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La concurrence dans le ferroviaire en 2021 : le passage d’un mythe à une réalité qui reste encore imparfaite

Par Philippe Tabarot, Sénateur des Alpes-Maritimes, Ancien vice-Président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d’Azur

Fruit d’un long travail mené par la Région PACA depuis 2017, l’année 2021 marquera l’avènement de la concurrence régionale. Un opérateur, autre que l’opérateur historique pour assurer la liaison TER entre Marseille et Nice, va être choisi.

Cette ouverture à la concurrence, que j’ai défendue lors de mes fonctions régionales, devenue ainsi réalité, constitue une bonne nouvelle aussi bien pour les autorités organisatrices de mobilité, que pour les usagers.

Pour les régions, responsabilisation est le maître-mot. L’ouverture à la concurrence permet de responsabiliser l’optimisation de l’organisation pour produire le service public commandé, mais aussi de signer des contrats avec de vraies clauses de pénalités protégeant les usagers.

Sur l’optimisation financière, question cruciale pour les régions souffrant des conséquences de la pandémie, la concurrence leur permettra de dégager des marges de manœuvres financières, comme en témoigne l’exemple allemand. Cela sera aussi au bénéfice des usagers car les Régions pourront réinvestir ces économies pour créer de nouveaux services.

Pour les usagers, les apports majeurs offerts par l’ouverture à la concurrence se résument autour de la qualité de service et de l’augmentation de l’offre de train.

La responsabilisation des opérateurs offerte par la concurrence, poussera ces derniers à fiabiliser les TER. Cette fiabilisation engendrera sans nul doute, une amélioration de la qualité globale des services offerts à nos usagers. Le spectre de la concurrence avait d’ailleurs conduit SNCF Mobilités à se transformer en profondeur pour fiabiliser les TER. À titre d’exemple, pour la Région Sud en 2019 et 2020, la fiabilité des TER a atteint un niveau de 91 % de TER à l’heure, alors qu’elle trustait le palmarès des pires régions de France.

Toujours au service des usagers, l’ouverture à la concurrence permettra une augmentation de l’offre de train sans dérive de la contribution publique. Les marges de manœuvre financières offertes par la concurrence permettront aux régions de financer cette augmentation de l’offre ferroviaire. À titre d’exemple, au travers du choix de Transdev, la Région Sud prévoit un doublement du trafic ferroviaire pour un prix équivalent.

Si la concurrence est bel et bien devenue une réalité, elle souffre encore d’imperfections tant sur l’ouverture elle-même que sur sa mise en œuvre.

Au regard du processus d’ouverture à la concurrence, les appels d’offre régionaux sont en proie à des délais relativement longs, compte tenu de la nouveauté de l’exercice, mais également de l’incertitude liée aux crises.

Outre la question des délais, se profile la question des ressources des nouveaux entrants sur le marché ferroviaire français. En effet, les nouveaux entrants ont des difficultés pour accéder aux informations dont bénéficie l’opérateur historique. Cette rétention d’informations a d’ailleurs donné lieu à l’intervention de l’Autorité de régulation des transports et, peut pousser certains opérateurs à abandonner certains projets.

Outre les ressources techniques, la question des ressources financières des entrants constitue également un frein à la concurrence. Sur les marchés conventionnés ou en open access, les nouveaux entrants doivent mobiliser des investissements conséquents, qui seront plus difficiles à réaliser alors que les conditions de marchés sont difficilement prévisibles.

Dans sa mise en œuvre, la concurrence souffre également d’imperfections. Malgré une ouverture à la concurrence dans le domaine du ferroviaire, des barrières stratégiques demeurent. C’est le cas par exemple des dispositifs de signalisation qui resteront entièrement contrôlés par la SNCF et qui devront être loués par les opérateurs privés.

L’ouverture en Region Sud n’est pas restée à quai. Nous avons été les premiers en France à avoir fait un choix fort en ouvrant près de 30 % de notre réseau. Ainsi, si l’année 2021 constitue l’an 1 de la concurrence régionale avec des promesses indéniables aussi bien pour les régions que pour les usagers, il n’en demeure pas moins que des imperfections existent encore. â– 

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