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Déserts médicaux : une urgence absolue !

Par Yannick Favennec, Député de la Mayenne

À l’initiative de notre collègue député d’Ille-et-Vilaine, Thierry Benoit, nous sommes une cinquantaine de parlementaires à avoir co-signé une proposition de loi visant à lutter contre les déserts médicaux.

Simple, claire, pragmatique, concret et précis ce texte prévoit, notamment, d’instaurer une obligation d’exercer durant les 3 ans qui suivent l’obtention d’un diplôme de médecin dans une zone sous dotée.

L’avalanche de réactions qui a suivi l’annonce du dépôt de ce texte et le lynchage corporatiste bien organisé dont nous avons été l’objet, en particulier sur les réseaux sociaux, montrent qu’il existe une vraie fracture entre une partie du monde médical et la réalité de vie de nos concitoyens.

Je rappelle que l’une des prérogatives du Parlement est de pouvoir rédiger des propositions de textes de loi qui sont ensuite soumises à la signature de députés ou sénateurs et qui peuvent le cas échéant être inscrites (ou pas) à l’ordre du jour de nos travaux. Le droit d’écrire et de déposer des propositions de loi, puis de les amender et de les voter ou pas, est l’une des libertés des parlementaires.

Une proposition de loi est avant tout la traduction de problèmes venant du terrain et qui veut répondre à cette difficulté par une solution législative. C’est bien le cas avec cette PPL sur les déserts médicaux.

Est-ce « faire preuve de démagogie » que de proposer une réponse alternative à une problématique du quotidien de nos concitoyens en renforçant le parcours de soins des Français ?

Non, parce que ce texte est le fruit de ce que nous entendons et constatons dans la plupart de nos circonscriptions. Nous voyons des Français en situation de détresse, parce qu’ils ne trouvent pas de médecin pour se soigner ou qu’ils doivent faire des centaines de kilomètres pour en trouver ou, encore, qu’ils doivent patienter des mois pour obtenir un rendez-vous.

Aujourd’hui en France, au 21ème siècle, entre 6 à 8 millions de nos concitoyens n’ont aucun médecin.

Cette situation nous ne la découvrons pas en cette fin 2021. Cela fait des années que les uns et les autres, tous groupes parlementaires de toutes tendances confondues (une proposition de loi similaire à la nôtre sera encore discutée le 2 décembre à l’initiative du groupe GDR) proposons aux différents gouvernements qui se sont succédés depuis 20 ans de quitter le terrain de l’incitation financière pour attirer les médecins en zones sous dotées (mesure qui malheureusement n’a pas fait ses preuves), pour aller vers un système de régulation de l’installation.

Ce dispositif est efficace pour d’autres professions telles que les pharmaciens, alors pourquoi ne pas l’expérimenter pour les médecins ? Ce n’est pas parce que cela ne fonctionne pas dans d’autres pays (qui n’ont pas la même culture et offre sanitaires que la nôtre) que nous ne devrons pas l’essayer en France.

Supprimer le numerus clausus comme vient de l’annoncer le gouvernement va dans le bon sens. Mais, cela n’est pas suffisant, car il faut 10 ans pour former un médecin ! Comment fait-on en attendant 2030 ?

La santé est l’une des responsabilités régaliennes de l’État. Le droit universel à la santé est inscrit dans le préambule de la Constitution de 1946.

C’est pourquoi, notre proposition de loi s’inscrit dans une démarche plus globale qui consiste à alerter les candidats aux élections présidentielles pour qu’ils s’emparent de toute urgence de ce sujet et précisent clairement leurs propositions pour lutter contre la désertification médicale.

Je souhaite aussi que le gouvernement prenne le dossier à bras le corps en convoquant, dès à présent, des états généraux de la désertification médicale qui réuniraient sur le modèle des états généraux actuellement organisés pour la Justice, dans chaque département et dans chaque région tous les acteurs de terrain concernés, des étudiants en médecine, aux élus, en passant par les médecins, les personnels soignants, et bien sûr les patients. Les propositions qui émaneraient de cette concertation devraient ensuite faire l’objet de mesures concrètes et rapides pour lutter efficacement contre la désertification médicale dans nos territoires. C’est une question d’urgence absolue ! 

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