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Les Grandes régions doivent encore faire leurs preuves

Selon les dernières données de la direction générale des collectivités locales (DGCL), la baisse des dépenses de fonctionnement des grandes régions issues de la réforme territoriale de 2015 n’est toujours pas au rendez-vous. Un constat identique à celui de la Cour des comptes en 2019.

Promesse non tenue. Avec la réforme territoriale de la loi du 16 janvier 2015 opérée en 2016, le nombre de « territoires régionaux » est passé de 27 en 2015 à 18 en 2016 (en incluant Mayotte, les quatre DOM et la Corse dans le décompte). Six régions de France métropolitaine ont gardé leur contour d’origine et les autres ont fusionné pour donner naissance à sept nouvelles régions. Cette réforme phare du quinquennat Hollande promettait alors des économies d’échelle notamment en dépenses de fonctionnement, de l’ordre de 10 milliards d’euros dans les dix ans après la mise en œuvre de la réforme. Or, pour la direction générale des collectivités locales force est de constater que « les dépenses totales de fonctionnement se trouvent en définitive au même niveau en 2019 qu’en 2015, que ce soit pour les régions fusionnées ou pour les autres régions ». Il en est ainsi des dépenses de personnels qui ont augmenté en moyenne de 9,8 % en France et beaucoup plus dans certaines régions comme l’Occitanie (+17 %) ou le Grand Est (+15 %). La faute au « conservatisme territorial » justifie André Vallini, principal ordonnateur de la réforme, « les régions ont sans doute ralenti les économies attendues en ne concentrant pas tous les services dans une seule ville » a-t-il expliqué au Figaro. C’est le moins que l’on puisse dire. Les exemples foisonnent de ces doublons de bureaux et de services entre plusieurs chefs-lieux pour ne pas heurter les susceptibilités des uns et des autres. Comme l’écrivait dans son rapport consacré aux finances publiques locales, en 2019, la Cour des comptes : « les régions fusionnées ont affiché très tôt leur souhait de préserver leur équilibre territorial ». « Hormis la région Nouvelle-Aquitaine [qui a rassemblé l’ensemble de ses équipes et de sa direction à Bordeaux, Ndlr] (…) Cette volonté s’est traduite par le maintien des sites situés dans les chefs-lieux des anciennes régions » ajoutaient les magistrats de la rue Cambon.

Quant aux économies promises, les résultats « ne sont pas au rendez-vous » écrivaient-ils déjà en 2019. Pour la Cour, « les gains d’efficience visés par ces réformes restent aujourd’hui (en 2019, Ndlr) limités en raison de la reconduction, dans la majorité des cas, des modes de gestion préexistants », n’hésitant pas à pointer des « surcoûts importants », « notamment en termes de rémunération des personnels administratifs et d’indemnités des élus ». « Ainsi, poursuit-elle, les dépenses indemnitaires ont augmenté de près de 12 % entre 2017 et 2018 dans les régions fusionnées, contre un peu plus de 6 % dans les autres régions. De même, les politiques publiques ont souvent été harmonisées au niveau le plus élevé » déploraient les magistrats.

Au-delà des dépenses et des économies non-réalisées, la réforme suscite toujours autant d’interrogations. Nombre d’élus déplorent cette découpe qui gomme les particularismes régionaux souvent hérités de l’Histoire interdisant du même coup à certaines régions de se fondre dans la nouvelle entité. « Certaines de ces immenses régions ne répondent à aucune légitimité historique et surtout pas aux besoins croissants de nos concitoyens pour une action publique de proximité » a d’ailleurs tranché le Premier ministre Jean Castex, le 23 janvier dernier en déplacement à Colmar « jamais convaincu » par la réforme. Une pique que n’a pas apprécié François Hollande. « Si Monsieur le Premier ministre Castex pense que ce n’est pas une bonne idée, il n’est pas trop tard pour qu’il dépose un projet de loi et change l’organisation des régions » a t-il vertement lancé à des journalistes. « On ne peut pas faire une déclaration à l’emporte-pièce pour satisfaire une partie du public et ne pas être conséquent » a ajouté l’ancien président qui dit ne rien regretter : « Je revendique la création de ces grandes régions qui donnent plus de puissance à ces collectivités, plus de capacités d’investissement, plus de moyens pour agir et changer le cadre de vie de la population ». Au sein de ces nouvelles grandes régions, il n’y en a qu’un qui semble satisfait, c’est Laurent Wauquiez à la tête de Auvergne-Rhône-Alpes qui se félicite d’avoir « simplifié toutes les procédures administratives » avec la suppression de 16 des 17 agences économiques du territoire par exemple. La bonne note accordée par l’agence Standard & Poor’s a également permis à la région d’« enclencher une spirale vertueuse avec les frais financiers en baisse et une capacité d’investissement qui augmente » se félicite Laurent Wauquiez. 

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