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“La commission n’a auditionné que des personnes favorables à la légalisation”

Entretien avec Serge Lebigot, Président de l’association Parents Contre la Drogue*

Quel regard portez-vous sur ce rapport qui prône une « légalisation régulée » ? Avez-vous été auditionné par la mission ?

Ce rapport est la suite logique de cette commission qui a été créée uniquement pour appeler à la légalisation. De plus, cette commission est un déni de démocratie, j’ai demandé à être auditionné en tant que président de l’association Parents contre la Drogue mais cela m’a été refusé par le député Robin Reda (président de cette commission) au prétexte que j’aurais été auditionné il y a deux ans, sur le sujet de l’amende forfaitaire (mesure à laquelle j’étais favorable). Toutefois, je remarque que les associations favorables à la légalisation ont été auditionnées à deux reprises.

Pour étayer sa démonstration, le rapport s’appuie sur des exemples étrangers. Sont-ils fiables et pertinents ?

La commission n’a auditionné que des personnes favorables à la légalisation ou ayant milité pour la légalisation à l’étranger. Quand on veut présenter un rapport qui va dans votre sens, il vaut mieux auditionner des personnes en accord avec vos idées. Les résultats indépendants ne vont pas dans le même sens :

Aux États-Unis, depuis que le Colorado, Washington, l’Oregon, l’Alaska et le District de Columbia (Washington, DC) ont légalisé le cannabis, l’usage de la drogue au cours du dernier mois a continué d’augmenter au-dessus de la moyenne nationale chez les jeunes âgés de 12 à 17 ans dans les cinq juridictions.

Pour la première fois, le Colorado occupe actuellement le premier rang pour la consommation de cannabis chez les jeunes, ce qui représente une augmentation de 65 % par rapport au nombre d’années écoulées depuis la légalisation.

À Anchorage, dans les écoles, les exclusions pour consommation et possession de cannabis ont augmenté de plus de 141 % par rapport à 2015 (date de la mise en œuvre de la légalisation).

Un rapport de police a révélé qu’au moins 70 % des ventes de cannabis en 2016 étaient réalisées sur le marché noir.

Le taux de criminalité au Colorado a augmenté 11 fois plus rapidement que les 30 plus grandes villes du pays depuis 2016.

Bien que le tableau d’ensemble résultant de la légalisation ne soit pas complet avant des décennies, il n’y a pas besoin d’attendre si longtemps pour comprendre quelques conséquences clés.

Les États qui ont légalisé le cannabis ont les taux les plus élevés de consommation des États-Unis.

D’autres données montrent :

• Des taux plus élevés de décès liés à la conduite sous l’emprise de cannabis

• Plus de visites aux urgences liées au cannabis, d’hospitalisations et d’expositions accidentelles

• Expansion d’un marché criminel lucratif

• Augmentation des crimes et délits liés au cannabis et délinquance juvénile

• Augmentation des problèmes sur le lieu de travail, y compris pénuries de main-d’œuvre et accidents.

Pouvez-vous nous rappeler les effets du cannabis sur la santé des jeunes ?

À court terme, il a été démontré que la consommation de cannabis altère des fonctions telles que l’attention, la mémoire, l’apprentissage et la prise de décision.

Le cerveau murit entre 20 et 25 ans ; la consommation des adolescents a donc des effets extrêmement délétères sur leur développement cérébral.

Une étude néo-zélandaise a montré que fumer du cannabis régulièrement à l’adolescence peut provoquer une baisse des capacités intellectuelles à l’âge adulte (perte de 8 points de QI).

Les jeunes fumeurs de cannabis ont un risque accru de dépression à l’âge adulte.

Risque de symptômes psychotiques pour les jeunes fumant régulièrement du cannabis. Le cannabis comme toutes les autres drogues peut entraîner une dépendance.

Risque de crises d’angoisse, d’hallucinations, de délires.

La légalisation permettra-t-elle, selon vous, de mieux contrôler au final la consommation ?

La légalisation ne permettra en aucun cas de contrôler la consommation surtout chez les jeunes. Le cannabis vendu légalement aura forcément un taux limité de THC, rien n’empêchera les dealers d’en vendre un fortement dosé en THC.

Comme argument, les pro-légalisations disent qu’il y a environ 1 400 000 consommateurs réguliers et donc qu’il faut légaliser. Il y a actuellement 650 000 consommateurs de cocaïne, faut-il aussi la légaliser ? Et après ? 


*Auteur des livres : "Cannabis : ce que les parents doivent savoir", "Le dossier noir du cannabis", "Salles de shoot : ce qu’ils refusent de vous dire"

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