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Le Royaume-Uni à deux ans du référendum

David Cameron avait promis qu’en cas de réélection, il organiserait un référendum sur l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union européenne. Chose promise, chose due. Mais d’ici à 2017, le chemin est encore long et semé d’embuches. Pour un résultat très incertain.

 

Promis pour 2017, le référendum sur l’avenir de l’Europe et sur l’appartenance de son pays à l’Union européenne pourrait finalement être avancé en 2016 pour répondre aux inquiétudes des milieux économiques et calmer la frange la plus eurosceptique de ses élus. Au lendemain de sa victoire incontestable et fort d’une majorité absolue au Parlement, David Cameron a formé un nouveau gouvernement dont l’objectif est d’entamer un bras de fer avec Bruxelles. Les membres centristes du gouvernement précédent jugés trop europhiles ont été remplacés par des ministres plus eurosceptiques. David Cameron a ainsi voulu éviter des dissensions et divisions sur l’Europe au sein de son parti comme cela s’était vu avec Margareth Thatcher et John Major.
Maintenu à son poste, le Ministre des Affaires étrangères Philip Hammond. Un eurosceptique convaincu qui n’a jamais caché une envie irrépressible de voter en faveur d’une sortie de l’UE. C’est le même qui déclarait encore récemment que ce référendum était « une arme très puissante dans notre arsenal» pour « mettre le feu à l’Union européenne ». Au gouvernement, on retrouve aussi le Chancelier de l’Echiquier (Finances), George Osbone qui sera tout particulièrement chargé de mener les négociations avec Bruxelles.
Autres nominations, celles des ultraconservateurs Mark Harper, ancien ministre de l’Immigration qui devient « Chief whip » en charge de la discipline parlementaire du groupe Tory, et Robert Halfon, viceprésident du parti, promu ministre sans portefeuille. Pour faire patienter l’aile europhobe de son parti, le Premier ministre n’a pas hésité non plus à confier à son Ministre de la Justice Michael Gove le soin de mener une réforme sur les relations avec la Cour européenne des droits de l’Homme de Strasbourg pour s’affranchir de sa tutelle jugée trop pesante et contraignante. Quant à Boris Johnson, le bouillonnant et imprévisible maire de Londres, le voilà propulsé conseiller du Premier ministre. En attendant un probable portefeuille à la fin de son mandat de maire.
En parallèle, David Cameron a choisi de faire une tournée européenne pour évoquer avec les chefs d’Etat et de Gouvernement européens, « son » référendum et les réformes qu’il souhaite voir aboutir. 40 ans après le référendum sur le maintien de leur pays dans l’UE, les électeurs britanniques vont être à nouveau appelés à répondre à une question identique. Et comme en 1975, la renégociation avec Bruxelles sera l’enjeu majeur de cette consultation. David Cameron, sous la pression des conservateurs eurosceptiques et d’une majorité de sa population espère bien obtenir des avancées sur le renforcement du rôle des parlements nationaux dans le processus législatif, la diminution des excès législatifs et bureaucratiques, l’aménagement du principe de libre circulation, la création de nouveaux mécanismes pour empêcher des phénomènes migratoires trop importants et le renoncement – au moins pour le Royaume- Uni – au principe d’une Union toujours plus étroite… Mais la marge de manoeuvre est étroite. Très étroite. Alors que François Hollande recevait David Cameron, il lui opposait une quasi fin de non-recevoir en lui signifiant qu’« il y a des règles en Europe ». Au même moment, Michel Sapin expliquait pour sa part qu’il n’était pas question de toucher aux traités européens. Dans son propre camp, le député tory Peter Done est sceptique sur les chances de succès. « Je pense qu’il va très bien négocier mais qu’il va échouer à obtenir ce que veut le peuple britannique, non pas en raison de ses efforts mais à cause des bureaucrates européens qui vivent sur une autre planète. Je ferai campagne pour sortir du super-Etat européen, on verra ce que le peuple décidera » a-t-il averti. Le risque est bien là.

Dans son rapport (Voir RP n°970) sur la place du Royaume-Uni dans l’Union européenne, la sénatrice fabienne Keller disait croire en une opinion publique britannique « raisonnable » qui « reste eurosceptique avec modération ».
« L’euroscepticisme britannique peut être considéré comme une tournure d’esprit plus propice à la négociation qu’à la fin de non-recevoir » ajoutait-elle confiante. Un récent sondage* réalisé par le Pew Research Center semble lui donner raison. A deux ans du référendum, 55% des Britanniques se disent favorables au maintien de leur pays dans l’UE (+9 points par rapport à 2013). Et 36% déclarent vouloir quitter l’UE (46% en 2013). 51% des Britanniques disent avoir une bonne opinion de l’Union européenne contre 55% pour la France, 58% pour l’Allemagne et 72% pour la Pologne.

* Sondage réalisé entre le 7 avril et le 13 mai auprès de 6028 personnes dans six pays européens.

 

 

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