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Quand le politique se livre

A la veille des prochaines échéances électorales, nos ministres sont pris d’une frénésie d’écriture. Ils sont nombreux ces derniers mois à avoir pris leur plume pour écrire un mot. Avec un succès plus que limité.

La prolifération des livres de ministres agace au plus haut sommet de l’Etat. Dans son édition du 20 octobre, le Canard enchaîné a rapporté les propos du Chef de l’Etat qui trouverait que ses ministres écrivent un peu trop. « Les Français vont finir par se dire que les ministres ne foutent rien et qu’ils passent leur temps à écrire des livres » aurait déclaré Emmanuel Macron. Pas faux. Ces dernières semaines, les sorties de livres écrits par des ministres ou secrétaires d’Etat se multiplient. Et certains sont plus prolixes que d’autres mais avec un succès qui n’est pas toujours à la hauteur de leurs attentes. Même si on peut parfois se demander si c’est vraiment cela qu’ils recherchent. Souhaitent-ils apporter leurs éléments de réflexion à un débat en cours, vanter leur action ministérielle ou exister médiatiquement ? La question peut se poser. La réponse leur appartient. Parmi ces écrivains, certains le sont sans doute un peu plus que d’autres. Citons Bruno Le Maire, ministre de l’Economie qui vient de publier récemment « Un éternel soleil » (Albin Michel). Un ouvrage qui fait suite à un précédent livre sorti en janvier dernier « la bête et l’ange, mémoires provisoires » (Gallimard). Sans aucun doute, le ministre-écrivain, qui en est à son quatrième livre depuis le début du quinquennat, est celui qui rencontre le plus de succès d’édition parmi ses collègues. « La bête et l’ange » s’est vendu à près de 25 000 exemplaires. D’autres ministres écrivent beaucoup. On pense à Marlène Schiappa, la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur, chargée de la Citoyenneté qui a publié chez Stock en octobre, « Sa façon d’être à moi ». Marlène Schiappa est une habituée des librairies, sur d’autres sujets et parfois sous pseudonyme. Selon les chiffres donnés par le site « Actualité », « Sa façon d’être à moi » s’est vendu à 65 exemplaires, Poursuivra-t-elle sur cette lancée avec la publication annoncée en janvier prochain de « C’est une bonne situation, ça, ministre ? » ? (L’Observatoire).

En février de cette année, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur a défendu son action dans un manifeste pour la laïcité intitulé « Le séparatisme islamiste » (L’Observatoire) vendu à quelques milliers d’exemplaires. C’est peu mais toujours plus que son collègue de l’Education nationale, qui n’a vu qu’une centaine de ventes (620 exemplaires) pour « Ecole ouverte » sorti en septembre dernier et dans lequel, Jean-Michel Blanquer défendait sa décision de ne pas fermer les écoles à la rentrée.

A lire encore, le livre de Sarah El Haïry « Envie de France » (L’Observatoire). Au fil des pages, la secrétaire d’Etat en charge de la Jeunesse et de la Citoyenneté évoque ses origines franco-marocaines et développe sa vision de la citoyenneté. Emmanuelle Wargon, ministre du Logement a publié « Bienvenue en politique. A ceux qui sont tentés de renoncer » (Calmann-Lévy) : 75 exemplaires vendus. Elle devrait publier prochainement avec sa collègue Elisabeth Moreno, ministre déléguée à l’Egalité entre les femmes et les hommes, un opus consacré à l’égalité des sexes. Qui encore ? Olivia Grégoire, secrétaire d’Etat chargée de l’Economie sociale, solidaire et responsable : « Et après ? Pour un capitalisme citoyen » (Le Cherche Midi). A noter que la préface est d’un certain Emmanuel Macron. Cela suffira-t-il à en faire un bestseller ? A venir, l’essai chez Plon d’Adrien Taquet, le secrétaire d’Etat auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, chargé de l’Enfance et des Familles intitulé « A nos enfants » dans lequel il évoquera « ce qu’il a vu et appris dans ses fonctions et sur le terrain depuis plusieurs années ». « Un document aussi choc que nécessaire sur l’état de l’enfance en France » nous promet l’éditeur. N’oublions pas le livre « La force des différents » de Sophie Cluzel, la secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées qui doit paraître en janvier 2022. Enfin, on attend avec impatience l’autobiographie de Roselyne Bachelot, la ministre de la Culture « Ma vie en rose » (Albin Michel), dont on a plus de nouvelles. Et pour répondre à la question que tout le monde se pose à savoir quand et comment les ministres trouvent-ils le temps d’écrire, Marlène Schiappa est la seule ministre à avoir donné des éléments de réponse en déclarant à Paris match qu’elle écrit « tôt le matin, tard le soir, la nuit et l’été, au lieu de sortir ». C’est toujours mieux de le savoir. 

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