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Nicolas Hulot aux sénateurs : « l’enjeu climatique n’est pas optionnel »

La Conférence Paris Climat 2015 (COP 21) se tiendra à Paris en décembre prochain. Cette 21ème édition sera placée sous le signe de l’exemplarité environnementale. Selon Laurent Fabius qui a fait de l’enjeu climatique une priorité diplomatique française, « il est essentiel qu’un accord universel, ambitieux et comportant des engagements de réduction d’émissions [de gaz à effet de serre] soit bien conclu en 2015 ». Nicolas Hulot a été entendu sur le sujet par les Commissions du Développement durable et des Affaires étrangères du Sénat. Lors de son audition, l’envoyé spécial du Président de la République pour la protection de la planète a rappelé que la COP 21 représentait une « échéance capitale » pour la préservation de la planète. Propos tenus.

En préambule de l’audition et avant de rentrer dans le vif du sujet et d’évoquer la COP 21, « ce rendez-vous majeur pour la diplomatie française », le président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées Jean-Pierre Raffarin (UMP, Vienne) a tenu à faire une mise au point quant au calendrier choisi pour cette conférence. L’ancien Premier ministre a regretté publiquement qu’il coïncide avec le résultat des Régionales, craignant que cela ne soit « une caisse de résonnance aux résultats du FN en régions ». « Je déplore également ce calendrier malheureux, a réagi Nicolas Hulot, le problème serait constitutionnel m’a-t-on dit. Sans forcer le trait, je crois pouvoir dire que la réussite de la COP 21 est largement aussi importante que les résultats des élections régionales ». Cela étant dit, à la question d’Hervé Maurey (UDI, Eure), le président de la Commission du Développement durable, sur son état d’esprit, l’envoyé spécial de François Hollande s’est dit d’un « optimisme désespéré ». Il ajoute : « J’ai du mal à comprendre pourquoi il faut déployer autant d’énergie pour convaincre l’Humanité de se sauver ellemême ». Alors que personne ne conteste, dit-il, les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et que le constat est « clairement établi », « le scepticisme qui a longtemps entravé la dynamique d’une action sur le climat n’est plus un argument opposable » assène-t-il. Après un « état de sidération » qui a prévalu à l’idée de se passer des énergies fossiles, « quand la contrainte de l’imparable, l’improbable est possible », pour Nicolas Hulot, la transition énergétique est possible pour peu que « nous ayons foi en son avènement ». « L’heure n’est plus au conservatisme, au scepticisme, au fatalisme » lance-t-il aux sénateurs déjà convaincus.

Tout au long de sa présentation, Nicolas Hulot a donc flirté entre optimisme et défaitisme. Il n’a eu de cesse de déplorer l’appréhension de la question du climat à travers le prisme des intérêts nationaux. « Chacun tente de s’exonérer de ses responsabilités ou de rendre la contrainte moins forte, alors que personne ne peut tirer seul son épingle du jeu ». D’où cet appel lancé aux 195

pays engagés dans la COP 21 « à jouer [leur] rôle » et à faire des choix clairs et déterminés sur ce que doivent être nos priorités et ce à quoi nous devons renoncer. « Si nous voulons être cohérents, le constat doit laisser place à l’action. Les ONG et les pays du sud attendent que la communauté internationale fixe des objectifs et se dote des instruments nécessaires pour les réal i ser » . Au-delà des pays, i l a demandé à chacun, quelle que soit sa fonction, « de défendre le sujet du climat dans toutes les occasions, en amont de la Conférence de Paris, ou en provoquant les discussions ». « Pour mobiliser la société civile, il nous faut rappeler que l’enjeu climatique n’est pas optionnel. Le changement climatique n'affectera pas seulement les plus vulnérables. Facteur multi-aggravant, il déclenchera une chaîne d'impact dans le monde entier. C'est l'avenir de l'humanité qui se joue, plus que celui de la planète » a-t-il prophétisé. Un seul chiffre à retenir, celui des 40 millions de déplacés climatiques recensés en 2012. Si la situation perdure, ce nombre ne pourra aller qu’en augmentant comme l’attestent les propos de Monique Barbut, la secrétai re exécut ive de la Convention des Nations-Unies sur la lutte contre la désertification qui estime que la progression de la désertification en Afrique aura porté entre 2000 et 2020, 60 millions de personnes aux portes de l’Europe. Même l’armée américaine semble préoccupée mettant sur le même plan la menace climatique et le terrorisme. « Le lien entre changement climatique et instabilité est important » confie Nicolas Hulot.

Regrettant que tous ces sujets, ne soient f inalement abordés en France qu’« avec un prisme politique », Nicolas Hulot n’entend donc pas « abandonner la négociation de Paris aux négociateurs ». « Il faut tirer les choses vers le haut. Si nous ne parvenons pas à en extraire des priorités de niveau ministériel ou présidentiel, il y a peu de chance qu’elle aboutisse » prévient-il.

 

 

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