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Une loi de programmation des affaires étrangères pour renforcer la voix de la France dans le monde

Par Anne Genetet, Députée de la 11ème circonscription des Français de l’étranger (49 pays d’Asie, d’Océanie et d’Europe orientale), Membre de la Commission des affaires étrangères

Pour la députée des Français de l’étranger membre de la Commission des affaires étrangères, sa mise en œuvre - précédée d’une revue stratégique - permettrait à la diplomatie française d’échapper au court terme de l’annualité budgétaire pour mieux se projeter sur les priorités de long terme.

Un cap clair fixé par le Président de la République

En cinq ans, l’action volontariste du Président de la République a permis de renforcer le poids de la France à l’international. Depuis 2017, l’Exécutif a multiplié les initiatives pour défendre la souveraineté de l’Europe, établir une nouvelle proximité avec l’Afrique, tenir ses promesses d’aide au développement, placer la transition écologique et son financement au sommet des préoccupations de la communauté internationale, ou encore repousser les menaces sur la paix mondiale au sein du Forum de Paris sur la Paix.

Cependant, la France doit s’adapter au nouveau contexte international caractérisé par le durcissement des rapports de force. Pour reprendre la formule de Sigmar GABRIEL, la France vit dans un monde de “carnivores géopolitiques”. À elle de choisir si elle souhaite “devenir une proie” ou si elle préfère trouver sa juste place et continuer à être un aiguillon pour le monde.

Une ligne directrice a été clairement énoncée par le Président de la République avec des priorités : renforcer la sécurité des Français, protéger les biens communs, faire rayonner le pays, accroître son attractivité et poursuivre le travail de refondation européenne. Cette stratégie repose aussi sur une nouvelle approche qui exige d’être beaucoup plus proactif vis-à-vis des sociétés civiles en s’appuyant notamment sur ce formidable atout que constitue notre diaspora. Près de 3 millions de Français à l’étranger sont en effet nos meilleurs ambassadeurs dans la mondialisation.

Si le paysage géopolitique a changé, les acteurs ont également évolué. Sous l’impulsion de nos diplomates, la politique internationale doit pleinement associer les entreprises, les organisations non gouvernementales, les diasporas, les influenceurs, les communautés locales. C’est absolument essentiel pour être à la fois proactif, agile et efficace dans la compétition mondiale.

Un cadre lisible et évolutif

Dans le nouvel ordre mondial “déseuropéanisé”, caractérisé par la transformation des rapports de force internationaux et l’émergence d’enjeux transversaux structurants, la France doit plus que jamais inscrire sa politique internationale dans le long terme. C’est pourquoi la vision présidentielle doit disposer d’un cadre.

Je propose que l’Exécutif et le Parlement puissent élaborer et adopter une Loi de Programmation des Affaires Étrangères, comme ils le font pour la Défense depuis 1976. Ainsi, l’Exécutif déterminerait les grandes orientations stratégiques tandis que le Parlement en concertation avec l’ensemble des parties prenantes enrichirait le texte tout en déterminant les ressources financières et matérielles que le pays entend consacrer à sa stratégie internationale pour cinq ans. Cela aurait également le mérite d’un vrai débat de fond de la représentation nationale devant les Français concernant les moyens à affecter à la politique internationale.

Nombreuses sont les problématiques méritant d’être mises sur la table : l’universalité du réseau, les outils d’influence dont nous avons besoin, la politique de ressources humaines au regard du recrutement et des compétences utiles à acquérir, l’action et le périmètre des opérateurs d’État, la coordination interministérielle et entre tous les acteurs pour ne plus travailler en silo. Tout cela alors même que les budgets sont limités. Si les précédents Gouvernements n’avaient jamais donné les moyens des ambitions fixés par leurs Présidents de la République, l’actuelle majorité a mis fin à l’hémorragie.

La France disposerait ainsi d’un cadre clair et lisible pour son action à l’international, un cadre qui serait évalué et qui pourrait évoluer.

Une stratégie

Le Président fixe le cap, le Gouvernement et le Parlement déterminent le cadre. Pour savoir d’où elle vient et choisir où elle va, la France a besoin d’une revue stratégique. C’est le chemin qui a été suivi par les Britanniques pour refonder leur politique internationale post Brexit avec leur ambitieux projet Global Britain. Il existe déjà une Revue stratégique de défense et de sécurité nationale : pourquoi pas son pendant en politique étrangère ?

La France vit un moment de vérité. Elle n’est pas condamnée à n’être qu’une puissance moyenne disposant davantage d’un pouvoir de dire que d’un pouvoir de faire. Elle doit avoir un agenda de long terme - à l’instar de la Chine qui vise le rang de première puissance mondiale pour le centenaire de la République populaire en 2049. Depuis 1958, la doctrine diplomatique française s’est principalement fondée sur l’indépendance stratégique, son non-alignement et sa possession de l’arme atomique. Mais cette ligne directrice du fameux “gaullo-mitterrandisme” né pendant la guerre froide correspond-elle encore aux enjeux contemporains ?

La France ne peut faire l’économie d’une revue stratégique pour mieux se projeter vers un futur désirable, face au rapide repli américain, à la nouvelle ambition chinoise, à la crise écologique et à la révolution numérique, avec une Europe qui se cherche encore. Participer à la refondation du nouvel ordre mondial, c’est le défi de sa politique internationale pour la décennie à venir.

Le long terme devrait être l’horizon de toute politique, y compris étrangère. Tout indique que l’avenir recèle de nombreuses opportunités pour la France. Pourtant, devant les mutations du monde, les Français doutent. Le Président de la République, leader européen reconnu à l’échelle mondiale, peut redonner confiance en, et à, la France. La revue stratégique et la loi de programmation sont deux outils qui permettraient d’engager toutes les forces vives du pays vers un même objectif : une France conquérante dans la mondialisation et qui œuvre pour l’avenir de l’humanité et de la planète. 

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