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Un PLFSS « inédit et exceptionnel »

Par Thomas Mesnier, Député de Charente, Rapporteur Général de la commission des Affaires sociales

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 constitue l’un des exercices les plus singuliers depuis la création du PLFSS, tant au vu de la crise sanitaire et ses conséquences sur les finances sociales qu’en raison des transformations structurelles qu’il porte.

Nouveau Rapporteur Général de la commission des Affaires sociales, j’ai conscience qu’une telle opportunité ne se représentera pas de sitôt. Avec ce PLFSS, nous avons les moyens d’accélérer la transformation de notre système de santé lancée avec Ma Santé 2022 et d’aller encore plus loin dans la modernisation de notre système de protection sociale grâce au financement de la 5ème branche « Autonomie » de la Sécurité sociale que j’avais portée par amendement dans le projet de loi « Dette sociale et Autonomie » cet été au Parlement, promesse non tenue depuis des années par les majorités successives.

Après un confinement de plusieurs mois où notre système de santé et notre société ont été mis à rude épreuve, le texte que nous examinons à l’Assemblée nationale permet d’acter les mesures exceptionnelles de soutien apportées à notre économie, aux entreprises et aux Français durement touchés par la crise. Jouer un rôle d’amortisseur pendant les périodes de crise pour éviter le chômage de masse, les pertes d’emploi et permettre à chacun d’être soigné correctement, quelle que soit sa situation, c’est la finalité profonde de cette loi de financement de la Sécurité sociale. Elle prévoit ainsi de pérenniser les mesures mises en place pendant la crise en continuant de compenser celles exceptionnelles d’exonération de cotisations et contributions sociales accordées aux entreprises des secteurs les plus affectés.

Parce que cette crise a été – et continue d’être – d’une ampleur inédite, les mesures de soutien ont représenté un effort majeur et vital pour soutenir nos établissements et nos professionnels de santé. L’Assurance maladie, au regard de cette situation d’urgence, a pris intégralement en charge certaines dépenses de santé, à l’image de la téléconsultation. Cette mesure, additionnée à une baisse de la consommation de soins sur cette période, a fait réaliser des économies aux complémentaires santé estimées à 2,2 milliards d’euros. C’est dans ce sens que le PLFSS 2021 acte la création d’une taxe temporaire à destination des Organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM). Fixée pour 2020 à 1 milliard d’euros, elle s’élèvera à 500 millions d’euros pour l’année à venir et pourra être rectifiée au vu des économies réelles perçues.

Ce PLFSS acte également une aide de 80 millions d’euros pour reconnaître pleinement la mobilisation des professionnels du domicile présents au plus fort de la crise épidémique. Elle sera versée aux conseils départementaux qui s’engagent à financer la prime Covid pour les personnels des services d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD), fortement sollicités durant le confinement.

Si le premier volet du PLFSS 2021 répond principalement à l’urgence sanitaire, le deuxième répond, lui, à une autre urgence tout aussi essentielle : l’attractivité de notre hôpital public. Ce PLFSS est indéniablement ambitieux et historique à cet égard. Revalorisation des carrières des soignants, investissement dans l’hôpital et évolution de notre système de santé, il est la traduction d’un Ségur de la Santé longtemps attendu.

Ce sont 8,8 milliards d’euros qui sont ajoutés à l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) ventilés pour près de 8,2 milliards pour les personnels hospitaliers et des EHPAD, 400 millions pour les médecins et 200 millions pour les étudiants en santé. Derrière ces revalorisations salariales ce sont en grande majorité des femmes qui exercent des métiers du soin avec vocation et passion au quotidien et qui, parce qu’elles étaient des femmes, exerçaient des métiers historiquement moins bien rémunérés. De surcroît, cette augmentation des salaires de 15 % à 20 % procède à la plus forte compensation de l’écart salarial entre femmes et hommes dans notre pays.

Ce sont également 19 milliards d’euros que nous investissons afin de redonner des marges financières suffisantes à nos établissements de santé et médico-sociaux, dont 13 milliards d’euros de reprise de dette hospitalière. Relancer, rénover et redonner aux établissements de santé des conditions adéquates de travail, c’est impulser un nouveau souffle, au plus près des attentes du terrain, tout en améliorant l’efficacité des organisations en les adaptant aux nouveaux besoins.

Ce PLFSS permet une évolution des modes de financement à l’hôpital pour remplacer progressivement la tarification à l’activité par des modes de financement qui permettent de mieux prendre en compte la qualité et la pertinence des soins.

Ces évolutions passent par la création d’un Forfait Patient Urgences (FPU) sur lequel il y a eu beaucoup de malentendus et d’incompréhensions ces derniers temps. Contrairement à ce qu’il a été écrit, un passage aux Urgences n’est pas gratuit pour le patient. Si ce sont les mutuelles qui le prennent en charge, il existe bien, aujourd’hui, un reste à charge pour le patient, un ticket modérateur à hauteur de 20 % pour chaque prestation dont il a bénéficié. Concrètement, ce FPU ne concernera que les passages aux urgences non suivis d’une hospitalisation et sera le même partout, tout le temps, avec néanmoins l’exonération totale maintenue lors de certaines situations définies dans le PLFSS, relevant de l’urgence sociale et/ou médicale. Avec cette mesure, nous simplifions le reste à charge et le rendons plus lisible pour les patients.

Par ailleurs, ce PLFSS poursuit les innovations organisationnelles sur trois volets. C’est d’abord la pérennisation des maisons de naissance, ces structures autonomes sous la responsabilité exclusive des sages-femmes, accueillant des femmes enceintes qui souhaitent avoir un accouchement physiologique. Fort de son expérimentation qui a conduit à la création de huit maisons de naissance en France, ce PLFSS prévoit la création de douze nouvelles structures répondant à une demande sociétale forte.

C’est ensuite le soutien au développement des hôtels hospitaliers qui permettent de fluidifier les prises en charge en amont et en aval des séjours en établissements de santé et de recentrer l’hôpital sur sa mission principale – le soin – tout en répondant à un enjeu de santé publique en termes notamment d’accès facilité aux soins dans certains territoires.

C’est enfin la poursuite de l’accélération du développement de la télémédecine ; outil fondamental pour maintenir les conditions d’accès à chacun aux soins en ville et à l’hôpital. Ce PLFSS prolonge donc, jusqu’à la fin de l’année 2021, la mesure dérogatoire de prise en charge à 100 % des téléconsultations.

Pour la première fois depuis 1945, nous élargissons le champ de la Sécurité sociale avec la création d’une cinquième branche dédiée à l’autonomie. Il s’agit de l’un des grands défis relevés par notre majorité. Cette réforme permettra d’assurer une meilleure équité territoriale dans l’accès aux droits des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes en situation de handicap, d’améliorer l’offre d’accompagnement à destination de ces publics et de renforcer les politiques transversales du handicap et du grand âge.

Enfin, nous nous engageons pour plus d’avancée sociale en allongeant la durée du congé paternité et d’accueil de l’enfant à 28 jours, dont 7 jours obligatoires. Cette réforme répond à un engagement fort de notre majorité, dans le sens des travaux de la commission d’experts pour les « 1 000 premiers jours ». Avec cette mesure, nous prenons en compte l’évolution de la société et répondons à une demande sociétale forte.

Ce PLFSS est inédit et exceptionnel : inédit par les moyens financiers qu’il déploie, exceptionnel par les mesures majeures qu’il contient. Il est à l’image des mesures que nous avons prises ces derniers mois pour faire face à la crise sanitaire que nous traversons : protecteur, solidaire et tourné vers l’avenir. 

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