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De l’intérêt d’avoir un groupe parlementaire à l’Assemblée

Avoir un groupe parlementaire offre de nombreux avantages et une plus grande visibilité.

Si la proposition de Jean-Luc Mélenchon de créer un groupe parlementaire unique Nupes à l’Assemblée a fait pschitt - les Socialistes, les Ecologistes et les Communistes lui opposant une fin de non-recevoir immédiate -, ce refus n’est pas anodin. Au-delà des dissensions et des divergences d’opinion qui existent entre les différentes composantes de la Nupes, les avantages inhérents et les droits particuliers accordés à un groupe parlementaire peuvent aussi expliquer ce choix. Entre moyens financiers supplémentaires, facilités matérielles accordées, collaborateurs supplémentaires, temps de parole plus important, représentation au Bureau de l’Assemblée, les raisons de vouloir obtenir un groupe parlementaire sont nombreuses.

Les groupes rassemblent des députés selon leurs affinités politiques. Un groupe doit comprendre au moins quinze députés, un seuil qui est passé de 20 à 15 en 1989. Les présidents de groupe siègent à la Conférence des présidents. Les commissions sont composées en proportion de l’importance numérique des groupes.

Combien de groupes ?

Aujourd’hui, selon le décompte de l’Agence France-Presse, la majorité présidentielle forte de 245 sièges pourrait se diviser en trois groupes parlementaires : Renaissance (ex-LREM), MoDem et Horizon. Le premier groupe d’opposition est le RN puisqu’il compte à lui tout seul 89 députés. L’Union des gauches totalisent 137 députés. Quatre groupes pourraient voir le jour : LFI, PS, PCF et Ecologistes. Les LR formeront un groupe d’une soixantaine de députés. Il n’est pas non plus impossible qu’un groupe ultramarin se créé. C’est en tout cas le souhait exprimé par certains élus qui aimeraient voir leurs enjeux mieux représentés. Avec un total de 26 élus ultramarins (La Réunion 7, Guyane 2, Guadeloupe 4, Martinique 4, Mayotte 2, Nouvelle Calédonie 2, Polynésie 3, Saint-Pierre et Miquelon 1, Wallis et Futuna 1), la possibilité de créer un groupe est possible mais pas simple. « La difficulté, c’est que les élus ultramarins devront choisir entre leur groupe politique et le groupe Outre-mer » explique Mikaa Mered, secrétaire général de la chaire Outre-mer à Sciences Po Paris. Et puis « Qui pour présider le groupe ? Qui pour s’exprimer sur tel ou tel texte ? Un élu issu de la Nupes, de la majorité, des régionalistes ? C’est indébrouillable » analyse-t-il.

Lors de la précédente législature, l’Assemblée a connu un nombre record de groupes parlementaires, on en a comptabilisé jusqu’à 10.

Une dotation financière

Chaque groupe parlementaire se voit attribuer une dotation financière par l’Assemblée nationale. Elle varie entre 10 et 12 millions d’euros par an et varie en fonction du nombre de députés inscrits. Un groupe va se voir aussi accorder des facilités matérielles comme des bureaux, des salles de réunion… Il aura aussi droit à des collaborateurs supplémentaires. Les présidents de groupe siègent à la Conférence des présidents qui réunit, outre le Président, les vice-présidents de l’Assemblée, les présidents des commissions permanentes, les rapporteurs généraux de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, le président de la commission des affaires européennes et les présidents des groupes. C’est elle qui prépare l’organisation du travail parlementaire, fixe le calendrier de l’examen et de la discussion des textes. Un président de groupe peut aussi participer à certaines réunion du Bureau de l’Assemblée, la plus haute autorité collégiale de l’Assemblée nationale, qui exerce une compétence générale sur l’organisation et le fonctionnement interne de l’Assemblée.

Le temps de parole est aussi réparti en fonction du nombre de députés inscrits dans le groupe parlementaire. Pour les questions au Gouvernement (QAG), la parité entre la majorité et l’opposition est réalisée sur deux séances, à raison de 15 pour la majorité et 15 pour l’opposition. Une grande différence par rapport aux députés non-inscrits qui ont moins de temps de parole. Ils ne peuvent par exemple poser une question que toutes les huit séances.

Outre les droits dont dispose chaque député dans l’élaboration des lois — droit d’amendement, prises de parole dans l’hémicycle… —, les députés qui appartiennent aux groupes d’opposition et minoritaires bénéficient d’une journée par mois réservée à un ordre du jour fixé par eux. Une fois par session ordinaire, chaque groupe d’opposition ou minoritaire peut obtenir la création d’une commission d’enquête.

La présidence de la Commission des Finances en débat

Si les groupes sont représentés dans les huit commission permanentes proportionnellement au nombre de sièges détenus, la bataille va faire rage pour la présidence de la Commission des Finances traditionnellement dévolue au groupe d’opposition majoritaire, à savoir le RN. Ce qui n’est évidemment pas du goût de tout le monde et surtout pas de la Nupes. Inquiets notamment des possibilités du Rassemblement national de pouvoir présenter un président de commission digne de ce nom, les observateurs échafaudent d’autres possibilités misant sur des alliances inédites lors du vote. Mis en cause sur le professionnalisme de ses élus le président du RN, Jordan Bardella s’en est agacé : « II n’y a pas un technicien, mais plusieurs ». « Il y a, au RN, des députés élus qui connaissent très bien le terrain. On n’est pas des parias » a-t-il ajouté. Et d’enfoncer le clou : « Nous ne sommes pas une sous-opposition, nos élus ne sont pas des sous-citoyens, ils ont le droit au respect des institutions ». Avec des pouvoirs étendus, la Commission des Finances peut notamment demander la levée du secret fiscal pour accéder aux dossiers de particuliers ou d’entreprises ; elle examine aussi le projet de loi de finances du gouvernement avant les débats, celle-ci peut devenir très vite un contre-pouvoir gênant.

La date limité pour constituer un groupe parlementaire et présenter une déclaration signée par l’ensemble de ses membres au Secrétariat général de l’Assemblée est fixée au 28 juin 18 heures. Les groupes ne se déclarant pas d’opposition et qui ne comptent pas l’effectif le plus élevé de l’Assemblée, sont dits « minoritaires »

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