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PME, ETI : Faire le premier Pacte

Par Victor Poirier, Chargé d’études senior à l’Institut Montaigne

Enfin ! Près d’un an après son lancement par le ministre de l’Economie, le Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (loi “Pacte”) doit être examiné au Parlement en cette rentrée 2018.

Visant à faire grandir les entreprises françaises et à associer de façon plus pérenne les salariés à leurs résultats, ce texte s’adresse en priorité aux PME et ETI de notre territoire. Celles-ci (moins de 5 000 salariés et moins de 1,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires) sont trop souvent négligées par les pouvoirs publics, malgré leur importance capitale dans l’économie nationale. Si elles ne représentent que 3,8 % du nombre d’entreprises françaises, elles emploient 50 % des salariés, réalisent le tiers des exportations, 52 % du chiffre d’affaires global, et 49 % de la valeur ajoutée produite en France. Quatre ETI sur cinq sont par ailleurs implantées en dehors de la région parisienne, participant ainsi activement au développement économique des territoires.

Dès lors, il est de notre devoir d’encourager leur développement dans les meilleures conditions. L’Institut Montaigne y a consacré de nombreux travaux, parmi lesquels le rapport ETI : taille intermédiaire, gros potentiel, en janvier 2018.

Plusieurs mesures de la Loi Pacte rejoignent les propositions formulées dans ce texte : assouplissement des règles de franchissement des seuils (10, 50 et 250 salariés, le seuil de 20 salariés étant supprimé), mise en place d’un délai de cinq ans pour répondre aux obligations sociales, fiscales et administratives, ou encore encouragement de l’actionnariat salarié, de l’intéressement et de la participation. L’objectif est clair : mettre fin aux effets de seuil qui brident la croissance d’entreprises qui ne demandent qu’à se développer, tout en garantissant une meilleure répartition du profit.

Ces mesures parviendront-elles pour autant à la France de rattraper le retard qu’elle a accumulé, en témoigne le faible nombre d’ETI sur son territoire (5 800), en comparaison avec ses voisins italiens (8 000), britanniques (10 000) et allemands (12 500) ?

De nombreux blocages nuisent au bon développement de ces acteurs essentiels du tissu économique français.

• Certains sont “culturels” : outre la question des seuils qui devrait être traitée par la loi à venir, le caractère complexe et instable de la réglementation française s’ajoute à la prédominance du principe de précaution au sein de l’administration, au détriment du changement et de l’innovation.

• D’autres sont économiques : la France souffre notamment d’une faible rentabilité, du fait d’impôts de production très élevés (4,5 % du PIB en France, contre 1,8 % en moyenne dans l’Union européenne et 0,6 % en Allemagne) qui affaiblissent les marges des entreprises et nuisent à leur compétitivité.

• Enfin, le manque cruel de mesures numériques dans la loi Pacte est un signal inquiétant : il est indispensable pour les PME et ETI de se saisir de la question, au risque de perdre des marchés à l’export et de voir leur chiffre d’affaires potentiel amputé.

La loi Pacte est donc un signal positif envoyé aux entrepreneurs, mais qui ne saurait se suffire à elle-seule : elle doit absolument s’accompagner d’une stratégie d’ensemble ayant pour ambition d’inciter à l’entrepreneuriat et de créer un écosystème favorable à l’innovation. 

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