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Faire du défi climatique, une opportunité pour l’agriculture

Par Olivier Dauger, Président de la Chambre d’agriculture régionale des Hauts-de-France et référent national Climat Europe*

Depuis plusieurs décennies, les experts du GIEC, réunissant des scientifiques de 195 états, ont compilé 9 200 études. Leur dernier rapport (le 4ème) a rendu un avis alarmant sur l’évolution du climat et ses conséquences prévisibles.

Cette prise de conscience n’est pas un phénomène nouveau mais sa progression est une réalité et elle s’accélère. Elle ne se fonde pas seulement sur les rapports scientifiques du GIEC mais aussi sur la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes qui touchent de façon de plus en plus tangible tous les citoyens du monde.

Nous, les agriculteurs, savons bien qu’il y a urgence à agir car nos activités sont déjà très durement impactées par le changement climatique. Les fléaux se succèdent : la même année un même territoire peut subir une sécheresse sans précédent, des pluies diluviennes, des inondations, des gels tardifs... Au-delà des impacts économiques directs sur notre secteur, les agriculteurs sont de facto parties prenantes et, à ce titre, contribueront à relever le défi du changement climatique.

Partant du constat irréfutable que le changement climatique impactera en premier lieu les agriculteurs et l’économie agricole, la FNSEA a voulu conduire une réflexion stratégique qui devra guider notre action dans la prochaine décennie.

Ce travail d’orientation, nous avons souhaité le publier largement sous la forme d’un livre afin que le plus grand nombre soit sensibilisé aux enjeux à venir et participe à la mise en oeuvre, localement, sur son territoire, des actions pour rendre l’agriculture plus résiliente et ce faisant contribuer à la captation des Gaz à Effet de Serre, responsables du réchauffement climatique. Le dérèglement climatique déstabilise la production agricole et engendre un risque à moyen terme sur la sécurité alimentaire mondiale et sur la souveraineté alimentaire de notre pays.

Au centre de ce Rapport, notre première volonté est que le revenu des agriculteurs se trouve conforté, que les évolutions indispensables de nos pratiques, de nos systèmes d’exploitation soient conduites sans mettre en péril la compétitivité des exploitations agricoles dans un espace européen ouvert et face à une compétition mondiale forte.

La FNSEA et plus largement les agriculteurs, au-delà de leur volonté d’atténuer leurs émissions de gaz à effet de serre et de s’adapter, souhaitent être source de solutions pour participer, avec l’aide des pouvoirs publics, à cette action indispensable qui nous permettra d’atteindre la neutralité carbone en 2050 en développant les produits issus du carbone renouvelable pour remplacer les énergies fossiles et en captant des Ges dans les sols.

Nous ne sommes donc pas sans ressources, mais nous sommes conscients qu’il y a urgence à agir.

Agir, pour adapter nos pratiques agronomiques, nos modes d’élevage, est indispensable à la pérennité de l’agriculture, Agir, pour maintenir une production alimentaire dont la planète aura besoin pour satisfaire une demande quantitative et qualitative qui ne cessera d’augmenter dans les années à venir. Agir, pour renforcer la préservation de la biodiversité, végétale et animale : elle participe à une meilleure résilience des milieux et contribue à l’adaptation de nos écosystèmes aux agressions qui se multiplient. Agir, pour intensifier la production de biomasse, source de captation de CO2, par toutes les combinaisons possibles d’assolements, avec des cultures à destination de l’alimentation humaine ou animale, à vocation industrielle, pour des énergies vertes ou des biomatériaux. Agir, pour transformer nos élevages, qui devront moins émettre de gaz à effet de serre et améliorer le bien-être de nos animaux, eux aussi victimes de ces changements. En prenant à bras le corps cet enjeu vital qu’est devenu la lutte contre le réchauffement climatique, qui est désormais l’affaire de tous, l’agriculture et les agriculteurs retrouvent l’opportunité de conclure, avec la société et les pouvoirs publics, un nouveau contrat, que nous appelons de nos voeux.

Ce nouveau contrat sociétal devra rendre possible une rémunération de nos productions à leur juste prix, permettre de reconnaître et de valoriser nos actions pour le soutien à l’entretien de la biodiversité, et enfin permettre de participer à ce nouveau marché de la captation et du stockage du carbone. Il se déclinera au plus proche des territoires : à chacun de trouver les solutions en lien avec les atouts et les opportunités offertes par son environnement socio-économique. Nos réseaux locaux seront à la manoeuvre, en première ligne, pour le faire vivre.

Notre rapport d’orientation 2020, est la matérialisation des engagements que nous, agriculteurs français, prenons envers la société. Pour réussir ce défi, la puissance publique devra se mobiliser à nos côtés et engager des moyens réglementaires, financiers et juridiques pour nous accompagner.

Les agricultrices et les agriculteurs de la Fnsea, représentant la variété de nos territoires et de nos productions veulent vivre du prix de leurs productions mais aussi répondre aux défis du climat en rendant les systèmes plus résiliants, moins impactant et source de solutions pour l’intérêt général. Un défi important certes mais nécessaire. 

*Olivier Dauger est co Rapporteurs avec Henri Bies-Péré, Hervé Lapie et Joël Limouzin de : « Faire du défi climatique, une opportunité pour l’agriculture » - Synthèse du Rapport d’Orientation 2020 de la FNSEA

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