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Déconfinement : la feuille de route du Premier ministre

Comme prévu et après une ultime réunion à l’Elysée la veille, Edouard Philippe a présenté aux députés le 27 avril son plan de déconfinement et son calendrier. En un peu plus d’une heure le Premier ministre a détaillé les différentes mesures qui vont toucher au quotidien des Français. Sous réserve que la situation sanitaire ne s’aggrave pas d’ici là. L’allocution a été suivie d’un débat et d’un vote consultatif (368 voix pour, 100 contre et 103 abstentions).

« Eviter l’effondrement ». L’objectif de l’exécutif est clair. Le plan de déconfinement annoncé par le Premier ministre doit permettre au pays de faire face à la crise économique et si ce n’est de rebondir d’au moins éviter d’ajouter une crise à une autre.

Calmement, en un peu plus d’une heure, Edouard Philippe s’est appliqué à apporter des éléments de réponses aux nombreuses questions des Français. Son discours devait aussi mettre fin à plusieurs semaines d’errements et d’approximations. Reste que, loin de se voiler la face et jouant la transparence, le Premier ministre a prévenu que « nous allions devoir vivre avec le virus ». Redoutant le « risque d’une seconde vague » qui pourrait survenir et impacter notre système de santé, il a alors précisé que le gouvernement se devait d’agir avec « prudence » et « progressivement » en « vérifiant que nous maîtrisons le rythme de circulation du virus ». résumant la situation, Edouard Philippe a fini par dire clairement que si les indicateurs « ne sont pas au rendez-vous, nous ne déconfinerons pas le 11 mai ou nous le ferons plus strictement ». Un point décisionnel sera fait le 7 mai. Un Français averti en vaut deux.

Si les indicateurs devaient être au vert, le déconfinement se ferait alors progressivement, en plusieurs phases et différemment selon les professions, les publics et les départements.

« Le retour de nos enfants à l’école est un impératif pédagogique et de justice sociale »

L’école, sujet épineux a fait l’objet d’une large réflexion qui a fini par déboucher sur une réouverture « très progressive » à partir du 11 mai des écoles primaires et des maternelles sur la base du volontariat avec des conditions qui se veulent draconiennes (pas plus de 15 élèves par classe, gestes barrières, gel hydroalcoolique, masque pour les enseignants et port recommandé pour les élèves, sauf en maternelle…).

Pour les collèges, la réouverture est envisagée « à compter du 18 mai » et dans les départements les moins touchés par le virus ; et pour les lycées, une décision sera prise « fin mai » pour une possible réouvertutre « début juin ». Contrairement à ce que le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer avait envisagé récemment, parlant pour les lycées du 18 mai aussi.

Vert ou rouge

Puisque la circulation du virus « n’est pas uniforme dans le pays », l’exécutif s’est engagé dans la voie d’un déconfinement plus ou moins « strict » par département. Chaque sir, à partir du 7 mai, les départements seront classés en « vert » ou en « rouge ». Edouard Philippe a également indiqué que « les autorités locales » - « les maires » et « les préfets » auront la possibilité d’« adapter » le plan de déconfinement « aux réalités du terrain ».

Pour ce qui est des déplacements ensuite, le choix a été fait non pas de les empêcher mais de les restreindre encore dans la mesure du possible. A partir du 11 mai, « il sera à nouveau possible de circuler librement, sans attestation ». « Sauf pour les déplacements à plus de 100 km du domicile, qui ne seront possibles que pour un motif impérieux, familial ou professionnel » a précisé le Premier ministre qui veut aussi limiter les « déplacements interdépartementaux ou interrégionaux ». Pour cela, « nous allons continuer à réduire l’offre » et « à exiger une réservation obligatoire dans tous les trains - TGV ou non » a-t-il ajouté invitant fermement les Français à ne pas se déplacer pour le pont de l’Ascension (du 21 au 24 mai).

« Masques pour tous »

La question des masques occupe bien évidemment les esprits. Mais le Premier ministre a assuré qu’à partir du 11 mai, ils seraient en nombre suffisant : « Il y en aura assez dans le pays pour faire face aux besoins à partir du 11 mai ». « Progressivement », « les Français pourront, sans risque de pénurie, se procurer des masques grand public dans tous les commerces » a-t-il promis. Le port du masque sera obligatoire dans les transports publics. Les masques mais aussi les tests. L’objectif du gouvernement est Dans le même registre ou presque, Edouard Philippe a indiqué que l’objectif est de réaliser au « moins 700.000 tests virologiques » par semaine à partir du 11 mai. Tout doit fait pour les faciliter - laboratoires de recherches et vétérinaires sont aussi à en pratiquer -. Ils seront pris en charge à 100 % par l’Assurance maladie.

Le Premier ministre demande encore aux personnes âgées de faire preuve de « patience » - « En vous protégeant, vous protégez aussi le système hospitalier ». Il en est ainsi pour les visites dans les EHPAD qui devront « être entourées de précaution, comme les sorties ». a rappelé le premier ministre.

« La vie sociale va reprendre, mais progressivement »

Edouard Philippe a voulu aussi réaffirmer que le déconfinement ne permettait en rien une liberté de rassemblement qui sont « autant d’occasions de propagation du virus ». Sur la voie publique ou dans les lieux privés, ils sont ainsi limités à 10 personnes.

Alors que les autorités religieuses appelaient à autoriser la réouverture des lieux de culte, le Premier ministre a réaffirmé son opposition. S’ils peuvent « continuer à rester ouverts », aucune cérémonie ne pourra être organisée « avant le 2 juin ».

Même punition pour les cinémas, théâtres, les grands musées et les plages. Il en est aussi de même pour les parcs et jardins dans les départements classés en « rouge ». Mais, assure Edouard Philippe, « La vie sociale va reprendre, mais progressivement » avec une réouverture au public des cimetières, médiathèques, bibliothèques et « petits musées ». Les sports collectifs sont toujours interdits et la fin de la saison 2019-2020 de sports professionnels, notamment de football est actée. « Les grandes manifestations sportives, culturelles, notamment les festivals, les grands salons professionnels, tous les événements qui regroupent plus de 5000 participants » soumises à autorisation des préfets ne pourront avoir lieu avant septembre.

« Nous sentons que l’arrêt prolongé de la production de pans entiers de notre économie (...) présenterait pour le pays (...) un risque de l’écroulement »

Les commerces - « sauf les cafés, restaurants » (décision fin mai) - pourront ouvrir à compter du 11 mai avec un nombre de clients limité, des « flux organisés » et un port du masque recommandé pour les clients et le personnel. Les préfets pourront continuer à interdire l’ouverture des grands centres commerciaux de plus de 40 000 m2. Sauf avis contraire des maires et des préfets les marchés de plein air et halles couvertes pourront rouvrir à partir du 11 mai mais avec obligation de respect des règles de distanciation entre les consommateurs.

Edouard Philippe souhaite que soit maintenu le plus possible le « télétravail ». L’idée est « limiter le recours aux transports publics » et « limiter plus globalement les contacts ». « Le dispositif d’activité partielle, qui est un des plus généreux d’Europe, restera en place jusqu’au 1er juin » a aussi précisé Edouard Philippe. « Il nous faudra ensuite l’adapter progressivement, afin d’accompagner la reprise d’activité si l’épidémie est maîtrisée ».

Après les annonces, et pour faire taire les rumeurs de dissensions entre lui et le Chef de l’Etat, Edouard Philippe a aussi voulu remettre quelque peu les pendules à l’heure pointant du doigt « ces temps de démocratie médiatique, de réseaux pas très sociaux mais très colériques, d’immédiateté nerveuse ». Pas sûr que cela suffise. Les oppositions n’entendent pas désarmer et ont très rapidement mis en doute la voix du Premier ministre critiquant son plan de déconfinement et son calendrier. 

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