A la fin de l’été et après l’épisode de sécheresse que la France a connu, Julien Bayou, secrétaire national d’Europe Ecologie Les Verts ciblait les piscines privées déclarant ne pas être opposé à leur interdiction : « Je ne dis pas non. Je dis que l’enjeu est de réparer les effets du dérèglement climatique, d’en atténuer les effets prochains, et de préparer le pays : il faut un vaste plan d’adaptation ». Et voilà le débat lancé. Jusqu’à Bruxelles. « Interdire les piscines privées ? La question est légitime et il ne faut pas en avoir peur, c’est un sujet de bon sens d’usage collectif des priorités » déclarait à son tour l’eurodéputé Pascal Canfin.

Avec près de 3 millions de bassins aménagés (>10 m2) pour la baignade, la France est le premier marché en Europe et le deuxième marché au monde, derrière les Etats Unis indique la Fédération des professionnels de la piscine et du spa (FPP), soit 1 piscine pour 38 habitants, au même niveau que l’Espagne, qui en compte 1 pour 37 habitants, loin devant l’Allemagne (1 pour 112), l’Italie (1 pour 180) ou le Portugal (1 pour 105). La période de confinement a fait exploser le nombre de piscines avec une augmentation de 16 % par rapport à 2019, « 244 000 piscines ont notamment été construites en 2021, une année record » note la FPP. Et ce n’est pas fini. « La demande s’est stabilisée cette année mais il y a tout de même plus de 260 000 non-détenteurs de piscines qui veulent en faire construire une dans les trois prochaines années » indique Joëlle Pulinx-Challet, déléguée générale de la Fédération des professionnels de la piscine et du spa (FPP)*.

Or pour pouvoir en profiter, ces bassins doivent être bien évidemment pleins. Selon le CIEau, au moment de sa construction un bassin nécessite en moyenne 40 m3 d’eau. Et avec l’évaporation, il faut ajouter 10 à 15 m3 par an. Le CIEau rappelle au passage que la consommation annuelle d’une personne est en moyenne de 50 m3. « L’ensemble des piscines privées ne représentent que 0,12 % de la consommation annuelle d’eau de la France. Et l’utilisation de 15 mètres cubes pour l’entretien de la piscine, chaque été, équivaut à la fabrication de deux paires de chaussures » minimise immédiatement Joëlle Pulinx-Challet. La Fédération insiste aussi sur les efforts accomplis pour réduire la consommation d’eau depuis de nombreuses années : bassins plus petits et moins profonds, couverture limitant l’évaporation et meilleure filtration. L’idée est aussi d’inviter les propriétaires à limiter la vidange intégrale de la piscine même si celle-ci se fait le plus souvent au printemps et rarement en été, période de restriction.

Enfin, la loi interdit le remplissage de sa piscine lorsque la région est en niveau 1 d’alerte sécheresse, sauf si celle-ci est neuve et exige d’être remplie immédiatement. Le contrevenant s’expose à une amende de 1500 euros et jusqu’à 3000 euros en cas de récidives.

Finalement, pour de nombreux spécialistes, la piscine ne représente pas une réelle menace même si tous s’accordent à dire qu’il faut évidemment faire attention à la consommation en réfléchissant à une optimisation des besoins en eau. ■

*D’après l’enquête Décryptis pour la FPP, 15 % des foyers français résidant en maison individuelle possèdent une piscine : 1.47 million de piscines enterrées et 1.48 million de piscines hors sol fixes et supérieures à 10 m2.