entreprises du médicament ont de longue date attiré l’attention : déclin de la compétitivité et de l’attractivité de la France, difficulté croissante des patients à accéder à certaines innovations, recul de la France parmi les grands pays producteurs de médicaments.

Les pouvoirs publics ont envoyé sous le dernier quinquennat des signaux positifs qui témoignent d’une réelle volonté de reprendre le leadership en Europe et dans le monde. Cet objectif ne pourra être atteint sans un changement de régulation du secteur via les lois de financement de la Sécurité sociale.

Dans un contexte conjoncturel difficile (inflation, énergie) et au moment où se préfigure le PLFSS, notre industrie se trouve à la croisée des chemins : ou bien nous savons maintenir le formidable élan donné dans le cadre du Plan santé 2023 (CSIS 2021) pour répondre aux enjeux d’accueil de l’innovation et de réindustrialisation ; ou bien nous redevenons la variable d’ajustement budgétaire du système, ce qui ruinera des années d’effort pour réorienter l’image de la France pour les investissements en santé.

A la lecture du projet de loi de financement de la Sécurité social soumis au Parlement, il est permis de nourrir les pires craintes sur la voie choisie par les pouvoirs publics.

Lors de son discours prononcé à l’occasion de la présentation du plan « Innovation Santé 2030 » (juin 2021), et alors que le secteur de l’industrie pharmaceutique était qualifié de stratégique pour la reconquête de la souveraineté industrielle et sanitaire, le président de la République avait annoncé un taux de croissance pour les produits de santé de 2,4 %, soit 1,7 % pour les médicaments.

Or, à rebours de cet objectif de croissance, ce PLFSS organise une contraction du budget médicament de 3,4 milliards d’euros par rapport aux dépenses réelles nettes qui devraient être constatées fin 2023 (28 milliards d’euros). Alors que la France pratique déjà les prix les plus bas des cinq grands marchés européens et impose aux industriels du médicament la fiscalité spécifique la plus lourde d’Europe, le poids total de la régulation atteindra, hors fiscalité, près de 13 % du chiffre d’affaires net des médicaments remboursés.

Par ailleurs, la demande de mesures d’urgence pour faire face à l’inflation et à l’explosion du prix des intrants et de l’énergie, pourtant portée à la connaissance du Gouvernement par le Leem depuis le mois de mai, est restée sans réponse à ce jour. Or, de nombreuses PME pharmaceutiques produisent désormais à perte, dans la mesure où l’économie du médicament, à prix administrés, ne permet pas de répercuter l’augmentation des prix de revient sur les prix de ventes.

Enfin, ce projet de loi contient des mesures de nature à raréfier l’offre de médicaments tant pour le pharmacien que le patient, à un moment où ces produits sont fortement exposés à des problématiques d’approvisionnement.

Bâti sans aucune concertation avec le secteur, ce projet de loi, s’il était mis en œuvre en l’état, mettrait un coup d’arrêt brutal à la dynamique d’attractivité du pays initiée ces dernières années, et contrarierait radicalement les enseignements de la crise sanitaire, qui avaient conforté l’industrie pharmaceutique en tant que secteur stratégique de sortie de crise, composante essentielle de notre souveraineté industrielle et sanitaire. 

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